Trésor retrouvé d’Antoni Jaczewicz charlatan, voleur, et faux prophète du 18e siècle

L’épopée d’un baratineur guérisseur  

L’histoire débute en 1708. Alors que la Grande Guerre du Nord (III wojna północna) fait rage depuis 8 ans et qu’une importante vague d’épidémie de peste déferle sur la Pologne, un dénommé Antoni Jaczewicz s’installe dans la région des Montagnes de Świętokrzyskie. Capable de tout soigner grâce à un supposé don qui lui aurait été accordé par la Vierge Marie, il est consulté par les villageois des environs qui espèrent repartir de son campement mieux lotis que lorsqu'ils y sont arrivés.

Que les promesses de guérison aient un prix et que les traitements soient monnayés au prix fort n’aurait pas empêché les patients de continuer à affluer, influencés par le Grand hiver de 1709, les épidémies successives et la guerre qui se poursuit, année après année.

Le prédicateur aurait apparemment reçu de nombreuses visites. Tant et si bien, qu’avec l’argent accumulé, il serait parvenu à fortifier son campement et à embaucher des gardes. Le butin qu’il était en train d’amasser grâce à la crédulité et la bonne foi de ses visiteurs, n’était, selon toute vraisemblance, pas suffisant pour lui. Selon la légende, il commença à piller les habitants des environs, voire à se saisir de leur propriété complète, à s'attaquer aux pèlerins de passage et même aux nobles vivant à proximité de son abri.

C’est pour lui le début de sa démise : capturé par ceux-ci et emprisonné pour ses crimes financiers, il réussit cependant à s’enfuir et il aurait continuer d'exercer, en prétendant cette fois avoir reçu la bénédiction du pape. Mais l’aventure est cette fois de plus courte durée : en 1712 il est de nouveau capturé et après avoir comparu devant la haute cour de Kraków, il aurait été condamné à l'emprisonnement à vie à Częstochowa.

C’est là que la trace d’Antoni Jaczewicz se perd et que sa légende commence.

💡 Entre vrai escroc, et fausse sorcière, deux poids deux mesures ?

Aujourd’hui on nous met en garde contre les arnaques sur Internet, mais ces procédés ne sont pas nouveaux : vraie-fausse rognure d’ongle de Saint-Antoine de Padoue, mèche de cheveux de l’Enfant-Jésus à l’âge de 3 ans, eau miraculeuse guérissant la goutte, les rhumatismes, l’infertilité et l’impuissance… Les escrocs n’ont jamais manqué d’imagination, au fil des siècles pour se faire de l’argent sur la crédulité de leurs contemporains tout en surfant sur l’obscurantisme de leur époque. 
Très peu d’informations sont disponibles sur cet escroc, la preuve que bien avant l’anonymat de la toile, c’est dans l’ombre qu’agissent les crapules. 

Le fait que ce charlatan ait pu opérer d’aussi longues années, sans être inquiété par les autorités ni par sa communauté, soulève une question. 
Pour rappel, il n’y a pas si longtemps, au XIXe siècle, en Pologne, Barbara Zdunk, la dernière femme, accusée à tord et considérée comme une “sorcière” a été condamnée au buché lors d’un long procès en sorcellerie, émaillé de tortures, le dossier passant par toutes les instances de la cour de Prusse… Elle est brûlée en août 1811, à Reszel dans la voïvodie de Warmie Mazurie.
En 1836, en Poméranie, Krystyna Ceynowa a été jetée à l’eau afin de vérifier qu’elle était une sorcière : flottant à la surface à cause de ses nombreux jupons, elle a été condamnée par la foule qui l’a frappé de toutes les façons possibles jusqu’à ce que mort s’en suive.

En ce 18e siècle, l’épidémie de peste et les nombreuses guerres ont pu servir longtemps de paravent à Antoni Jaczewicz, et même s’il a fini par être condamné tardivement, si une femme avait eu les mêmes agissements, n’aurait-elle pas été accusée de sorcellerie ?Bénédicte Mezeix 

L’histoire d’un trésor enfin retrouvé en Pologne

En juin 2022, un groupe d’historiens amateurs du Świętokrzyska Exploration Group découvre, à l’aide de détecteurs de métaux, une collection de pièces d’or et d’argent de diverses monnaies comme des orts, des sixpence, des patagoons, des krajcars, des kopecks, ainsi qu’un ducat d’or.

Cette fabuleuse découverte n’est pas due au hasard : partie sur les traces de l’escroc légendaire Antoni Jaczewicz, l’équipe espérait bien retrouver une partie de son butin. D’après les recherches publiées cette année, c’est un succès pour l’équipe : le trésor enfoui pourrait bien être celui du pseudo guérisseur aux dons divins, qui, probablement dans l’espoir de préserver sa richesse, avait décidé de la cacher avant que les autorités ne le rattrapent. 

Originaires des quatre coins de l’Europe, les pièces découvertes permettent de montrer que la Pologne du XVIIIe siècle était un carrefour économique où les échanges de monnaies issues de différentes régions européennes étaient courants. Ces flux peuvent s’expliquer par le passage en Pologne de nombreuses routes commerciales telles que les routes de Mazovie, autrement dit les « routes de l’ambre » ainsi que par la présence de la communauté hanséatique en Pologne.  

La ligue commerciale hanséatique

Parfois appelée Guilde commerciale hanséatique, Hanse germanique ou Hanse teutonique, cette ligue visait à faciliter le commerce et protéger les intérêts mutuels de ses membres. Active entre le XIIe et le XVIIe siècle, les traités de Westphalie marquent sa disparition et en 1669, au dernier congrès de la Ligue, la ville de Gdańsk faisait partie des 6 villes ayant répondues présentes. 

Mais quelle était la place de la Pologne dans la Ligue ? Selon les travaux de Philippe Dollinger, dans 21 villes polonaises les commerçants avaient des privilèges hanséatiques qui pouvaient être de court, moyen, ou long terme. 

De nouvelles perspectives pour la Hanse ? Une nouvelle Hanse à été relancée en 1980 sous l’impulsion de la ville néerlandaise de Zwolle et l'activité entre les villes hanséatiques se développe de nouveau. C’est dans l’ancienne ville hanséatique de Lübeck que siège cette nouvelle alliance.

Depuis 1980, les journées internationales de la Hanse ont lieu chaque année dans une ville différente. Pour la 44e édition qui a marqué l’année 2024, l’événement a eu lieu à Gdańsk au cours du mois de juin.

En 2025, c’est la ville de Visby (en Suède) qui accueillera l’événement.