Le 17 octobre 2025, le Premier ministre polonais Donald Tusk a clôturé le Forum Européen des Idées Nouvelles (EFNI – Europejskie Forum Nowych Idei) par un long discours qui a indiqué les grands axes de la politique de son gouvernement et de son parti à venir : guerre en Ukraine, toujours prioritaire, climat qui passe au second plan. Le Premier ministre a également réagi à l’attaque contre le bureau national du PO (Platforma Obywatelska) qui est survenue plus tôt dans la journée et en a imputé la responsabilité à ses adversaires du PiS (Prawo i Sprawiedliwość).


Réaffirmation de la souveraineté européenne et de son indépendance dans le contexte de guerre en Ukraine, et sacrifice du climat
Dans le contexte de la guerre en Ukraine et d’une possible escalade de la guerre en Europe, les pays de l’Union européenne ont conclu depuis février 2022 que le réarmement des armées européennes était nécessaire pour assurer leur sécurité.
Par conséquent, dans son discours du 17 octobre 2025 à EFNI, Donald Tusk continue de réaffirmer le besoin vital de créer une industrie de défense souveraine en Pologne et en Europe. Il souligne que « Sans repolonisation et réeuropéanisation, nous perdrons la course face aux forces brutales et sans scrupules qui nous entourent ».
Ainsi, Donald Tusk appelle à revoir les priorités des pays européens en mettant de côté, du moins pour l’instant, la protection du climat afin de s’assurer de la sécurité du continent :
Nous ne pouvons pas sacrifier notre propre sécurité au nom des idéaux les plus nobles, comme la protection du climat. Nous devons trouver un équilibre en toutes choses et redéfinir la hiérarchie des priorités. Un développement sûr est possible là où l'autonomie et la souveraineté existent, tant au niveau national que continental. Donald Tusk, dans son discours à EFNI 2025.
„Nie możemy poświęcać własnego bezpieczeństwa w imię nawet najbardziej szlachetnych idei, takich jak ochrona klimatu. We wszystkim należy znaleźć balans i na nowo ustalić hierarchię priorytetów. Bezpieczny rozwój jest możliwy tam, gdzie istnieje autonomia i suwerenność – zarówno w wymiarze narodowym, jak i kontynentalnym. “
Pour Donald Tusk, il est clair que la Russie aurait dû perdre la guerre, si celle-ci ne bénéficiait pas du soutien de la Chine, de l’Iran et de la Corée du Nord. La guerre en Ukraine n’est donc pas une simple guerre d’agression, dont la raison est à trouver dans des ambitions territoriales, mais plutôt une guerre de civilisation, à dimension mondiale entre les démocraties et les pays autoritaires :
Nous devons donc ouvrir les yeux sur l'essence même de ce conflit. Il s'inscrit dans un conflit civilisationnel fondamental : un conflit sur la survie d'une civilisation fondée sur les droits de l'homme, l'État de droit et la démocratie. Donald Tusk, dans son discours à EFNI 2025.
„Powinniśmy więc otworzyć oczy na istotę tego konfliktu. To element fundamentalnego sporu cywilizacyjnego – sporu o to, czy cywilizacja oparta na prawach człowieka, praworządności i demokracji przetrwa.“
Donald Tusk : la Pologne du côté de l'Ukraine et l'Europe doit comprendre sa force
Préoccupation de Donald Tusk quant à la montée des tensions à l’encontre des réfugiés ukrainiens en Pologne
Au sujet des réfugiés ukrainiens en Pologne, Donald Tusk s’est d’abord félicité de la décision du juge du Tribunal de Varsovie Dariusz Łubowski de refuser l’extradition du plongeur ukrainien Volodymyr Zhuravlyov vers l’Allemagne et de le libérer de sa détention provisoire. M. Zhuravlyov est suspecté par les autorités allemandes d’avoir participé au sabotage du gazoduc Nord Stream 2.
