Tous les jeudis, à 12 heures sonnantes, les juges du Tribunal des Eaux de Valence se réunissent au pied de la Cathédrale Santa Maria. Lepetitjournal Valence est parti à la découverte de cette institution contrôlant l’irrigation des champs de la Huerta depuis le Moyen Age.
Un tribunal d’agriculteurs
Le domaine agricole de la ville de Valence, appelé la Huerta (ou l’Horta en valencien), est irrigué par un système unique reprenant un dispositif de l’époque romaine perfectionné sous l’occupation arabe. Il est composé de huit canaux qui récoltent l’eau de pluie et l’acheminent sur les 23 hectares de la Huerta.
C’est pour gérer la distribution de cette eau, indispensable aux champs, que le Tribunal de las Aguas de la Vega de València (Tribunal des Eaux de la Plaine de Valence) a été créé. Huit juges sont ainsi élus parmi les agriculteurs, chacun représentant un canal du système d’irrigation.
La juridiction la plus ancienne d’Europe
Les membres du tribunal des Eaux vous diront que leur institution remonte, semblerait-il, au Moyen Age. En vérité, à ce jour, il n'existe pas de document faisant allusion au Tribunal avant le XVIIIe siècle. Cela ne veut pas dire pour autant que cette assemblée n’existait pas auparavant mais simplement qu’il n’y a aucune preuve historique.
Cependant, plusieurs particularités des sessions du Tribunal indiquent une origine ancestrale du rituel. Le fait que tous les jugements rendus le soient oralement permet de penser par ailleurs, qu’il a été créé bien avant que la tenue d’archives ne devienne systématique. De même, encore aujourd’hui, les amendes que les agriculteurs doivent payer sont exprimées dans une monnaie locale disparue depuis bien longtemps.
Un rituel qui subsiste pour le bonheur des touristes
De nos jours, les 8 juges continuent de se réunir tous les jeudis devant la porte des Apôtres de la Cathédrale Santa Maria, du côté de la place de la Vierge, pour tenir une séance publique. Ils s’assoient en cercle dans de grands fauteuils pendant qu’un homme énonce en valencien le nom des différents canaux. C’est pendant cet appel que les éventuels agriculteurs mécontents peuvent se manifester pour régler un contentieux.
Cependant, vous aurez peu de chance d’assister à un jugement. Selon un des juges du Tribunal des Eaux, près de 70% des litiges sont réglés directement dans les champs. Pour les 30% restant, les agriculteurs vont consulter les juges avant la séance publique afin d’éviter d’être jugés devant une foule de touristes.
Si la séance publique perd de son importance, elle n’en reste pas moins un moment convivial et folklorique. Les agriculteurs et leurs proches (qui ont le privilège de pouvoir observer la séance de plus près) montrent beaucoup d’enthousiasme à perpétuer cette tradition séculaire inscrite par l’UNESCO au Patrimoine Culturel Immatériel de l’Humanité.
Quelques conseils pour ceux qui voudraient assister au spectacle :
- Etre présent une bonne demi-heure avant les 12 coups de midi afin de trouver un bon emplacement.
- S’attendre à ce que ce soit rapide : étant donné que la majorité des litiges se règlent hors séance publique, celle-ci ne dure généralement pas plus de 10 minutes.
- Ne pas hésiter à poser des questions aux juges, après la séance, si l’on est curieux.