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Les tourbières : une richesse à la croisée des enjeux de développement

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Écrit par Sandrine Leménager
Publié le 12 février 2020, mis à jour le 12 février 2020

Qu’est-ce qui couvre moins de 3% de la surface du globe mais stocke deux fois plus de carbone que les surfaces forestières ? Qu’est-ce qui est ainsi le premier stock de carbone terrestre ? Un milieu assez peu connu : les tourbières. Et particulièrement présent en Indonésie, puisque le pays possède plus de la moitié des zones de tourbières tropicales du monde, notamment sur les îles de Sumatra et Kalimantan.

Les tourbières en Indonésie : une richesse mondiale à la croisée des enjeux de développement

 

Qu’est-ce qu’une tourbière ?

Les tourbières en Indonésie sont des sortes d’immenses éponges à carbone, millefeuilles de matières végétales déposées pendant des années en milieu humide et pauvre en oxygène ; elles jouent un rôle crucial dans l’atténuation du changement climatique. 

Si historiquement ces tourbières étaient couvertes de forêts humides, elles ont subi depuis les années 80 déboisement, drainage et plantation d’essences plus rémunératrices pour l’homme, destinées notamment à produire huile de palme, pâte à papier ou caoutchouc.

Le cas des tourbières à Sumatra et à Kalimantan 

Chaque année, les feux qui sévissent lors de la saison sèche à Sumatra ou Kalimantan sont souvent des feux de tourbières, quasiment impossibles à éteindre puisque celles-ci émettent du méthane, très bon combustible : c’est bien la tourbe qui brûle, y compris en profondeur, et non uniquement la biomasse de surface comme en forêt. Lors de ces incendies, le carbone stocké pendant des années est rejeté dans l’atmosphère. D’après le CIRAD, 10 % des feux enregistrés dans une seule préfecture de Sumatra représentent l’équivalent de deux années d'émissions de dioxyde de carbone françaises !

L’enjeu est donc de taille : comment restaurer ces milieux humides, puis les préserver, tout en permettant aux populations locales d’en vivre, puisqu’elles restent bien entendu les premières concernées ? 

Comment concilier lutte contre la pauvreté, voire développement local, et lutte contre le changement climatique, à une échelle globale ? Le tout dans un contexte de convoitise de ces surfaces par des filières industrielles à forte influence. Comment créer une chaine de valeur qui valorise le service écosystémique de stockage de carbone rendu par les tourbières ?

Des solutions locales pour enrayer la disparition des tourbières 

C’est sur cet enjeu que sont mobilisées certaines organisations, comme WARSI[1], qui interviennent avant tout sous l’angle d’un soutien aux communautés locales forestières, dans la recherche de sources de revenus compatibles avec un mode de gestion durable des tourbières (agroforesterie, écotourisme, etc). 

En 2016, le Président Jokowi a créé l’Indonesian Peat Restoration Agency, qui met en œuvre un programme de remise en eau des tourbières, via un système de canaux, et de re-végétation, afin de maintenir l’humidité et prévenir les incendies. Cette jeune agence semble refléter une prise de conscience des enjeux en présence.

A l’heure de la COP[2]25 à Madrid sur le changement climatique, la question des modalités d’une gestion durable des tourbières est criante d’actualité. Si elle se décline bien sûr en Europe (tourbières de Scandinavie, par exemple), elle prend une acuité toute particulière en Indonésie, où la démographie et les enjeux de développement sont incomparables.

 

[1]  Indonesian Conservation Community Warsi, créée en 1992, et présente à Sumatra, Kalimantan et en Papouasie.

[2]Conférence des Parties

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