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MUSEE HAUT MUSEE BAS – De l’absurde de l’art à l’art de l’absurde

Les 12,13,14 et 15 juin, la Hong Kong Theater Association cloture sa saison théatrale 2012-2013 dans la bonne humeur en offrant au public son interprétation de Musée Haut, Musée bas de Jean-Michel Ribes.

Lepetitjournal.com : la thématique de la pièce utilise un levier comique avec un humour de situation, des dialogues, des tac-au-tac, mêlant le burlesque à des situations quotidiennes enlevées : est-ce un registre dans lequel la troupe se sent plus à l'aise ?
Emilie Guillot : La lecture et même l'étude du texte furent plus simples que la mise en place. Nous étions très pris par ces dérisions, ce dialogue tant ?démonté' que ?perché'. Nous embrassions l'idée que chacun des personnages représenterait une certaine folie, une présence des plus originales. Arrivés sur scène, il nous a fallu plus de temps pour nous laisser vraiment porter par ces dialogues risibles, cette absurdité ? du moins celle que nous souhaitions représenter. Il n'y a rien de plus difficile que de faire rire les gens. Rien de plus compliqué que de jouer un être dont l'essence est perdu entre moquerie, aliénation et égoïsme. Il nous a fallu ensuite trouver une relation entre tous ces personnages, leurs essences, leurs objectifs, leurs vies actuelles. Un travail sans relâche de la part de nos acteurs. Une très belle composition. Et puis, un brin de folie ne fait jamais de mal à personne, bien au contraire!

Comment s'est fait le choix de la pièce ?
Toujours le même problème en fin d'année pour un groupe de plus de 20 acteurs : que pouvons nous jouer ? Nous avions l'envie de vivre tous ensemble une aventure décousue, amusante et originale. C'est le premier texte qui m'est venu en tête. Ce que nous aimons beaucoup chez Jean-Michel Ribes c'est comment il s'amuse d'une farandole de caractères s'entrecroisant dans un musée imaginaire, encyclopédique, en bref, le musée de tous les musées. Ce qui nous convenait parfaitement. De plus J-M Ribes ne se contente pas simplement de se moquer gentiment du tourisme culturel de masse, sinon la pièce ne serait qu'une simple satire, succession de tableaux mordants, au risque du mépris. Il est bien davantage dès que l'écriture de J-M Ribes s'enfonce dans l'absurde, et c'est l'art contemporain qui lui en donne l'occasion.
Tenez, un passage bien intriguant, et même surprenant, une verve à la Ionesco dans la scène du "family art" où l'artiste "?uvre" en direct en tuant sa mère. Et l'on quitte définitivement l'ironie dans le beau passage où, sous la houlette d'un mystérieux artiste, ce sont les spectateurs eux-mêmes qui constituent l'?uvre exposée.
L'art est donc représenté comme un objet que l'on cherche à s'approprier, à comprendre, à apprécier parce que l'on sait qu'on est censé l'apprécier, sans réellement y parvenir, chargés d'à priori. Cela donne lieu à de nombreuses scènes comiques et à des dialogues frôlant l'absurde. Finalement, ce ne sont pas les tableaux qu'exposent ce musée, mais des visiteurs dans un musée. C'est ce qui nous a le plus intrigués je pense dans cette pièce. Il y a là une mise en abîme : le spectateur observe d'autres spectateurs, qui observent de l'art. Un art invisible lorsqu'on lit le livre, renforçant encore cet aspect de l'?uvre, puisqu'il n'y a plus de véritable support aux conversations décousues des personnages. On se moque ainsi d'attitudes que l'on a soi-même pu avoir dans des musées. Un texte riche et surprenant ! Evidemment, cette abracadabrante installation, artifice suprême du créateur, reflète une vérité de l'art conceptuel d'aujourd'hui. Un texte que notre imagination seule peut manipuler. Un travail exaltant pour un metteur en scène et sa troupe.

La distribution est très dense, une vraie fourmilière, on se souvient bien sûr des acteurs principaux dans le film de 2008, Michel Blanc Gérard Jugnot, Pierre Arditi et Isabelle Carré et Victoria Abril, mais comment va donc s'organiser la répartition des rôles ? Comment s'est fait le casting sur cette pièce plus "peuplée" que les dernières jouées par la compagnie ?
Cette pièce est décousue entre les employés du musées, personnages récurrents dont la personnalité ne laisse pas indifférent ; et il y a les visiteurs, plus naïfs les uns que les autres, dont les frustrations artistiques et les personnalités restaient à inventer.
Dans cette pièce, il n'y a pas de petits rôles. Du moins c'est ce que j'enseigne à mes élèves. Chaque phrase a sa raison, son impact. Chacune des subtilités écrites mérite une attention tout aussi aiguë que celle pour les personnages plus présents.
Nous travaillons dessus depuis plusieurs mois maintenant. Je connais mes élèves depuis un an maintenant. C'est une des parties les plus simples pour moi. Je connais leur talents, leurs disponibilités, leurs forces et faiblesses. Tout se détermine une fois les différentes lectures entreprises en classe. Nous discutons - bien sur - une fois la distribution faite. Il y a parfois certains acteurs qui souhaiteraient diversifier leurs rôles, ou en avoir plus, ou moins. Il y a également à prendre en compte, l'ordre de chacune des saynètes, leurs costumes, et les autres moments pour lesquels leur présence est importante. Un enchainement qui doit se faire dans la plus grande des facilités. Ce n'est pas de tout repos le théâtre ! Je pense que les acteurs - et même notre équipe de production - transpirent autant en coulisse que sur scène pour ce spectacle-ci ! Un travail compliqué qui nous a pris plusieurs semaines, je suis heureuse du résultat.

La directrice de la troupe y aura-t-elle un rôle également ?
Pour des pièces à plus petit effectif, oui. Pour un travail de fin d'année, avec pour la plupart des acteurs qui n'ont jamais fait de scène, il y a une présence et un soutien que je dois leur donner. Sur scène, cela me serait trop difficile. Je veux leur offrir le meilleur de moi-même. Je veux être là pour eux quoi qu'il advienne. De plus, le plaisir est plus fort et prenant lorsque je suis spectatrice de leur réussite.

Propos recueillis par Stefany Collin et Sophie Mabru (www.lepetitjournal.com/hong-kong) mardi 11 juin 2013

Musée Haut, Musée Bas au HK Repertory theater ? Black Box
12, 13, 14 et 15 juin 2013
A 20h tous les soirs + une matinée à 14h45 samedi 15
Sheung Wan Civic Center, 8/F
345 Queen's road Central, Sheung Wan
Prix des tickets :
HKD240 plein tarif
HKD200 pour les membres HKTA et UFE
HKD180 tarifs réduits
Réservations Urbtix
Internet enquiries : www.urbtix.hk
Ticketing enquiries : 2734 9009
Crédit cards telephone hotline : 2111 5999
Site : http://www.hkta.org.hk/

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