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Cent femmes pour nous inspirer à changer

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Diane Von Furstenberg ©️Gayle Kabaker
Écrit par JC Agid
Publié le 15 septembre 2020, mis à jour le 17 septembre 2020

Le 6 septembre dernier, Elisabeth Badinter dénonçait dans les colonnes du Journal du Dimanche en France un néo-féminisme radical, un après #metoo dangereux, faisant de toutes les femmes des victimes et de tous les hommes des agresseurs présumés. Au même moment, les éditions Assouline et la fondation Américaine Vital Voices publiaient dans un ouvrage essentiel une suite de 100 portraits et textes de femmes. Toutes utilisent leur pouvoir pour permettre aux autres de découvrir le leur.

Elles s’appellent Ruth Bader Ginsburg, Melinda Gates, Ellen Johnson Sirleaf, Nancy Pelosi, Michelle Bachelet, Geena Davis et Jacinda Ardern. Certaines dirigent des pays, d’autres des fondations ou contribuent à façonner la jurisprudence américaine. Elles s’appellent aussi Panmela Castro, Xiye Bastida, Yin Myo Su, Hindou Oumarou Ibrahim, Andeisha Farid, Amani Ballour et Tarana Burke. Moins connues des médias occidentaux, elles aussi dirigent des fondations, des entreprises, s’investissent en politique ou transforment le paysage médical de leur communauté.

Elles sont 100 dans ce livre co-signé par Alyse Nelson, la Présidente et co-fondatrice—avec Hillary Rodham Clinton, Melanne Verveer et Madeleine Albright—de Vital Voices. Cette fondation basée à Washington D.C. aide les femmes dans 182 pays à s’émanciper professionnellement, à être visibles et entendues. Cent portraits peints par une des plus grandes illustratrices américaines, connue notamment pour ses couvertures du New Yorker, Gayle Kabaker. Cent femmes à partager leurs visions, leurs réussites, leurs ambitions, à porter haut leurs voix. Elles pourraient être mille, cent mille, des millions, en fait ces 100 dirigeantes, activistes, avocates, politiciennes, entrepreneuses, diplomates, financières, biologistes, journalistes, sportives et artistes sont de facto les ambassadrices de la moitié de la population mondiale.

 

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Couverture de Vital Voices publié aux éditions Assouline - Amanda Gorman ©️Gayle Kabaker

 

« On fait le tour du monde avec ces femmes de tous les âges, de toutes les cultures, de toutes les nationalités, » explique Martine Assouline. « On se rend compte dans ce livre », poursuit-elle, « que les femmes qui ont déjà réussi à gagner de l’indépendance, de la liberté, de la force, du respect évidemment—et ce n’est pas fini—acceptent de se mettre au diapason de celles moins connues qui ont rattrapé l’histoire grâce à leurs ‘sisters’, occidentales pour la plupart. C’est un des points les plus touchants de ce livre ». 

Assouline publie Vital Voices : 100 Women Using Their Power to Empower un siècle après l’entrée en vigueur du 19e amendement de la constitution des États-Unis autorisant le droit de vote des femmes et 25 ans après la conférence historique de Beijing. Le 5 Septembre 1995, défiant une opposition féroce à Washington, Hillary R. Clinton décidait de prendre la parole en Chine et de marquer l’histoire d’une phrase : ‘Les droits de l'homme sont les droits de la femme et les droits de la femme sont les droits de l'homme, une fois pour toutes’.

« Même à cette époque où les réseaux sociaux n’existaient pas, ce message s’est propagé comme un feu de paille », raconte Alyse Nelson qui, à 21 ans, s’était frayée un chemin pour assister à la conférence de Beijing et rejoindra ensuite la Première dame des États-Unis en tant que stagiaire à la Maison Blanche. Hillary Clinton « a donné une nouvelle dimension à l’activisme sur l’égalité des sexes », ajoute Alyse Nelson. « Observer Clinton utiliser sa voix, sa plateforme et son pouvoir pour permettre à d’autres femmes de prendre conscience de leurs possibilités a déterminé mes propres actions ».

 

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Hillary Clinton ©️ Gayle Kabaker

 

Alyse Nelson nous permet avec ce livre de découvrir l’inspiration des femmes d’aujourd’hui, d’entendre les paroles des dirigeantes de l’époque de la conférence de Beijing et de nous projeter vers l’avenir avec les ambitions des plus jeunes. Ces 100 femmes s’expriment simplement, à la première personne du singulier, avec leur vocabulaire, leur détermination et leur message.

