Édition internationale

Sabotage en Pologne : la ligne ferroviaire Varsovie-Lublin ciblée deux fois

Les 15 et 16 novembre, deux actes de sabotage ont frappé la ligne ferroviaire entre Varsovie et Lublin, qui permet, entre autres, l’acheminement de l’aide internationale vers l’Ukraine. Aucun blessé n’est à déplorer, mais le Premier ministre Donald Tusk parle d’un “acte de sabotage sans précédent” contre la Pologne. Le pays connaît une escalade très dangereuse d’agressions hybrides, qui visent directement la sécurité de l'État polonais et de ses civils.

Le Premier ministre Donald Tusk sur les lieux du sabotage ©Kancelaria Prezesa Rady MinistrówLe Premier ministre Donald Tusk sur les lieux du sabotage ©Kancelaria Prezesa Rady Ministrów
Le Premier ministre Donald Tusk sur les lieux du sabotage ©Kancelaria Prezesa Rady Ministrów
Écrit par Louis Moreau
Publié le 18 novembre 2025, mis à jour le 2 décembre 2025

 

Ligne ferroviaire Varsovie-Lublin : deux actes de sabotage

Vers 21h, les habitants du village de Życzyn, dans la voïvodie de Mazovie, ont signalé à la police le bruit d’une détonation. Ce n’est que le lendemain matin, aux alentours de 7h40, qu’un conducteur de train signale un dommage sur la voie qu’il est en train d’emprunter, proche de la zone où une explosion semble avoir été entendue la veille. La police est alors dépêchée sur place pour enquêter. 

 

En fin de journée, le Premier ministre Donald Tusk a indiqué sur X – anciennement Twitter, être en contact permanent avec le ministre de l'Intérieur, l’incident pouvant être un acte de sabotage. 


 

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Vers 21h, un nouvel incident se produit sur la ligne ferroviaire Varsovie-Lublin. Un train de passagers est contraint de faire un arrêt brutal après que les fenêtres d’un des wagons ont été brisées. Heureusement, aucun blessé n’est à signaler parmi les passagers du train. 

La police de Lublin a indiqué que « les vitres ont été brisées – très probablement par une ligne de traction endommagée. » – „w jednym z wagonów doszło do wybicia szyb – najprawdopodobniej przez uszkodzoną linię trakcji.

 

 

 


 

Ces sabotages auraient pu avoir de terribles conséquences, mais heureusement, aucun train n’a déraillé 

Sur la section de la ligne ferroviaire touchée par l’explosion de samedi soir, l’un des rails a été fendu en deux, créant une discontinuité sur la voie. Cet acte de sabotage avait donc probablement pour but de faire dérailler un train afin de provoquer une catastrophe ferroviaire, comme l’a rappelé Donald Tusk dans une vidéo sur les lieux de l’événement postée sur X

Dans un article publié sur le site de RMF FM – Radio Muzyka Fakty FM, trois trains ont emprunté cette ligne sabotée avant que le conducteur d’un quatrième ait fait un signalement et que le trafic soit interrompu. 

Il semble dès lors qu’il y ait eu une faille dans les systèmes de sécurité et de surveillance de l’intégrité du réseau pour que trois trains puissent rouler sur un rail endommagé sans noter de problème. 

Néanmoins, le ministre des Infrastructures, Dariusz Klimczak, a salué la vigilance des conducteurs et du personnel des services ferroviaires qui ont permis d’éviter la catastrophe : 

 

Toutes les procédures ont été mises en œuvre. Les gares et les équipes ont été renforcées. Nous restons vigilants et sereins. Dariusz Klimczak, ministre des Infrastructures.

 

 „Wszystkie procedury zadziałały. Posterunki i zespoły zostały wzmocnione. Zachowujemy  czujność i zimną krew“, Dariusz Klimczak, ministre des Infrastructures.

 

Pour ce qui est du deuxième incident survenu dimanche soir, en plus des dégâts causés par la ligne de traction endommagée, le train a également roulé sur une plaque métallique qui a été boulonnée intentionnellement dans le but de faire dérailler un train. Par chance, la plaque était trop fragile et s’est avérée inefficace contre le train de passagers.


 

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Des actes qui visent directement la sécurité de l'État polonais et de ses civils

Lundi 17 novembre, au matin, Donald Tusk s’est rendu sur les lieux des incidents. À cette occasion, il a affirmé sur X que ces incidents sur la ligne ferroviaire Varsovie-Lublin sont « un acte de sabotage sans précédent qui vise directement la sécurité de l'État polonais et de ses civils. » 

Le Premier ministre polonais a rappelé que cette ligne ferroviaire est importante pour l’acheminement de l’aide internationale vers l’Ukraine, puisqu’elle relie la capitale polonaise à la frontière ukrainienne. 

