Z.Berdychowski : "Nous sommes aujourd’hui au seuil d’une ère totalement nouvelle"

Zygmunt Berdychowski en quelques faits marquants

Zygmunt Berdychowski a contribué la reconstruction de la Pologne après la PRL : militant, il a été membre du Sejm des 1er et 3e mandats, il a également fondé l’Institut d’études Orientales - Fundacja Instytut Studiow Wschodnich. C’est aux pieds des Monts des Géants - Kakonosze, en polonais, que ce féru d’alpinisme, né au cœur des montagnes, porte avec passion le Forum Économique, souvent appelé le Davos d’Europe centrale, depuis plus de 30 ans.

• Zygmunt Berdychowski est diplômé de la Faculté de droit de l'Université Jagellon en 1987.
• Après l'instauration de la loi martiale, il a participé activement au mouvement Solidarité - Solidarność, ce qui lui a valu d’être arrêté à deux reprises et condamné à une peine de prison.
• Dans les années 1991-1993, il a été membre du Sejm du premier mandat sur la liste PSL.
• Dans les années 1997-2001, il a été membre du Sejm sur les listes de l'Alliance électorale Solidarité.
• Dans les années 2010-2014, il a été conseiller de l'Assemblée de la voïvodie de Petite-Pologne.
• Depuis 1992, il est l’initiateur et l’organisateur du Forum économique, la plus grande conférence politique et économique d'Europe centrale.
• Zygmunt Berdychowski a reçu de nombreuses récompenses pour ses activités militantes et caritatives, notamment :  Prix ​​Jerzy Giedroyc de ​​"Rzeczpospolita" en 2009, le Prix Saint Frère Albert en 2007. En 2011, il a reçu la Croix d'Officier de l'Ordre de Polonia Restituta.
• Zygmunt Berdychowski, passionné d’alpinisme, est un homme qui tutoie les sommets : en juillet 2015, il conquiert la couronne de la Terre en gravissant le Denali (McKinley), le plus haut sommet d'Amérique du Nord.

 

Lepetitjournal.com Varsovie : le Forum économique a vu le jour en 1992, qu’est-ce qui vous a motivé à vous lancer dans cette aventure qui dure depuis plus de 30 ans et pouvez-vous revenir sur le climat politique et économique de cette époque en Pologne, pour nos lecteurs ?

Zygmunt Berdychowski : En 1992, j'étais député au Sejm dans la circonscription de Nowy Sącz et j’ai pensé qu'après trois ans de révolution Solidarność, il était temps de faire un bilan. Après 1989, les changements favorables au marché que nous avions proposés ont été introduits et l’économie s’est transformée à un rythme rapide. J'ai envoyé une invitation pour discuter de ces questions à un grand groupe de politiciens de tous bords. Beaucoup d'entre eux ont répondu présent : environ 120 invités ont pris part à la première réunion.

Il est important de préciser qu’elle comprenait des représentants de tous les courants politiques, tant ceux au pouvoir que ceux de l’opposition.

L’atmosphère de la discussion et la façon dont ils se parlaient étaient extraordinaires. Ils étaient unis par une idée commune : mettre en œuvre au mieux les grandes réformes qui transformaient notre pays. L'organisation de synthèses annuelles ultérieures a été quelque chose de naturel, demandée par les participants eux-mêmes.
Lorsque j'ai cessé d'être député en 2001, je me suis entièrement consacré à l'organisation du Forum économique.

 

Le Forum est souvent présenté comme le Davos de l’Europe centrale. En quoi est-il un événement incontournable en Europe centrale et orientale aujourd’hui ? Quelle est sa spécificité ?

L'un des objectifs du Forum économique a toujours été d'atténuer les conflits et de créer des liens. Le Forum économique a été l'une des premières grandes conférences de ce type, non seulement en Pologne, mais aussi dans cette partie de l'Europe. Il s’est développé de manière très dynamique et il a été naturel d'avoir des contacts avec des hommes politiques et des entrepreneurs des pays voisins qui surmontaient les mêmes difficultés que nous.

Afin de maintenir cette dynamique, il doit y avoir des institutions dont les perspectives d'activité sont plus longues que la période au pouvoir occupée par une équipe politique spécifique. C’est le moyen de résoudre les problèmes. Nous avons besoin d'endroits où les gens échangent, c'est notre raison d'État.

Le jury de notre prix Personnalité de l'année comprend 46 personnes représentant diverses opinions. Je suis très heureux que chacun puisse surmonter les divisions en votant pour les meilleurs, et pas nécessairement uniquement pour leurs propres candidats.

 

Comment le Forum a-t-il évolué au cours de toutes ces années ?

Lorsque j'ai fondé la Fondation de l'Institut d'études orientales en 1993 - chargée d'organiser le Forum - je ne m'attendais pas à ce que le développement de la conférence soit aussi dynamique. Il a rapidement acquis un caractère international, car déjà en 1993, plusieurs invités étrangers étaient au rendez-vous.

En 2001, nous avons dépassé la barre des 1.000 invités et ce nombre augmente chaque année.

Pouvez-vous nous en dire plus sur le thème de cette 33e édition : "Time of New Leaders – Shaping the Future Together" – « L'heure des nouveaux dirigeants - Façonner l'avenir ensemble » ? Comment choisissez-vous les thèmes ?

