Défense civile et institutions locales, quel rôle dans la sécurité nationale ?

Dimanche 17 novembre, la Pologne mobilise « toutes les forces disponibles » pour protéger son territoire d'une potentielle attaque russe

Retour sur ce panel qui s’est déroulé jeudi 17 octobre, lors de l'Europejskie Forum Nowych Idei (EFNI - Forum Européen des Idées Nouvelles).

En préambule, débutons par l'actualité du dimanche 17 novembre et la mobilisation en Pologne de « toutes les forces disponibles » par mesure de précaution, face à la menace russe à sa frontière orientale avec l'Ukraine. 

 

L’évolution de la situation géopolitique en Ukraine : ou pourquoi la défense civile fait l’objet de toutes les attentions en Pologne 

- La défense civile fait l’objet d’un intérêt grandissant en Pologne, intérêt assurément en lien avec le contexte géopolitique actuel. En effet, à cause de l'intensification de la guerre en Ukraine, les armées polonaises sont actuellement en état d’alerte. 

- En ce sens, ce dimanche 17 novembre, le commandement opérationnel des forces armées polonaises – Bronisław Kwiatkowski, a annoncé avoir fait décoller plusieurs avions de combat aux alentours de la frontière orientale du pays, alors que la Russie lançait une attaque aérienne de grande envergure sur l’Ukraine.

- 120 missiles et 90 drones de combat se sont abattus sur le territoire ukrainien (source PAP), en ciblant principalement les infrastructures électriques du pays, citant les chiffres de Volodymyr Zelensky.

- Le ministre des Affaires étrangères ukrainien – Andrii Sybiha, a déclaré sur X que c’est l’une des plus grandes attaques aériennes jamais menée sur l’Ukraine par la Russie.

- Malgré l’envergure de cette attaque, le président Volodymyr Zelensky, a soutenu sur Telegram que les forces de défense ukrainiennes avaient réussi à détruire plus de 140 cibles aériennes.

- Le vice-ministre de la Défense nationale polonaise, Cezary Tomczyk, a annoncé sur Polsat News que :
« Nous savons que la partie russe veut simplement frapper l'infrastructure critique de l'Ukraine avant l'hiver. Il veut les priver de l'approvisionnement en électricité, mais aussi de la chaleur, et c'était la cible des attaques russes. » (Source PAP)
"Wiemy, że strona rosyjska chce po prostu porazić infrastrukturę krytyczną Ukrainy przed zimą. Chce ich pozbawić dostaw prądu, ale też ciepła i to był cel ataków rosyjskich".

- En plus de ses forces aériennes, ce sont toutes les ressources militaires polonaises qui sont aujourd'hui mobilisées (notamment les systèmes de détection radar), pour faire face à une menace russe toujours plus importante.

- La Pologne a ainsi souhaité réagir à la mise en difficulté de l’Ukraine sur le front de l’est.

- Volodymyr Zelensky a d’ailleurs qualifié la situation à l’est de « difficile ». 

 

La Suède, un pays exemplaire dans la défense civile 

Ce panel, modéré par Jerzy Buzek - były prezes Rady Ministrów i przewodniczący Parlamentu Europejskiego (ancien Premier ministre et ex-Président du Parlement européen), a débuté avec un focus sur la Suède, pays précurseur des politiques de défense civile, conformément à l'essence d’EFNI (Europejskie Forum Nowych Idei ou Forum Européen des Idées Nouvelles) qui se veut être un forum d’analyse des nouvelles tendances européennes. 

C’est Magdalena Pramfelt - Consule honoraire générale de Suède, qui a pris la parole pour débuter ce panel, car la Suède fait figure d’avant-garde quant à la défense civile. En effet, depuis plusieurs mois, une grande campagne d’information et de sensibilisation sur la défense civile était en cours de conception ; elle a finalement été lancée ce 18 octobre.

En clair, chaque foyer a reçu une brochure contenant de multiples informations pour faire face à une crise météorologique, à une guerre, mais aussi à la désinformation. Cette brochure vise aussi à informer sur les problèmes sociaux propres au pays, comme le manque d’intégration des immigrants par exemple.