 

 

 


 

Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue ce lundi 17 novembre, le ministre coordonnateur des services spéciaux, Tomasz Siemoniak a affirmé qu’il était fortement probable que les saboteurs responsables de l’explosion ont agi sous les ordres d’une puissance étrangère. Néanmoins, comme Donald Tusk, le ministre n’a nommé aucun pays en particulier. 

Pour ce qui est du deuxième incident, il n’est pas encore établi s’il s’agissait aussi d’un sabotage ou d’un incident. 

 

Le ministre de la Défense nationale Władysław Kosiniak-Kamysz a quant à lui annoncé que l’armée était présente pour sécuriser les lieux, notamment pour vérifier un tronçon de la ligne ferroviaire de 120 km, du lieu de l’incident jusqu’à Hrubieszów, ville située à la frontière avec l’Ukraine. 

 

Paweł Makowiec de CyberDefence24 a déclaré à l'agence PAP :

« Nous avons déjà reçu la confirmation officielle qu'il s'agissait d'un acte de sabotage. D'après les informations dont je dispose, c'est le premier cas de sabotage sur les chemins de fer polonais depuis 1938. Et ce n'est pas une plaisanterie »

 

Otrzymaliśmy już oficjalne potwierdzenie, że był to akt sabotażu. To jest, według dostępnych mi danych, pierwszy przypadek sabotażu na polskiej kolei od 1938 r. I to nie jest żart 


 

 

 

Lundi après-midi, un peu avant 16h, Donald Tusk a également fait savoir qu’une session extraordinaire du Comité gouvernemental aux affaires de Sécurité nationale. Cette session s’est tenue mardi matin 18 novembre, en présence des commandants militaires, des chefs des services et du représentant du président.  

 

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Un sabotage permettant au camp présidentiel d’attaquer le gouvernement

Dans une interview pour la chaîne wPolsce24, le sous-secrétaire d'État à la Chancellerie du Président de la République de Pologne, Karol Rabenda a tenu à rappeler que le président Karol Nawrocki a été informé de la situation via le Bureau national de sécurité (BBN – Biuro Bezpieczeństwa Narodowego). 

 

Karol Rabenda a ensuite expliqué qu’un tel événement était à prévoir au vu de la crise que traverse le pays à cause de la guerre en Ukraine et de la guerre hybride à laquelle la Pologne est en proie. Il a fustigé dès lors le manque de préparation et l’incompétence du gouvernement face à ces menaces : 

 

le ministre annonce qu'il y a eu une explosion, alors qu'elle a eu lieu en soirée. Si des citoyens signalent une explosion dans leur quartier, nous n'envoyons pas une patrouille de police livrée à elle-même. Nous informons plutôt nos supérieurs et les services compétents, qui mènent l'enquête jusqu'à ce que l'origine de l'explosion soit localisée. Karol Rabendasous-secrétaire d'État à la Chancellerie du Président de la République de Pologne

 

A dziś wychodzi pan minister i mówi o tym, że był wybuch, ale w zasadzie on był wieczorem – jeśli obywatele informują, że był wybuch w ich okolicy, to nie wysyła się patrolu policji, który jest zdany sam na siebie, tylko informujemy przełożonych, służby i one pracują tak długo, aż znajdą źródło tego wybuchu.“, Karol Rabendasous-secrétaire d'État à la Chancellerie du Président de la République de Pologne

 

Attaques de fake news et coups bas : entre désinformation et opportunisme politique

Dès la confirmation des premiers éléments portant sur les attaques et avant même que le Premier ministre médiatise la question, certains messages sur les réseaux sociaux ont commencé à accuser les réfugiés ukrainiens en Pologne comme étant responsables de ces sabotages ou à défendre le fait que la Russie n’y était pour rien. 

 

Certains politiques se sont introduits dans cette brèche en utilisant ces sabotages pour critiquer leurs adversaires politiques du gouvernement. C’est par exemple le cas du député Konrad Berkowicz, du groupe parlementaire Confédération – Konfederacja, qui a accusé le gouvernement d’être vague et de vouloir camoufler la vérité sur les responsables. Pour le député, le gouvernement accusera les boucs émissaires habituels, sans toutefois qu’il indique le nom de ceux-ci, laissant ainsi libre à chacun d’interpréter ses paroles dans le sens qu’il voudra. 


 

 


 

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