Le choix de la thématique est précédé de longues discussions au sein de diverses instances sur les processus politiques et économiques les plus importants qui se déroulent dans le monde qui nous entoure, leurs perspectives et leurs conséquences.

Nous sommes aujourd’hui au seuil d’une ère totalement nouvelle dans laquelle le monde est multipolaire et les relations entre les acteurs les plus importants se refroidissent. La mondialisation ralentit et fait référence à des blocs de pays qui se font concurrence. L’euphorie et l’optimisme qui ont accompagné l’abolition des barrières commerciales sont malheureusement passés et l’affirmation selon laquelle le capital n’a pas de nationalité s’est révélée fausse. Le programme climatique pour l’Europe, formulé de manière très ambitieuse il y a quelques années, doit aujourd’hui faire face à l’architecture changeante de l’ordre mondial.

De plus, de nouveaux leaders apparaissent qui, par exemple, dans le secteur de l'intelligence artificielle, n'étaient pas connus, jusqu'à récemment. Les Européens disent aujourd’hui : nous voulons construire quelque chose d’unique, mais au lieu de le faire principalement en nous basant sur notre force, nous cherchons des solutions et des partenaires aux États-Unis.

 

Walid Barsali, Président de la French Tech Warsaw : l’IA, le tournant à ne pas rater 

 

Quels sont les grands noms nationaux ou internationaux qui ont visité le Forum par le passé ?

Depuis plus de trois décennies, les invités du Forum économique comprennent presque tous les présidents et Premiers ministres des pays d'Europe centrale et orientale ainsi que de nombreux représentants des gouvernements de tous les pays européens.

On peut nommer : Vaclav Havel, Volodymyr Zelensky, Valdas Adamkus, Milkulas Dzuirinde et Janez Jansa.

 

 

On note la présence constante de représentants de la Commission européenne et du Parlement européen. Nous avons accueilli José Manuel Barroso et Jerzy Buzek. Nous avons également accueilli Thomas Bach, président du Comité International Olympique.
Je ne veux pas en dire trop sur les invités de cette année, mais je vous assure qu'il y aura de nombreuses personnalités importantes et intéressantes - nous envisageons d'inclure par ailleurs un Forum sur l'intelligence artificielle auquel - en coopération avec le ministère polonais de la Numérisation - participeront des représentants des gouvernements européens.

 

 

 

Chaque année, de nombreux Français sont invités ou se rendent de leur propre initiative au Forum économique de Karpacz, pouvez-vous citer quelques noms ?

Les années précédentes, parmi les Français, ont participé : Catherine Trautmann, coordinatrice européenne du corridor RTE-T Mer du Nord-Baltique, Commission européenne ; Guillaume Rose, CEO, Monaco Economic Board (MEB) ; Pierre Haroche, maître de conférences en relations internationales et sécurité internationale ; Thibaut Guignard, maire de Plœuc-L'Hermitage (Côtes-d'Armor) et coprésident de la commission Europe de l'Association des Maires de France ; Xavier Pasco, Directeur, La Fondation pour la recherche stratégique (FRS) ; François DECOSTER, Maire de Saint-Omer, Vice-Président du conseil régional des Hauts-de-France ; Christophe Lecourtier, Directeur Général, Business France ; Pierre-André de Chalendar, Président, Groupe Saint-Gobain ; Jean-Christophe Niel, directeur général, Institut de sûreté nucléaire et de radioprotection (IRSN) ; Charles Duchaine, Directeur de l'Agence Française Anticorruption ; Guillaume Pitron, Journaliste et Auteur ; Carlos Moreno, Urbaniste, pour ne citer qu’eux.

 

Entretien : Guillaume Pitron, « La Guerre des métaux rares » pas si rares que ça — 1/3 

 

 

 

Qui sont les Français qui seront présents à Karpacz du 3 au 5 septembre 2024 ?

Nous attendons : Jean Marc Daniel, président, Société d'économie politique ; Renaud Bellais, Fondation Jean Jaurès ; Jean-Pierre Cabestan, Professeur de Hong Kong, Baptist University ; Nicolas Bouzou, président des Rencontres de l'Avenir de Saint-Raphaël ; Antoine Godbert, DRAREIC (Délégation régionale académique aux relations européennes et internationales et à la coopération) de la région académique Île-de-France ; Olivier Cadic, Sénateur des Français de l’Etranger ; Marie Trellu-Kane, présidente exécutive et cofondatrice d'Unis-Cité ; Renaud Girard, Le Figaro.

 

Qu’est-ce qui rend le Forum économique attractif, au-delà de l’Europe centrale et orientale, quel intérêt pour les Français, d’y participer ?

Aucune autre conférence dans cette zone de l’Europe n'est aussi vaste et aussi complète, aucune autre conférence ne reçoit autant de politiciens, d'experts et d'économistes de cette région - près de 6.000 participants et plus de 350 débats. Celui qui veut connaitre notre région, nos façons de surmonter les difficultés et nos projets pour l'avenir le fera rapidement et efficacement lors du Forum économique dont la 33e édition débutera le 3 septembre à Karpacz.

 

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