Avoir des rapports sexuels sans protection peut entrainer pour nos compatriotes masculins, outre le risque de maladies sexuellement transmissibles et autres mauvaises surprises, la naissance d’un enfant non désiré.
Quelles que soient les circonstances de la conception : Que le futur « papa » se soit fait « piéger » par des promesses fallacieuses de contraception ou qu’il s’agisse d’un accident, le résultat est le même : l’enfant a des droits vis-à-vis de son géniteur à Singapour et en France.
Pour l’intérêt intellectuel de la démonstration, supposons que la future mère soit singapourienne.
La notion d’enfant illégitime
Tout d’abord il faut savoir qu’un enfant né hors mariage à Singapour est considéré comme illégitime.
En effet, à l’inverse de la législation française qui a éliminé au cours de sa récente histoire toute référence à l’enfant né hors mariage comme illégitime, à Singapour le terme « illégitime » est celui qui qualifie l’enfant naturel.
Cette distinction assumée est l’expression du désir du gouvernement de privilégier les naissances au sein de couples mariés.
Cette qualification « illégitime », qui concerne tous les enfants nés de couples non mariés, ou de mères célibataires, ne vient pas sans conséquence :
Le statut de cet enfant est différent à plusieurs égards et la stigmatisation touche en premier lieu, la mère qui sera exclue de certains avantages financiers réservés aux parents mariés comme par exemple les Housing benefits, le baby bonus et le tax relief (destinés à aider les nouveaux parents singapouriens).
La discrimination successorale
Mais c’est probablement de droit de la succession à Singapour qui crée le plus de discriminations.
En effet, la priorité d'héritage va aux enfants légitimes survivants.
La loi sur les successions ab intestat définit l'"enfant/héritier" comme un enfant légitime et inclut tout enfant légalement adopté. Cela signifie que les enfants illégitimes n'ont pas le droit de recevoir une part de l'héritage de leurs parents biologiques, sauf s'il y a un testament.
Conformément à l'article 10 du « Legitimacy Act » (loi sur la légitimité), un enfant illégitime ne recevra une part de l'héritage de sa mère biologique à son décès que si la mère biologique n'a pas d'enfant légitime survivant, là encore en l’absence de testament.
Ceci pose d’ailleurs question pour les résidents français à Singapour dont certains des enfants sont nés hors mariage et qui n’ont pas fait de testaments. En vertu du règlement UE n°650/2012 sur les successions internationales, la loi de la résidence est applicable à la dévolution successorale.
Quelles sont les implications pour le père biologique d’un enfant né hors mariage :
A Singapour, le père biologique n’a aucune obligation de reconnaitre l’enfant. Et en vertu de l'article 10 de la loi de Registration of Births and Deaths Act, un enfant prend le nom de famille de sa mère biologique si le père ne reconnait pas l’enfant.
Comme nous l’avons vu plus haut, l’enfant n’est pas non plus son héritier, même si sa paternité est prouvée. S’il désire faire de l’enfant son héritier, il faudra qu’il rédige un testament.
Néanmoins, il a des devoirs vis-à-vis de l’enfant et notamment un devoir de contribution à l’entretien de l’enfant. La mère peut demander au père biologique une contribution financière pour élever l’enfant devant la Family Court et les parties n’ont pas besoin d’être représentées par un avocat (même si on ne peut que le conseiller).
Un test de paternité n’est pas obligatoire mais si le père refuse de le passer, le juge pourra en tirer les conséquences « logiques ».
Le père reconnu devra donc contribuer au prorata de son salaire aux besoins de l’enfant, dans la mesure où ceux-ci auront été estimés raisonnablement.
Dans le cas de contestation, il faut savoir que la mère de l’enfant et l’enfant lui-même possèdent également des droits en France si le père biologique est Français.
Les risques légaux vis-à-vis de la France
En France, la responsabilité du père biologique peut être recherchée devant les tribunaux notamment par le biais de l’action en recherche en paternité :
L’enfant est le titulaire de cette action que la mère peut néanmoins exercer en son nom durant la majorité de l’enfant. Cette action est ouverte jusqu’à ce que l’enfant ait atteint l’âge de 28 ans.
Si le tribunal fait droit à la demande, la filiation est établie de manière rétroactive à la date de la naissance de l'enfant.
Le tribunal peut statuer, dans le même temps sur :
- l'exercice de l'autorité parentale
- la contribution du père à l'entretien et à l'éducation de l'enfant,
- l'attribution du nom du père.
La légitimation a posteriori est néanmoins possible
Il est néanmoins possible de légitimer ultérieurement l’enfant dans le cas du mariage des parents biologiques.
Dans ce cas, la naissance est réenregistrée et fait l’objet de la délivrance d’un nouvel acte de naissance.
Il est également possible aussi de changer le nom de l’enfant après le mariage des parents biologiques sans passer par une procédure de légitimation.
À la lumière des lois sur l'héritage en vigueur, il est conseillé aux parents d'un enfant illégitime de rédiger un testament.