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Avec la crise sanitaire, les New-Yorkais se déplacent davantage à vélo

Vélo new yorkVélo new york
Elsa Lagache, une Française de New York ©️Daye_Photography
Écrit par Rachel Brunet
Publié le 16 septembre 2020, mis à jour le 15 décembre 2023

La ville de New York n’a pas été pensée aux différentes étapes de sa construction dans une logique de mobilité durable. Toutefois, aujourd’hui, le Department Of Transportation (DOT), Citi Bike  ou même  des associations privées, mettent au service des New-Yorkais, différentes réglementations, ou initiatives, afin d’encourager et de sécuriser les déplacements à vélo. Autre constat : avec la pandémie, de plus en plus de New-Yorkais choisissent de se déplacer à vélo.

Le Covid a incité les New-Yorkais à pédaler

Que ce soit pour se déplacer, ou pour s’aérer l’esprit, la pratique du vélo a augmenté ces derniers mois, largement marqués par la pandémie. Sur l’ensemble du territoire américain, la vente de vélos a explosé dès le début de la crise sanitaire. Plus 121 % pour les vélos classiques et plus 85 % pour les vélos électriques, selon NPD Group.

Tyrone William, le co-fondateur de Dah Shop dans le Lower East Side, estime avoir triplé son chiffre d’affaires durant le confinement. Selon Dirk Sorenson, analyste à NPD « les consommateurs ont cherché durant la période de confinement, des activités accessibles aux enfants qui permettaient de mieux tolérer ce challenge. Et le vélo était une bonne solution ». Ce qui pourrait aussi expliquer qu’en mars, la vente de vélos pour enfants a augmenté de 56 %.

Elsa Lagache, une Française installée à New York depuis 6 ans constate « depuis le début de la pandémie, il y a de plus en plus de monde sur les pistes cyclables ». Cycliste et activiste, la jeune femme s’est toujours déplacée à vélo. « À Paris, à Strasbourg, je me déplaçais à vélo. Mais c’est à New York que j’ai eu mon premier vélo. Le vélo est mon premier moyen de transport ». Depuis que la crise sanitaire a imposé le télétravail à une large partie des cadres, une idée a germé dans la tête de la jeune femme : traverser les États-Unis depuis New York jusqu’à San Francisco à vélo. « Avec le télétravail, je peux travailler de n’importe où. Je pense que la période se prête bien à cette aventure, je ne pourrai plus le faire après. » Partie le 3 septembre, « avec deux petites sacoches accrochées au vélo » la cycliste se donne 4 mois pour achever son périple, alternant télétravail et cyclisme plus ou mois intensif.

Pour d’autres, le vélo s’est présenté comme une alternative rassurante aux transports en commun. Delphine Daumont, une autre Française de New York explique « je me suis mise au vélo avec le confinement ». Et de rajouter « j’habite à Washington Square, c’est finalement plus simple de me déplacer à vélo qu’en transport en commun. Au départ, je pensais que faire du vélo à New York était dangereux. Mais je me suis rendu compte que c’est très sécurisé. Pour l’heure, c’est très agréable, je verrai ce que ça donne durant l’hiver. » conclut-elle avec le sourire.

Si ces derniers mois ont été marqués par la crise sanitaire, ils ont aussi été funestement marqués par l’assassinat de George Floyd, et toutes les manifestations qui ont suivi. Et certaines d’entre elles se sont faites à vélo ! À l’initiative de Cycle For Justice, ils ont été jusqu’à 10,000 cyclistes à manifester à New York au nom de la justice et en soutien du mouvement Black Lives Matter. « L’idée est de se rassembler pour plus de justice et le vélo est au centre de ce rassemblement » explique Elsa Lagache qui a pris part à ces manifestations, où, de moyen de locomotion, le vélo est devenu un outil de manifestation pacifique.

 

 

860 000 new-yorkais utilisent leurs vélos

D’après le Department Of Transportation, environ 860,000 New-Yorkais utilisent régulièrement leurs vélos, soit 140,000 personnes de plus qu’il y a 5 ans. De même, on estime à 510,000 le nombre de déplacements à vélo, effectués chaque jour, dans New York. Ce chiffre a tout simplement triplé en 15 ans. Le DOE précisait dans sa newsletter de juillet qu’ « en cette période compliquée, le nombre de déplacements quotidiens avait largement augmenté, les New-Yorkais cherchant un moyen de locomotion sûr ».

