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Loi de finances 2022 : Les nouveautés en matière de licenciement en Italie

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@Thom on Unsplash
Écrit par Lablaw
Publié le 24 janvier 2022, mis à jour le 24 janvier 2022

La loi de finances 2022 (publiée au Journal Officiel du 31 décembre 2021), a introduit de nombreuses nouveautés en matière de droit du travail et de la prévoyance en Italie, et notamment en cas de licenciement pour cessation d’activité de l’entreprise avec l’instauration d’une stricte procédure préalable de consultation des syndicats.


Licenciement : Champ d’application de la procédure de consultation

La procédure en question doit être appliquée par toutes les entreprises qui, l'année précédente, comptaient en moyenne plus de 50 salariés (y compris cadres et apprentis), et qui envisagent de procéder à la fermeture de l'entreprise (entièrement ou en partie) située en Italie, avec cessation définitive de l'activité correspondante et par conséquent, le licenciement de plus de 50 employés.

 

Obligations pour les entreprises

Notamment, les nouvelles obligations pour les entreprises identifiées par la loi précitée prévoient :

I.    au moins 90 jours avant le début de la procédure de licenciement collectif, l'envoi d'une communication écrite à toutes les parties concernées (syndicats, institutions locales et nationales) en déclarant l'intention de fermer l'entreprise (et l’éventuelle délocalisation de l'activité) et en indiquant sans délai les raisons économiques, financières, techniques ou organisationnelles à l’origine, ainsi que les conséquences sur l'emploi qui en résulteraient ;
II.    dans les 60 jours suivant la communication précitée, l'élaboration et la présentation d’un Plan  - d'une durée maximale de 12 mois - qui envisage et décrit les initiatives à adopter pour limiter l'impact sur les travailleurs, et notamment :
a.    les actions prévues pour sauvegarder les niveaux d'emploi et les interventions pour la gestion non traumatisante des éventuels licenciements (tels que le recours aux amortisseurs sociaux, la relocalisation auprès d’un autre employeur et les mesures d'incitation au départ) ;
b.    les actions visant le réemploi ou l'auto-emploi des travailleurs (telles que la formation et la reconversion professionnelle, aussi en recourant à des fonds interprofessionnels) ;
c.    les perspectives de transfert de propriété de l'entreprise en vue de la poursuite de l'activité, y compris par la vente de l'entreprise (ou d’un partie de celle-ci) aux salariés ou à des coopératives constituées par eux ;
d.    tout projet de reconversion du site de production, même à des fins socio-culturelles en faveur du territoire concerné ;
e.    les délais et les modalités de mise en œuvre des actions envisagées.

 

Les issues possibles de la procédure d’information et de consultation

Après la présentation du Plan, la loi prévoit la mise en place d'une phase d’examen conjoint, d'une durée maximale de 30 jours, au cours de laquelle l'employeur, les syndicats et les institutions discutent de ses contenus.

A son issue, deux scénarios opposés peuvent se produire :
I.    la conclusion d'un accord syndical sur la mise en œuvre des mesures et actions décrites dans le Plan, sur la base duquel l'employeur s'engage à les mettre en œuvre, dans le respect des délais et des modalités convenus. Si, à la fin de la période identifiée pour la mise en œuvre du Plan, il un surnombre de personnel subsiste, l'employeur pourra procéder au licenciement collectif avec la procédure ordinaire visée à la loi 223/1991, sans appliquer une augmentation des cotisations à charge de l'entreprise pour les licenciements collectifs (actuellement égal à un maximum de 3.285 € pour chaque travailleur licencié, en cas d'accord) ;
II.    en revanche, si aucun accord n'est atteint avec les syndicats, l'entreprise - après les 30 jours mentionnés ci-dessus - peut entamer la procédure de licenciement collectif. Cependant, ayant déjà achevé la phase de confrontation/négociation avec les syndicats, elle est expressément exemptée de l'obligation d’entreprendre la première phase de la procédure prévue par la loi 223/1991 (qui prévoit une confrontation syndicale d'une durée maximale de 45 jours). Elle peut par conséquent, se limiter au déroulement de la phase de médiation administrative devant le ministère du Travail pour une durée maximale de 30 jours, réduisant ainsi les délais ordinaires fixés par la loi pour les licenciements collectifs.

Les sanctions

En cas de violation de la procédure décrite ci-dessus, un rigoureux régime de sanction est prévu.
En premier lieu, pour ce qui concerne les relations de travail, les licenciements communiqués avant l'achèvement de la procédure examinée ici, sont considérés comme nuls.
Par ailleurs, du point de vue des sanctions administratives, en cas de défaut de présentation du Plan (ou en l'absence des éléments obligatoires demandés), l'employeur est tenu de verser une cotisation de licenciement égale au double de celle prévue par la loi n. 223/1991.
Cette sanction est également appliquée si l'entreprise ne respecte pas les engagements pris, les délais et les modalités prévus pour la mise en œuvre du Plan.
La vérification formelle de ces manquements, ou de l'existence ou non des éléments requis, est effectuée par un cabinet de crise des entreprises du ministère du Développement économique.
Enfin, dans le cas où, malgré la présentation correcte du Plan, les parties ne parviennent pas à un accord syndical à l'issue de la phase de discussion (et l'ouverture de la procédure de licenciement collectif est déclenchée), l'entreprise est tenue de payer une amende égale à la valeur de la cotisation de licenciement, majorée de 50 %.

 

Une enfreinte au principe de liberté d’entreprise

L'intervention du législateur qui a introduit la procédure décrite ci-dessus, s'inscrit dans un cadre beaucoup plus large de conflits relatifs à la fermeture de sites de production pour cessation d’activité - décidée par d'importantes multinationales, disposant d'usines implantées sur le sol italien -, qui vu les impacts significatifs sur l'emploi, ont eu un écho politique et médiatique considérable.
Il est clair que l'intention du législateur est de limiter le phénomène de délocalisation (c'est-à-dire la fermeture d'activités en Italie pour les transférer vers d'autres pays à moindre coût de main-d'œuvre) et de réduire les risques pour l’emploi et la production sur le territoire national.
Cependant, l'introduction de nouvelles procédures et obligations pour les entreprises (en plus de celles déjà prévues par la loi 223/1991 et par les conventions collectives) et la prévision de lourdes  sanctions et de la nullité des licenciements en cas de violation, constituent une forte limitation au principe de liberté d'entreprise garanti par la Constitution italienne. La nouvelle obligation pourrait engendrer un effet contraire à celui espéré (c'est-à-dire la protection de l’emploi), en décourageant tant les entreprises nationales qu’internationales à s'établir ou à investir en Italie.

 

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