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Economie : 10 questions-réponses sur la crise du Covid-19

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Branimir Balogovic
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 29 mars 2020, mis à jour le 30 mars 2020

Une seule chose est sûre : la lutte contre ce virus s’apparente de plus en plus à une guerre de tranchées dont nous ignorons la fin. Le niveau d'inconnu dans lequel nous précipite cette crise est en effet sans équivalent et les experts du cabinet de conseil financier EFE & ENE nous aident à répondre à quelques questions.


1. Cette crise financière est-elle différente des précédentes ?

Absolument. En général, les crises ont une cause qui peut être cyclique (ralentissement, récession) ou plus soudaine (éclatement d'une bulle). Pas dans ce cas. Cette crise s’apparente à une guerre mondiale, avec la brusque interruption des chaînes d'approvisionnement, qui a commencé en Chine puis s'est propagée partout dans le monde en un temps record et dans tous les secteurs. 
Cette interruption de l'activité mondiale met à l'épreuve la solvabilité des secteurs public et privé comme s'il s'agissait d'une guerre. Cependant, les deux facteurs qui nous différencient d'une situation de guerre sont la sécurité juridique, qui facilitera la récupération, et le maintien de la liquidité, le système financier ayant appris l'importance de maintenir la liquidité à tout prix après les dernières crises financières.


2. Pourquoi d'autres pandémies n'ont pas provoqué cette débâcle ?

Même si le taux de mortalité du SARS était très élevée (9,6%), le taux de transmission était faible, avec seulement 8.000 personnes infectées dans le monde. Le H1N1 (grippe porcine saisonnière) a infecté 700 millions de personnes, mais avec une mortalité de seulement 0,02%. Aujourd'hui, nous vivons avec. En revanche, le Covid-19 a le pire des deux scénarios : une forte capacité de contagion exponentielle et une mortalité élevée, sans être heureusement l’ébola, qui pourrait avoisiner les 7% (75% des personnes décédées souffraient d'autres pathologies ou avaient plus de 70 ans).


3. Pourquoi les chiffres actuels ne sont-ils pas fiables ?

Le problème est que tout le monde n'est pas testé. Pas même ceux qui présentent de légers symptômes. Les autopsies ne sont pas non plus effectuées sur les malades qui présentaient tous les symptômes du Coronavirus. De plus, il a déjà été établi que les personnes infectées mais sans symptômes sont responsables des deux tiers de toutes les contagions. Il en résulte que le nombre de la population infectée est estimé entre 10 et 20 fois les chiffres officiels. D’ailleurs, on recensait en Espagne le 25 mars 130.000 arrêts maladie pour Coronavirus alors que les chiffres officiels parlaient de 47.600 infectés.

 
4. Qu'ont fait la Corée du Sud ou Singapour pour réussir à contenir le virus ?

Tout d'abord, prendre des mesures immédiatement. En effet, chaque semaine de perdue sans agir signifie multiplier par deux la progression de l’épidémie. Ces pays ont fait preuve de transparence et ont utilisé tous les moyens à leur disposition et en particulier la technologie. Après des tests massifs avec des unités mobiles dans les parkings et les espaces ouverts, le tracking des téléphones portables leur permet en plus de savoir si une personne infectée est bien en quarantaine, qui sont les personnes qu’elle rencontre et où sont les principaux foyers. 


5. Combien de temps durera le confinement ?

La question peut aussi se résumer à combien de temps l'économie espagnole pourra supporter cette mise en hibernation. Car le confinement ne tuera pas le virus. Son objectif n’est autre que de ralentir la croissance exponentielle de l’épidémie et éviter ainsi l'effondrement du système de santé. Chaque jour de confinement aide à aplanir la courbe de contagion et empêche la progression. 

Or, si l'Espagne respecte les mêmes délais qu’en Chine, où la quarantaine devrait durer 76 jours (en principe du 23 janvier au 8 avril), le confinement pourrait alors se prolonger jusque fin mai… Quoiqu’il en soit, certaines restrictions devraient continuer après la fin de la quarantaine afin d'atténuer une éventuelle deuxième vague de l'épidémie tant qu’un vaccin n’aura pas été trouvé. 

Le scénario le plus probable est que le virus reviendra en plusieurs vagues, comme la grippe espagnole de 1918. L'impact plus ou moins important dépendra du nombre de personnes qui le transmettent, de celles déjà immunisées et enfin du développement d'un vaccin. La bonne nouvelle est que d’après l'université américaine Johns Hopkins, le Covid-19 muterait beaucoup moins vite qu’une grippe classique et il ne faudrait donc qu’un vaccin unique et non un vaccin annuel comme pour la grippe.


6. Une reprise rapide est-elle possible ?

Les experts de Multi Family Office EFE & ENE ne partagent pas le catastrophisme actuel et doutent fortement que quelque chose de structurel se brise. Pour eux, il s'agit plutôt d'une récession au ralenti qui sera suivie d'une reprise plus rapide que d'habitude, grâce à une forte hausse de la demande.

 
7. Pourquoi les bourses ne ferment-elles pas ?

C’est la première fois qu’une crise sanitaire a un tel impact sur les marchés. Les chutes sont dévastatrices. Tous les records ont été battus. Même les valeurs refuge comme l’or ou les obligations ont été touchées. Et l’on ne voit pas encore la sortie du tunnel. Cependant, les bourses doivent rester ouvertes. La principale caractéristique des marchés est qu'ils permettent la liquidité des investissements. Pour EFE & ENE, il ne faut pas empêcher celui qui en a besoin de vendre ou celui qui veut investir d'acheter. Nos émotions sont notre seul ennemi : vendrions-nous un penthouse de luxe dans la meilleure rue de la ville pour 100.000 € ? Sûrement pas, sauf si nous en avions besoin. C’est au contraire le moment d'acheter et non de vendre.

 
8. Les bourses peuvent-elles se récupérer à court terme ?

Personne n’est en mesure de le prévoir. Cependant, certains faits se produiront très probablement :

- La Bourse se redressera avant la crise sanitaire, et ce avant la crise économique.
- La volatilité diminuera progressivement.
- Les premières remontées seront fulgurantes, suivies d'énormes dents de scie.
- Toutes les actions ne se récupèreront pas, même dans une décennie.
- Les titres et secteurs les mieux positionnés avant seront les mieux positionnés après.

  
9. Quels secteurs sont les plus endommagés ? Y a-t-il des opportunités ?

La punition des différents secteurs a été implacable. Celui de l'énergie en particulier a doublement souffert puisqu’il était en pleine guerre des prix entre la Russie et l'Arabie saoudite. Les opportunités ne coïncident pas nécessairement avec les secteurs les plus durement touchés, mais avec les mieux préparés pour aller de l'avant. De l'avis des experts de l'EFE & ENE, les meilleurs secteurs "pré-virus" le sont aussi maintenant.

 
10. Est-ce que quelque chose de similaire se reproduira ?

Le consensus de la communauté scientifique sur une pandémie n'est pas s'il y en aura une, mais quand aura lieu la prochaine et quelles seront ses caractéristiques. En raison de son double caractère de contagion et de mortalité, le Coronavirus a mis en évidence notre manque de protection et prévision. Comme en 2008 face à un impact global sur le système financier, il est possible de prendre des mesures globales qui nous protègent de ce que nous savons déjà, et cela signifie augmenter le budget de la recherche et du système de santé.