Mars 1968 en Pologne : politique, censure, manifestations et antisémitisme !

Par Christophe Turowski | Publié le 18/03/2022 à 14:00 | Mis à jour le 18/03/2022 à 17:56
Photo : Réunion "spontanée" de travailleurs. Source : dzieje.pl/IPN - Instytut Pamięci Narodowej
Réunion spontanée de travailleurs. Source dzieje.pl IPN

Le mois de mars restera pour toujours associé aux « Evénements du mois de mars ».

Je vous explique !

Le mois de mars a eu deux visages en 1968 en Pologne : l’un politique et culturel ; l’autre politique et antisémite.

 

Le mois de mars,  politique et culturel

Le premier événement c’est l’interdiction par la censure de la représentation au Théâtre National du drame « Dziady » ("Les Aïeux") d’Adam Mickiewicz, le grand poète romantique polonais. Parce que le partie communiste a jugé le présentation trop antirusse.

Cette décision a provoqué des manifestations étudiantes à l’Université de Varsovie pour défendre la liberté d’expression, brutalement dispersées par la milice et suivies par de nombreuses arrestations.

Parmi les détenus se trouvait Adam Michnik, qui depuis est devenu une icône de l’opposition en Pologne, redacteur en chef de Gazeta Wyborcza.

Les événements de Varsovie ont eu immédiatement un écho dans toute la Pologne. Des manifs, Des grèves étudiantes ont eu lieu à Cracovie, à Łódź, à Gdansk et ailleurs.

J’étais étudiant de l’Université de Łódź et nous avons protesté pendant plus d’une semaine.

Même si c’était la première manifestation de la jeune génération en Pologne communiste - premier signe que l’endoctrinement communiste n’avait pas obtenu les résultats escomptés, les effets n’ont pas été à la hauteur, car les postulats de l’intelligentsia polonaise n'avaient pas atteint la classe ouvrière.

Elle protestera deux ans plus tard contre la pauvreté qui l’étouffe au quotidien.

 

Le deuxième visage, beaucoup plus sombre de mars 1968

La bataille entre deux groupes rivaux au sein du parti communiste a provoqué une campagne antisémite sans précédents depuis la deuxième guerre mondiale. Les nationalistes au sain de parti voulaient se renforcer contre les membre d’origine juif.

A cause de cette campagne sans pitié des milliers de gens d’origine juive ont été virés, limogés de leurs postes, forcés de quitter la Pologne. La tragédie nous a tous touchés car du jour au lendemain nous avons perdu des amis, des compagnons, des filles aimées.

Il y a eu beaucoup de livres, beaucoup de articles et pièces de théâtre sur ce sujet, mais dans notre cœur, dans nos pensées reste toujours une amertume et une sorte de honte.

Même si j’étais manifestant à l’Université.

50 ans après, avec une poignée d’entre nous, nous avons dévoilé une plaque commémorative à la bibliothèque universitaire de Łódź. Cela n’efface pas le passé, mais c’est au moins ça !

 

plaque commémorative à la bibliothèque universitaire de Łódź
Plaque commémorative à la bibliothèque universitaire de Łódź

 

 

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Christophe Turowski

Christophe Turowski

J'ai été grand reporter pour Le Figaro, pour la radio et la télévision polonaises à Paris, Bruxelles, présentateur de talk-show sur TVP et rédacteur en chef adjoint à TV Biznes. Ancien diplomate pour la République de Pologne en Belgique et au Luxembourg.
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ROGER ZDZISLAW KNADE lun 21/03/2022 - 07:14

et pendant ce temps à Nanterre les trotskistes, "des étudiants aux allégeances mélangées, anonymes pour la plupart, et souvent juifs". Au moment du 22 mars 1968, circulait cette blague à Nanterre :“On pourrait parler yiddish au bureau politique de la JCR.” Et puis la chute : “Ah non, c’est vrai : Bensaïd ne pourrait pas suivre !” Daniel Bensaïd, né à Toulouse en 1946, était issu d’une famille séfarade, comme une poignée d'autres militants trotskistes à Nanterre.

https://www.franceculture.fr/sociologie/22-mars-1968-qui-sont-ils-au-dela-des-cliches

puis mai 68 avec J-P Sartre : "La violence est la seule chose qui reste, quel que soit le régime,.." https://www.franceinter.fr/culture/mai-68-jean-paul-sartre-un-intellectuel-en-soutien-des-salaries-et-des-etudiants

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