« Les mots nous permettent de donner forme au pouvoir et au changement que nous espérons voir dans nos communautés, » explique la poétesse de 22 ans Amanda Gorman, auteur de la préface du livre de Vital Voices. « Je remarque que les femmes dirigeantes utilisent davantage une rhétorique de l’espoir, de la compassion et de l’équité », ajoute-t-elle. « Ce type de langage permet non seulement de penser différemment au rôle des femmes (…) mais aussi à la façon de diriger en général, sans avoir peur de l’empathie et de la générosité. »

Les portraits de Gayle Kabaker apportent à ces textes une dimension intemporelle, fruit de l’interprétation et du regard créatif d’une femme sur toutes les autres. Cent photographies de ces dirigeantes, chacune avec une luminosité et une mise en scène différente, auraient sans doute atténué cet imaginaire. « Avec un peu de chance, on peut découvrir un aspect essentiel qu’une photo ne verra pas », explique Gayle Kabaker. « Mon objectif était de montrer la beauté de chacune de ces femmes ».

Si l’idée originelle d’Alyse Nelson était de faire appel à cent peintres différents, elle a tout de suite suggéré à Gayle Kabaker de prendre en charge l’ensemble du projet. « Je lui ai dit ‘Oui’ avant qu’elle ne puisse terminer sa phrase », se souvient l’artiste. Martine Assouline apprécie cette série de « beaux dessins, intelligents, avec un travail très détaillé dans le choix des couleurs—un talent fou et tout le monde au même niveau, ce que la photographie n’aurait pas permis ».

Les illustrations peuvent être des mises en perspective. Diane Von Furstenberg se métamorphose ainsi en super-héros. « C’était l’idée d’Alyse, » explique Gayle Kabaker. « Je voulais d’abord la peindre dans sa robe iconique, mais en faisant mes recherches, j’ai découvert son engagement d’activiste et sa passion pour les forêts ». Le résultat est une ‘SuperDVF’ au milieu des arbres, « une déesse de la nature ».

D’autres sont des portraits plus simples, toujours heureux, en gros plan. Christine Lagarde est présentée de profil. « Son nez ! » s’exclame Gayle Kabaker, « son profil est si dramatique, et je ne voulais pas peindre les femmes telles qu’elles ont été déjà présentées des millions de fois ».

 

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Christine Lagarde ©️ Gayle Kabaker

 

Il s’agit parfois d’extraire un trait de personnalité. C’est le cas du portrait de la fondatrice américaine de Spanx, Sara Blakely. « J’avais vu cette photo sur son instagram. Sara est tellement drôle, elle n’a pas peur de l’autodérision et parle de l’importance de rire de soi. Je voulais exprimer cet état d’esprit ».

D’autres dessins mettent la femme en situation. Au Mexique, Saskia Niño de Rivera a créé la fondation Reinserta pour venir en aide aux centaines d’enfants emprisonnés pour être nés derrière les barreaux, des enfants aux rêves de jeux, de paysages et de liberté, prêts à en découdre avec la vie. Gayle Kabaker les a peints masqués comme les lutteurs mexicains—les Lucha Libre—avec en premier plan Saskia Niño de Rivera, assurée, déterminée.

 

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Saskia Nino de Rivera ©️ Gayle Kabaker

 

Le principal défi de Gayle Kabaker était de ne pas connaître la plupart des femmes de ce livre. Même lorsqu’elle les avait rencontrées, il lui a fallu de la patience et de multiples lectures pour capturer et recréer leurs individualités. Les premières tentatives du dessin de l’activiste Nigérienne Hafsat Abiola, Présidente de Women in Africa—et sans doute une des femmes Africaines les plus influentes aujourd’hui—sont des échecs. Alyse Nelson appelle la peintre et lui dit ne pas reconnaître son amie dans l’illustration. « J’avais pourtant rencontré Hafsat au gala de Vital Voices à Washington DC et même pris une photo d’elle, mais elle est un caméléon et n’est jamais la même d’une photo à l’autre ».

« Ce sont des portraits positifs, agréables, ils ne sont pas mièvres, mais forts et accueillants », résume Martine Assouline. « Les femmes n’apparaissent jamais comme des victimes ». Au contraire, ajoute l’éditrice, ces femmes se montrent, partagent leurs idées et leurs convictions. Elles expriment « une force tranquille, une autorité naturelle, sans prétention, sans vouloir faire de démonstration ». Les 100 femmes de Vital Voices semblent ainsi partager un message, ‘Nous sommes là, nous sommes présentes et nous allons avancer’.

 

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Hafsat Abiola ©️ Gayle Kabaker

 

« En avant la féminité », conclut Martine Assouline, « mais n’ayez pas peur de cette féminité ».

Un livre à lire, à offrir et mettre dans toutes les mains, de celles, éloquentes, qui font également entendre leurs voix—ou le souhaiteraient bien sûr, mais les mains aussi de ceux qui prêtent à la parole des femmes la même oreille qu’à celle des hommes, et de ceux, hommes et femmes, encore dubitatifs. Ils seront peut-être surpris par ces portraits du monde entier, cet égrenage d’images et de mots sur le chemin d’une société un peu plus curieuse, plus juste et simplement plus intelligente.

 

 

Disponible dans toutes les boutiques et revendeurs Assouline

Disponible en ligne chez Assouline 

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Pour lire cet article en anglais

 

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Sara Blakely ©️Gayle Kabaker