

Au XIIIe siècle, la dissidence cathare avait trouvé refuge dans le Sud-Ouest de la France. Avec ses murailles, ses forteresses et ses édifices religieux, le patrimoine de la région témoigne de ce passé mouvementé

Les fortifications de l'époque des Cathares ont façonné le paysage de Montségur (photo Michelin)
Tout commence dans le sud, près de Toulouse, à Albi, chef-lieu du Tarn. La dissidence cathare y connaît son apogée. Les "parfaits"ou "bonshommes"mènent une existence austère loin des fastes de l'Eglise, seule susceptible de les éloigner du Malin. Le Monde spirituel est le fait d'un Dieu Bon. Le monde matériel et visible est possédé par le Mal...
Les évêques cathares affirment leur puissance à Albi, Toulouse, Carcassonne et Agen. L'église ne peut tolérer un mouvement, qui, tout en sapant son autorité, recrute dans le milieu des élites, celles de la naissance (petite chevalerie), du savoir (juristes) et de la richesse (marchands).
En 1204, le pape Innocent III demande au comte de Toulouse Raymond VI de cesser de protéger les hérétiques. En vain. Le meurtre du légat du pape déclenche la première croisade. Le sanguinaire Simon de Montfort détruit Béziers, met à sac Mazamet, ferraille à Muret, s'empare de Lavaur, où 400 hérétiques sont brûlés et 80 chevaliers pendus pour avoir renié leur serment d'allégeance. Le comté de Toulouse tombe. Les territoires conquis reviennent au roi de France lors du traité de Paris (1229). La dissidence albigeoise s'achève dans les flammes et l'odeur de chair brûlée à Montségur, en 1244. Les 207 parfaits réfugiés sur le pog (le pic) ariégeois se jètent volontairement dans un brasier. Deux seulement s'enfuiront à la faveur de la nuit, un gros sac de toile sous le bras. C'est la naissance d'un mythe : celui du trésor cathare.
Une enceinte fortifiée pour protéger Albi
L'épopée cathare se lit encore dans les murs et la pierre, d'Albi aux Pyrénées. Symbole indissociable de la croisade contre les Albigeois : la Cathédrale Sainte-Cécile, véritable paquebot de la foi (100 m de long, 30 m de large, et 78 mètres de haut). Au 13è.s, devenus seigneurs de la ville, les évêques dressent une impressionnante citadelle, associant Sainte Cécile, témoignage de leur victoire sur l'hérésie, au Palais de la Berbie. Les murailles de sept mètres d'épaisseur protégeaient moins la ville des ennemis extérieurs que des ennemis intérieurs ? les évêques n'étaient guère aimés en pays cathare. L'enceinte fortifiée permettra à Albi de traverser sans encombres trois périodes troublées : la croisade contre les Albigeois, la guerre de cent ans et les guerres de religion.
A quelques kilomètres d'Albi, Cordes sur Ciel, sentinelle gothique, grimpe à l'assaut des cieux. Cette bastide (place forte) a été érigée par le comte de Toulouse Raymond VII en 1222 après les destructions sauvages de Simon de Montfort. Cordes contrôlait la voie de passage vers le Quercy et le Rouergue. L'exemption d'impôts et de péage avait attiré les habitants. La ville, très commerçante, a fait fortune grâce à son artisanat (forges, céramiques, tissage). Les parfaits étaient réputés pour être aussi tisserands. Ainsi pouvaient-ils visiter leurs ouailles, au gré de leurs voyages.
Une vue imprenable depuis Roquefixade
C'est à Montségur, perché sur son pog à 1300 m, que prend fin la dissidence. L'assassinat d'inquisiteurs par une troupe venue de Montségur, provoque le siège. Une garnison de deux cent hommes tient tête aux dix mille soldats du roi, pendant dix mois. Seule la roublardise basque dénichera les insurgés de leur forteresse naturelle. Une nuit, une escouade de montagnards escalade le roc et installe un trébuchet monté par pièces détachées, avec lequel les murailles sont criblées de boulets. La garnison obtient grâce mais les Cathares, hommes, femmes et enfants, périssent dans les flammes. Aucun n'abjurera.
Ultime étape de nos pérégrinations hérétiques : Roquefixade, qui communiquait avec Montségur par des feux. Depuis le village, la vue sur l'Ariège et le massif des Trois Seigneurs est à couper le souffle. Les escaliers du donjon résonnent encore du choc mat des armures ensanglantées et des cris des guerriers. Parvenu au sommet, l'éternel estivant aura pour unique confident le vent, conteur de légendes. Il retrouvera peut-être là-haut l'absolue sérénité, qu'il croyait perdue, douce comme une brise d'été.
Gautier BATTISTELLA. (www.lepetitjournal.com) mardi 9 septembre 2008
Pratique
Un sentier cathare en 12 étapes relie Foix à la Méditerranée, la montagne à la mer. C'est "le chemin des bonshommes"
Pour l'ascension de Montségur, prévoir une heure à pied A-R et de l'eau en été. Les explications et connaissance des guides sont édifiantes.
Autres châteaux cathares à visiter : Lordat, Puyvert, Peyrepertuse, Mirepoix, Quéribus
Renseignements Office de tourisme
Foix ? 05 61 65 12 12, www.ot-foix.fr
Cordes sur Ciel ? 05 63 56 00 52, www.cordes-sur-ciel.org


































