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Elsa Lagache ou la traversée des États-Unis à vélo

Elsa Lagache traverse les États-Unis à véloElsa Lagache traverse les États-Unis à vélo
Écrit par Rachel Brunet
Publié le 23 juillet 2021, mis à jour le 27 octobre 2021

Elsa Lagache, une Française installée à New York, ne s’arrête plus de pédaler. Pendant la pandémie, elle a rallié New York à San Francisco avant de rejoindre San Diego, au sud de la Californie. Un périple de plus de 5,000 kilomètres parcourus en 3 mois. Cette aventure lui a donné des ailes, mais aussi des cuisses. Depuis, plus rien ne l’arrête ! Compétition ou traversée à travers les États, la jeune femme pédale et soutient des causes.

 

États-Unis à vélo

Elsa Lagache à Chicago

 

La traversée des États-Unis à vélo

« Vélo locked, je suis là » textait Elsa Lagache, le jour de notre entretien. Le rendez-vous était donné à côté de Central Park où elle s’entraîne tôt le matin, entre 6 heures et 8 heures. Ce jour-là, elle ne s’était pourtant pas entraînée mais qu’importe, à 8 heures, elle était là, en tenue de cycliste, son casque à la main, son éternel sourire et sa bonne humeur communicative. Svelte et athlétique. Une silhouette qu’elle doit à ses interminables heures de vélo ainsi qu’à son lifestyle. Elle est végane.

Installées autour d’un matcha latte — au lait végétal — et d’un avocado toast, elle raconte avec une joie intense ses 5,000 kilomètres à vélo. Pourtant, le périple n’a pas été simple. « D’habitude, les cyclistes font la route en sens inverse, à cause du vent » nous explique Elsa Lagache qui a pédalé 5,000 kilomètres avec le vent en face. Parfois dans la neige. Quelques fois dans la nuit. Montagne, désert, bord de mer, villes et prairies, elle a fait un voyage sportif mais aussi culturel. Un voyage débuté en septembre 2020 et qui s’est achevé pour Thanksgiving. Une traversée des États-Unis alors que la campagne présidentielle battait son plein et que l’Amérique attendait de connaître son nouveau président. Un automne 2020 très particulier pendant lequel Elsa Lagache a traversé les États. Démocrates et Républicains. Mais pour la trentenaire, c’était avant tout un voyage placé sous le signe de la générosité.

« Mon bail s’arrêtait le 30 août 2020, c’était la pandémie et j’étais en télétravail, j’ai décidé de me lancer dans ce périple presque sur un coup de tête ». Le plan est simple : deux petites sacoches attachées à son vélo qu’elle ne remplit pourtant qu’aux trois-quarts d’effets de première nécessité. Le quart restant lui sert à placer la nourriture qu’elle achète au fil de ses arrêts. « J’ai été hébergée souvent gratuitement grâce au réseau Warm Shower, aussi cuisiner pour les gens qui m’accueillaient si généreusement était un moyen de les remercier. » Give back, comme on dit au pays de l’oncle Sam.

Loin de New York, où elle est installée depuis 2014, elle est accueillie, en pleine pandémie par des familles, des couples de personnes âgées, une femme pasteur ou encore une famille mormone. Ce qui la frappe : la générosité de ses hôtes. « Les gens me recevaient en plein Covid, toujours en respectant les consignes de sécurité. Mais j’ai tout de même été accueillie par un couple de plus de 80 ans ou encore par un jeune couple avec un bébé » explique Elsa Lagache. Tous ont un point commun : ils appartiennent au réseau Warm Shower, une communauté de cyclotouristes et de ceux qui les soutiennent ; une plateforme placée sous le signe de l’hospitalité qui met en contact cyclistes et hôtes. Créée il y a plus de 10 ans dans le Colorado, Warm Shower est aujourd’hui une communauté de plus de 185 000 utilisateurs à travers le monde.