24 % des adultes New Yorkais font au moins une balade à vélo dans l’année. Et il faut dire que la ville de New York fait des efforts en matière d’aménagement, même si cela paraît toujours insuffisant. Sur les cinq dernières années, le DOT a créé, ou amélioré, 1200 miles de voies cyclables dans les cinq boroughs, dont 65 miles de voies complètement sécurisées et protégées des voitures. Et le Covid-19 n’a pas empêché la poursuite de cette amélioration urbaine. « Pendant la crise sanitaire, je me suis rendu compte que de nouvelles pistes cyclables continuaient d’être développées » explique Elsa Lagache « et certaines sont plus vertes, comme celle qui va de Houston/Broadway jusqu’à Battery Park ».

Parmi les mesures mises en place afin de favoriser la cyclabilité dans New York, la réglementation «  Bikes In Buildings » est un véritable atout pour les salariés. L’idée est de permettre à tout employé qui le souhaite, de pouvoir entreposer son vélo à l’intérieur même de son bureau. Aucune contrainte n’est imposée à l’employeur, ni au propriétaire de l’immeuble. Cette réglementation encourageant le déplacement à vélo depuis l’habitat jusqu’au lieu de travail a toutefois des limites sur le périmètre New-Yorkais. La seule île de Manhattan, fait 21,6 kilomètres de long sur 4,7 kilomètres de large et les variations climatiques rendent, à certaines périodes de l’année, les déplacements à vélo très difficiles, voire impossibles. Même si certains téméraires continuent de pédaler qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, à l’instar d’Elsa Lagache.

Par ailleurs, la réglementation «  Zoning Resolution In New York City » prohibant formellement les douches dans les bureaux, afin de décourager les logements illégaux dans les immeubles commerciaux, est aussi un frein à l’utilisation de son vélo comme moyen de transport, vers son lieu de travail.

Néanmoins, en 2019, 15 % des actifs se sont rendus à leur travail à vélo alors qu’ils n’étaient que 10 %, il y a 10 ans.

 

Vélo à new york

©️ Elsa Lagache

Du côté des mesures privées

La plupart des immeubles d’habitation ne possèdent pas de local à vélos, ce qui est un autre frein à l’achat, et donc à l’utilisation du vélo. Toutefois, les nouvelles constructions sous réglementation LEED « Leadership in Energy and Environmental Design » prônant le respect de l’environnement, sont obligées de posséder un garage à vélos. Par ailleurs, dans certains quartiers en pleine gentrification, la rénovation et la transformation de certains vieux immeubles sont aussi l’occasion pour les propriétaires, de créer un local à vélos.  

Et pour ceux qui ne possèdent pas de vélo, Citi Bike vient à leur rescousse ! Bien qu’ayant connu des débuts difficiles à New York, aujourd’hui, Citi Bike semble avoir trouvé son chemin. Avec une flotte de plus de 15,000 vélos partagés, répartis dans 1000 stations et 60 quartiers de New York, emprunter un Citi Bike est une chose assez facile pour l’utilisateur et encourageante pour la mobilité douce. Bien qu’elle puisse vite devenir onéreuse. Appréciée des touristes, mais aussi des New-Yorkais, l’utilisation du Citi Bike reste, dans l’ensemble, une pratique occasionnelle. Les cyclistes avertis préférant posséder leur propre vélo.

Qu’il soit partagé ou pas, le vélo est aussi le symbole d’une communauté. « Transportation Alternatives » est un mouvement de 30,000 New-Yorkais prônant le déplacement alternatif. Et c’est bel et bien ce mouvement d’activistes qui a permis la construction des plus de 1200 miles de pistes cyclables dans la ville, mais aussi des plus de 70  « plazas » dans la ville. Rendre la ville aux piétons et aux cyclistes est l’engagement porté depuis 50 ans par le mouvement. 

Malgré les efforts faits par la ville de New York, se déplacer à vélo au quotidien, reste marginal. Et ce, même si, dans la très démocrate New York, la question environnementale est prise au sérieux. N’en déplaise à certain(s) ! Outre les longues distances ou les températures difficiles, la question de la dangerosité est aussi un frein. Si le nombre d’accidents mortels a largement diminué depuis ces 15 dernières années, les accidents persistent dans une ville où les voitures règnent toujours en maître.

 

Vélo à New York

La française Elsa Lagache