Donald Tusk a déclaré : « Je suis très satisfait qu'un juge polonais ait prononcé ces mots très simples : si un Ukrainien combat la Russie, il mérite des félicitations, pas une arrestation. »
Donald Tusk a ensuite évoqué la défense des frontières polonaises. Pour lui, la défense de celles-ci est une condition à la sécurité de la Pologne. Il regrette le temps que certains ont mis à comprendre l’importance de la défense des frontières et du territoire. Ce retard de compréhension d’une partie de la classe politique, dans de nombreux pays, a conduit « au triomphe d'un populisme bon marché, dangereux et primitif dans de nombreux endroits du monde ».
Néanmoins, cette défense des frontières et du territoire ne vaut pas pour les réfugiés ukrainiens, car l’Ukraine est un allié de la Pologne et il est nécessaire de « la traiter absolument comme un allié ».
Pour Donald Tusk, bien que certains en Pologne puissent avoir peur des réfugiés puisque « l'immigration est toujours source de tensions et de problèmes », la tâche du gouvernement et des partis qui le soutiennent est de convaincre la population polonaise que ces réfugiés ne posent aucun problème. Il déclare :
Nous devons comprendre cette anxiété. En un sens, nous devons la partager afin de désamorcer ces émotions les plus négatives. [...] Il faut priver d'armes et d'outils ceux qui veulent transformer cela en tribune politique et, au final, en désastre politique. Donald Tusk, dans son discours à EFNI 2025.
„My musimy rozumieć ten niepokój. W jakimś sensie musimy go podzielać po to, żeby rozładowywać te najgorsze emocje. [...] Żeby odebrać broń i narzędzia tym, którzy z tego chcą uczynić taką polityczną platformę, a na końcu nieszczęście i katastrofę polityczną.“
Trois ans de guerre en Ukraine vécus de Pologne : " Je me sens trahi, sans espoir "
Attaque contre le bureau national du parti PO : des tensions politiques qui continuent de secouer la Pologne
Lors de son discours, Donald Tusk est également revenu sur l’attaque qui est survenue contre le bureau national du PO (Platforma Obywatelska – Plateforme civique) à Varsovie, ce vendredi 17 octobre, en amont de son discours à EFNI.
💡 Que s’est-il passé vendredi 17 octobre au bureau national du PO, rue Wiejska ?
Un Polonais de 44 ans a été interpellé lundi 20 octobre comme étant l’auteur de l’attaque.
Il a essayé de mettre le feu à l’entrée du bureau national par l’intermédiaire d’un cocktail Molotov.
L’homme était connu des services de police de Varsovie pour avoir proféré des menaces de meurtre à l’encontre du Premier ministre polonais sur X – anciennement Twitter, en mai dernier.
Il avait été arrêté et l’affaire fait l’objet d’une procédure judiciaire depuis juin 2025.
Donald Tusk accuse Robert Bąkiewicz, activiste et homme politique qui a été candidat pour le PiS aux élections de la Diète de 2023, d’avoir attisé les braises de la violence politique par son discours du 11 octobre 2025, lors de la manifestation contre l’immigration illégale à Varsovie, organisée par le PiS (Prawo i Sprawiedliwość – Droit et justice).
Durant ce discours, Robert Bąkiewicz a invité les manifestants présents de ne pas céder face aux « tentatives d’intimidations » des tribunaux et des magistrats. Il a ensuite affirmé que « Ces gens en paieront le prix, et cette route vers Grunwald [NDLR : Célèbre bataille contre les chevaliers teutoniques en 1410, source de fierté nationale pour la Pologne et la Lituanie] doit être telle que justice soit rendue, que ces mauvaises herbes soient arrachées du sol polonais et aspergées de napalm pour qu'elles ne repoussent plus. » À la suite de cela, il a appelé les Polonais à aller au combat, une épée dans une main et un chapelet dans l’autre.