 

Etats-Unis à vélo

(c) Elsa Lagache

 

À la découverte des États-Unis

Chaque jour, Elsa travaille de l’aurore au début d’après-midi, puis elle enfourche son fidèle destrier et pédale environ 60 kilomètres quotidiennement. Davantage le week-end. Routes de campagne ou express, elle fait son bonhomme de chemin et s’engouffre dans l’Amérique profonde. Le plus long a été la traversée du Kansas et du Missouri. Des champs de maïs à perte de vue, sans un seul arbre pour s’abriter du vent. Son voyage lui permet de comprendre l’Amérique. À chaque étape, chaque État, elle trouve une clé et ouvre une porte. « Tous ces champs de maïs ne servent qu’à nourrir le bétail » explique Elsa. Des champs gigantesques parsemés de panneaux « Danger, ne pas entrer ». Dans une famille qui l’accueille, on lui sert du maïs en boîte, « on m’a expliqué que le maïs produit dans l’état ne pouvait pas nourrir les humains ». Bourré de pesticides, il est la nourriture des exploitations bovines américaines, bovins qui finissent dans l’assiette des consommateurs…

En pleine actualité politique, la question démocrate ou républicaine la suit au fil de son périple parsemé de panneaux « Trump » ou « Biden » au gré des kilomètres.

De ce voyage entrepris à l’automne, elle garde dans son coeur les couleurs de l’Amérique. Le rouge et le bleu de la campagne électorale mais aussi le rouge rosé des couchers de soleil qui rythment ses journées. Dans le Colorado et en Californie, il y a aussi le blanc, celui des fumées, les wildfires « un vrai désastre écologique » souligne Elsa Lagache. Un autre effet palpable du changement climatique.

Elle découvre aussi une urbanisation différente. Son premier objectif était d’arriver à Denver. Ce qu’elle fait en 44 jours, soit deux jours d’avance sur le planning qu’elle avait imaginé. « Quand tu arrives dans n’importe quelle grande ville, tu traverses une zone industrielle, mais pas à Denver » relate Elsa. C’est un sentier qu’elle emprunte pour son arrivée dans la capitale du Colorado. Un émerveillement pour la jeune femme. Un triomphe personnel, aussi. Denver reste une des étapes clé et magique de son périple.

San Diego est le point final de trois mois à travers les États-Unis. « J’avais prévu de m’arrêter à San Francisco mais comme je suis arrivée beaucoup plus tôt que prévu, je suis allée jusqu’à San Diego par la côte » se souvient-elle. Là encore, un enchantement. Spectaculaire.

En plus de 5,000 kilomètres, elle a aussi appris le langage routier des klaxons. Elle sourit en détaillant le klaxon du chauffeur énervé, de celui qui prévient d’un danger ou du chauffeur amusé. « Un jour après 10 miles sur les graviers, je n’en pouvais plus, aussi j’ai décidé de continuer sur la voie express qui était de l’autre côté d’un barbelé. J’ai jeté mon vélo sous les fils et je suis passée, un truck est passé au même moment et m’a klaxonnée », c’était un coup de klaxon amusé.

 

États-Unis à vélo

Wildfire (c) Elsa Lagache

 

Pédaler pour des causes

Au fil de son périple, Elsa Lagache a levé de l’argent au profit de trois associations, Keep a child alive, Oceanic Global et World bicycle relief ; et elle continue de pédaler, notamment pour la dernière cause, il lui reste une centaine de dollars à lever pour atteindre son objectif. Elle s’est aussi engagée à son retour à New York. « Je suis dans une équipe de cyclistes femme et transgenre » explique celle qui s’est désormais lancée dans la compétition. « Le cyclisme reste un sport très masculin et ça m’a paru important de rejoindre cette équipe de femmes ». Fin juin, elle a concouru pour sa première compétition à Randall Island au nord de Manhattan. Classée 9e, elle s’était donnée pour objectif de ne pas tomber, d’être dans le peloton de tête et surtout, de terminer la course. Pari tenu ! Désormais, ses journées son rythmées par des entraînements à Central Park, entourée de son groupe de cyclistes femmes et transgenres.

 

Elsa Lagache est une femme engagée, au service de causes. Des causes féministes, animales, des causes de diversité et d’égalité mais aussi environnementales. Elle pédale pour un monde meilleur, son éternel sourire aux lèvres et son casque vissé sur la tête. Elsa est le genre de femme à arriver à un gala ou à un mariage à vélo ; elle se remarque et se démarque par sa différence. Elle contribue à faire avancer le monde.

 

 

États-Unis à vélo

« Pas facile tous les jours », un selfie d’Elsa Lagache

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