Malgré des décennies d’engagement en faveur des droits des migrants, New York City voit sa politique de ville sanctuaire vaciller sous la pression de l’Administration Trump et de son propre maire.


Le choix d’être une ville sanctuaire
Pendant plus de trois décennies, et sous des municipalités de tendances diverses, New York City a fait le choix d’être une ville sanctuaire. Ce choix particulier garantit tous les résidents, quelque soit leur statut, d’avoir accès à tous les services publics, incluant les soins médicaux, la scolarité des enfants et la protection de la police contre les crimes et agressions dont ils pourraient être l’objet, tout cela sans être sous la menace d’une déportation. Les villes sanctuaires coopèrent a minima avec les autorités fédérales en charge de l’immigration, et se gardent de partager avec elles les données qu’elles possèdent sur les immigrés illégaux.
Les Démocrates ont depuis longtemps promu des lois permettant de créer un environnement accueillant et sécurisé pour les immigrants sans papiers (undocumented), quand dans le même temps les Républicains n’ont cessé de dire que ces politiques nourrissaient le crime et augmentaient l’insécurité.
Pour New York, le sujet n’est pas neutre puisque la ville héberge plus de 400 000 immigrés sans papier.
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En 2014, le maire de New York, Bill de Blasio, étend largement le champ de cette politique en signant des lois qui empêchent les redoutés agents d’ICE (Immigration Customs Enforcement) d’accéder aux données de l’Administration pénitentiaire (Department of Correction) de la ville sur les détenus de Rikers Island, sauf en cas de crimes graves et violents. Ces lois furent maintenues durant le premier mandat de Donald Trump, et même enrichies de compléments demandant qu’ICE produise des mandats judiciaires pour entrer dans les locaux publics, tels que les écoles et les hébergements pour sans-abri, et interdisent aux agents ICE de procéder à des arrestations dans l’ensemble des tribunaux municipaux et de l’État de New York.

L’effet Trump fragilise les politiques actuelles de sanctuarisation
Au cours des deux dernières années, une série de crimes graves commis par des migrants illégaux a conduit le nouveau maire de la ville Eric Adams, à assouplir la politique de sanctuarisation de New York City, dans un sens moins favorable aux sans-papier ayant commis des crimes. En 2023, Eric Adams déclare que l’actuelle crise des migrants, concrétisée par l’arrivée de centaines de milliers d’illégaux sur le territoire de la ville, allait “détruire New York City”. La récente réélection de Donald Trump a renforcé la volonté d’Eric Adams, de restreindre l’actuelle politique de sanctuarisation. Ce dernier, après avoir rencontré Tom Homan, le conseiller anti-immigration de Donald Trump, en novembre 2024 a déclaré que la ville de New York allait être très coopérative dans l’accompagnement de la nouvelle politique d’immigration du Président des États-Unis.
Il n’en fallait pas plus pour que la majorité municipale se divise, jusqu’à ce que la porte-parole du Conseil municipal, Adrienne Adams, et la responsable du Comité sur l’immigration déclare que les inflexions du maire sur la politique migratoire, étaient: “hautement irresponsables, déconcertantes et dangereuses pour les new-yorkais et les travailleurs”.
La politique de sanctuarisation ne concerne pas que New York City, mais plus largement l’État de New-York, dont la capitale Albany, ainsi qu’une vingtaine d’autres villes, dont Rochester. Par ailleurs, l’État voisin du New Jersey est lui même un État sanctuaire, ce qui vaut d’ailleurs aux villes de Newark, Jersey City, Hoboken et Paterson, d’être actuellement poursuivies en justice par l’État fédéral pour entraves à sa politique migratoire.
L’affaire du péage urbain de New York City
Un autre conflit entre Donald Trump et la ville de New York, moins important mais très significatif de l’état des relations, concerne le nouveau péage urbain instauré récemment par la ville au sud de la soixantième rue, pour décongestionner le centre de Manhattan du trafic automobile.

Opposé d’emblée à l’instauration de ce péage, avant même sa réélection, Donald Trump, natif de New York, n’a de cesse d’utiliser dorénavant son pouvoir exécutif pour s’immiscer dans la gestion de New York City et presser la gouverneure de l’État de New-York, Kathy Hochul, et le maire Eric Adams, de renoncer à ce péage.
Le bras de fer, qui s’est essentiellement déroulé entre les autorités fédérales, en charge des transports et des autoroutes et la Metropolitan Transportation Authority (MTA), vient récemment de se traduire par une victoire judiciaire de MTA, qui a obtenu d’un juge fédéral, une décision de justice bloquant temporairement les efforts déployés par l’Administration Trump de mettre fin au péage urbain de Manhattan. La gouverneure Hochul s’est félicitée de cette décision, qu’elle considère comme une victoire contre la “volonté de vengeance” de l’Administration Trump envers New York.
Les gagnants et les perdants du nouveau péage urbain de Manhattan
Le conflit entre l’Administration Trump et New-York fait des victimes
Selon des estimations indépendantes, les sanctions économiques et financières prises par l’Administration Trump contre l’État de New-York, depuis la réélection de Donald Trump, ont coûté à l’État plus de 7 milliards de dollars, supprimé 280 000 emplois et impacté chaque famille new-yorkaise d’un surcoût moyen de 6400 dollars.
La gouverneure Kathy Hochul a pourfendu les 100 premiers jours de présidence, les décrivant comme en proie au chaos, à l’incertitude, assortis de coupes budgétaires sur des programmes vitaux, dont les new-yorkais n’avaient pas fini de payer le prix.
Bref, New York est entré en résistance contre Donald Trump, dont la relation amour-haine envers New York, ne date pas d’hier. Déjà en 2019, lorsqu’il décida de devenir résident en Floride, il avait déclaré: “J’ai toujours été traité salement par les dirigeants politiques de l’État et de la ville de New York”.
C’est en tous cas moins le cas des new-yorkais eux-mêmes, qui semblent moins amènes que leurs dirigeants locaux, si on en juge par les résultats des dernières présidentielles, puisque le vote pour Donald Trump a progressé en pourcentage dans les cinq boroughs de la ville, plus que n’importe où ailleurs dans le pays.
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