Ruch Obrony Granic udowodnił, że Polacy to Naród zwycięzców! 🇵🇱
— Robert Bąkiewicz (@RBakiewicz) October 13, 2025
Kiedy się mobilizujemy i działamy razem, jesteśmy nie do powstrzymania.
Zmusiliśmy Tuska do przywrócenia kontroli na granicach, zatrzymaliśmy niemiecką politykę migracyjną i realnie wpłynęliśmy na wynik wyborów… pic.twitter.com/3qpGr3ozTI
Pour Donald Tusk, ce discours est l’un des facteurs de la violence politique qui s’instille actuellement en Pologne. Le lien entre l’appel « à asperger de napalm » et l’attaque au cocktail Molotov est très clair pour le Premier ministre polonais.
Après son discours, il a déclaré à la presse que cet événement illustre un problème actuel dans le monde politique polonais : la croissance de la violence verbale.
Donald Tusk est préoccupé par ce climat de violence qui pourrait conduire, selon lui, à une guerre civile. Il souligne également que toute personne cherchant à conflictualiser la société polonaise trouvera toujours le soutien de la Russie, soulignant ainsi les actions de guerre hybride que mène la Russie en Pologne pour déstabiliser le pays et l’affaiblir.
« Je suis préoccupé par cette situation. Je ne surestime pas l'importance de cet incident, mais je ne le laisserai pas passer », Donald Tusk à la presse après son discours à EFNI 2025.
„Nie przeceniam znaczenia tego konkretnego incydentu, ale nie odpuszczę“.
Le Premier ministre polonais est revenu sur cette attaque sur X – anciennement Twitter, lundi 20 octobre 2025. Il souligne une nouvelle fois le rôle des discours de Robert Bąkiewicz et, de façon plus générale, le rôle de Jarosław Kaczyński et de son parti, le PiS, dans l’augmentation des violences politiques en Pologne.
W czerwcu usłyszał zarzuty za grożenie mi śmiercią, w październiku próbował podpalić siedzibę Platformy. Bąkiewicz i Kaczyński muszą być zadowoleni. To na ich wiecu kilka dni wcześniej pierwszy krzyczał, by nie bać się sądów, wyrwać chwasty i rzucać napalm, by nie odrosły.
— Donald Tusk (@donaldtusk) October 20, 2025
💡 Quid de la Déclaration de Sopot 2025 ?
Les participants au Europejskie Forum Nowych Idei - EFNI ont signé en fin de forum une nouvelle Déclaration de Sopot intitulée « La sécurité de demain – Ensemble, nous sommes responsables » – „Bezpieczeństwo jutra – razem jesteśmy za nie odpowiedzialni“. Pour les participants, les 17 revendications de cette déclaration sont essentielles dans un monde de crises multiples, de guerre hybride et de « guerre cognitive ».
Les 4 points clés
• La première revendication appelle urgemment l’Union européenne à renforcer ses capacités de défense face à la Russie et aux bouleversements politiques mondiaux.
• Dans la troisième revendication, les participants rappellent que l’armée polonaise est la deuxième armée de l’Union européenne après la France. Cette armée et l’ensemble de la population doivent être prêts à défendre la sécurité de tous et les valeurs de la démocratie libérale.
• La dixième revendication souhaite faire de la déréglementation un pilier permanent de la politique de développement de l’État. Cette revendication a comme volonté d’en finir avec une bureaucratisation excessive mais, notons, qu’elle va à rebours des décisions de réglementation prises au sein de l’Union européenne.
• Dans la dernière revendication, les participants exhortent la Pologne à continuer son soutien à l'Ukraine et aux réfugiés ukrainiens qui se trouvent dans le pays. L’Ukraine défend la démocratie libérale au nom des Européens et les réfugiés ukrainiens sont un « groupe social précieux et loyal » pour la Pologne. Les discriminations et les attaques sont intolérables, d’autant plus quand elles servent des intérêts politiques et partisans.
EFNI 2023, le Forum Européen des Idées Nouvelles résiste avec la Déclaration de Sopot
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