 

« En tant que Suédois - nous tous - faisons partie de la défense civile de notre pays. » Magdalena Pramfelt

"Jako Szwedzi – każdy z nas – jesteśmy częścią obrony cywilnej naszego kraju. »

La stratégie suédoise se veut la plus englobante possible, car, dans la brochure, il y a également des instructions pour protéger les animaux domestiques. 

En outre, la Suède ne cesse de construire de nouveaux bunkers anti-atomiques : aujourd'hui, elle en compte 65.000 (contre seulement 4.500 en Pologne), selon les chiffres donnés par la Consule. 

 

La défense civile en Pologne : le ciment de la défense polonaise

Le generał dywizji Wojska Polskiego w stanie spoczynku (ex-général de l’armée polonaise) - Leon Komornicki, a souligné la considération importante qu’ont les forces armées pour les initiatives de défense civile. 

 

« L’armée ne peut pas remplacer la défense civile ! » Leon Komornicki

« Armia nie może zastąpić obrony cywilnej ! »

Selon lui, la défense civile constitue la base du système de défense polonais : si l’armée est essentielle, la défense civile l’est tout autant. C’est pourquoi, de son point de vue, les Polonais devraient être plus sensibilisés à la défense ainsi qu’à la gestion de situations de crise. 

Un autre enjeu que l’ex-militaire voit dans la défense civile, c’est la protection et la résilience de l’économie polonaise, qui constitue un appui financier important pour l’armée polonaise. 

 

Face à l’importance de la défense civile, comment s’organisent les pouvoirs locaux ?

Kazimierz Barczyk - przewodniczący, Stowarzyszenie Gmin i Powiatów Małopolski (président de l'Association des municipalités et des districts de Petite-Pologne) a mis en avant la conférence « Bądź gotów ! » (ou « Soyez prêts ! » en français) qui s’est déroulée à Cracovie le 21 juin et qui a réuni plus de 1.500 personnes. Il voit dans cette affluence un fort intérêt de la nation polonaise pour les questions de sécurité y compris chez les femmes. 

Il ne néglige pas non plus les crises environnementales soutenant l’idée que la Pologne doit s’inspirer des pays scandinaves. 

C’est ensuite, Magdalena Czarzyńska-Jachim - prezydentka Sopotu (maire de Sopot), qui a pris la parole pour présenter l'approche de la ville de Sopot en la matière. Elle a commencé par mettre en avant le rôle central des pouvoirs locaux :

 

« Nous sommes en première ligne en cas de crises. » Magdalena Czarzyńska-Jachim

« Jesteśmy na pierwszej linii frontu w razie kryzysu. »

La maire de Sopot a ensuite alerté son audience sur le manque de moyens financiers pour mettre en place des politiques de défense civile concrètes. Elle a aussi souligné l’enjeu de l’éducation et de la prévention des citoyens, enjeu notamment porté par les gouvernements locaux.

 

Comment les entreprises prennent-elles part à la défense civile ?

Zbigniew Canowiecki, prezes organizacji Pracodawcy Pomorza (président de l'Association des employeurs de Poméranie) a mis en lumière le manque de préparation en cas de crises des petites et moyennes entreprises polonaises. En effet, contrairement aux transports publics ou aux institutions locales, beaucoup d’entreprises ne possèdent pas de plans d’évacuation en cas de guerre ou de danger majeur. 

Marcin Krasuski - Central and Eastern Europe Government Affairs and Public Policy Lead at Google Cloud (chargé des relations publiques et affaires gouvernementales Europe centrale et orientale à Google Cloud), a commencé par expliquer la raison de la participation de Google à ce panel. Si ce n’est pas une administration locale, Google a, selon lui, pour mission de lutter contre la désinformation, notamment en Pologne : un des pays les plus exposés aux cyberattaques dans le contexte de la guerre russo-ukrainienne. En effet, l’internet civil doit être un rempart contre les tentatives de désinformation menée par des hackers.