La National Gallery de Singapour présente à partir du 2 décembre l’exposition Singapore Stories : Pathways and Detours in Art qui viendra remplacer Siapa Nama Kamu ?, qui avait introduit l’art moderne et contemporain singapourien à un large public à son ouverture en 2015. 10 ans plus tard, la galerie offre une nouvelle exposition enrichissant ce récit et mettant en lumière les artistes et leur héritage.
Un voyage dans l’histoire des artistes
Rassemblant plus de 200 œuvres et artefacts répartis en quatre sections, l'exposition aborde des thèmes comme le colonialisme, l’urbanisation et la mondialisation. En jouant avec les supports et les expressions artistiques, elle juxtapose des récits familiers et les met en perspective, invitant le public à redécouvrir les œuvres et à raviver son imagination à travers les histoires qu’elles racontent.
La National Gallery présente la première partie de sa nouvelle exposition permanente dans la galerie DBS Singapore rénovée. Une seconde partie, prévue pour juillet 2025, occupera l’ensemble du deuxième étage de l’aile City Hall, au moment des célébrations du 60ème anniversaire de Singapour. Cette exposition mêle des œuvres de la Collection nationale à des prêts de collections privées et institutionnelles. Les visiteurs y découvriront comment les artistes ont réagi aux évolutions sociétales, retraçant l’identité artistique de Singapour du 19ème siècle aux années 1960.
Singapore Stories retrace des moments clés, comme la colonisation et l’indépendance de Singapour, célébrant des artistes tels que Chen Wen Hsi, Georgette Chen, Cheong Soo Pieng, Dora Gordine, entre autres. En allant au-delà de la simple présentation d’œuvres, l’exposition s’intéresse aux thèmes des classes sociales et du travail, intégrant le cinéma et la littérature. Elle met également en avant des artistes moins connus et permet de redécouvrir les figures emblématiques, comme Chen Wen Hsi à travers ses œuvres, dont Gibbons (la plus grande peinture en taille de l’exposition) et Oasis.
Quatre sections thématiques
Market of the Tropics dépeint Singapour au 19ème siècle tel un centre d’échanges culturels et commerciaux, à travers des peintures, affiches et photographies illustrant son potentiel économique sous l’ère coloniale.
Les représentations visuelles de Singapour mettent en lumière sa diversité culturelle et son image de paisible village de pêcheurs comme potentielle destination touristique. Les visiteurs peuvent voir des affiches rares qui font la promotion des chemins de fer reliant la région, qui servaient aux exportations commerciales de l’ananas, symbole du paradis tropical. Ces œuvres d’art, idylliques et exotiques à souhait, présentent donc Singapour comme une destination prisée pour le tourisme et le commerce. The Esplanade from Scandal Point (1851) de John Turnbull Thomson en fait également le portrait.
Community and Self explore l’expérimentation stylistique des artistes locaux pour raconter des récits diversifiés, incluant des œuvres comme Portrait of a Woman de Low Kway Song et des extraits de films de P. Ramlee, mêlant humour et réflexion sur les transformations sociales. Elle invite les visiteurs à explorer les façons dont les diverses communautés de Singapour se sont historiquement représentées et à réfléchir à la manière dont ces expressions créatives continuent de façonner l’identité et l’expression culturelle aujourd’hui.
Une caractéristique unique de cette section est la mise en lumière des images en mouvement, mettant en valeur l’industrie cinématographique locale dynamique de Singapour où les réalisateurs, les scénographes et graphistes, les acteurs et les musiciens peuvent se réunir pour imaginer des histoires sur leurs communautés.
Imagining Nation s’intéresse aux œuvres explorant le sentiment d’appartenance et d’identité dans les années 1950-1960. L’art est devenu un moyen de négocier les identités personnelles et collectives tout en reflétant la vie quotidienne de ceux qui ont élu domicile à Singapour. Un exemple est l’emblématique Self-Portrait (1946) de Georgette Chen, qui incarne son parcours personnel et la détermination avec laquelle elle a contribué de manière significative à l’art à Singapour.
Cette section abrite la galerie Liu Kang avec notamment les oeuvres Working at the Brick Factory (1954) de Liu Kang et Workers in a Canteen (1974) de Chua Mia Tee, toutes deux représentant des scènes de travail et exprimant différentes visions de la manière dont l’art peut engager une réflexion sur la vie quotidienne. De même, Storyteller (1962) de Wee Kong Chai capture la vocation perdue de la narration en explorant le rôle populaire des histoires dans la création de récits partagés.
Seeking Connections examine enfin l’impact des voyages sur les styles des artistes, qui reflète les connexions régionales et l’innovation artistique. Dans les années 1960, des collectifs informels se sont formés et ont défendu le voyage comme un moyen essentiel de découverte et de réflexion, le considérant comme un outil essentiel pour la création artistique.
Pièce maîtresse de Singapore Stories, le monumental Gibbons (1977) de Chen Wen Hsi, mesurant cinq mètres de long, constitue un exemple frappant de cette influence. L’esprit d’expérimentation artistique de Chen Wen Hsi est emblématique de l’élan de nombreux artistes singapouriens des années 1950 à 1970. Son style évolutif est encore plus mis en évidence dans Oasis (1972), une exploration ludique de formes abstraites et de couleurs vives.
Singapore Stories visite les récits de Singapour à travers l’art. Cette première partie ouvre la voie à de nouvelles explorations artistiques prévues dans la suite de l’exposition en juillet 2025, mettant en lumière dès à présent les chemins variés empruntés par les artistes dans leurs parcours créatifs.
Une visite guidée (gratuite, mais à réserver) de l’exposition par la curatrice Teo Hui Min est organisée le 7 décembre à 11h.