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Location: Tout ce que vous devez savoir de la nouvelle loi sur le logement en Espagne

Vue des toits de MadridVue des toits de Madrid
Rue Segovia, Madrid/Javier Sanchez cmadrid destino
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 20 avril 2023, mis à jour le 5 avril 2024

Contrôler les loyers, rendre les expulsions plus difficiles ou faire payer tous les frais d'agence au propriétaire, tels sont quelques-uns des points d'une loi qui ne se concentre que sur une partie du marché locatif: les locataires.

 

 

Habemus loi sur le logement. Il aura fallu attendre trois ans, après de virulents débats entre PSOE et Unidas Podemos, pour que finalement la version définitive voit le jour grâce aux indépendantistes basques Bildu et catalans ERC qui se sont d'ailleurs chargés d'apporter tous les détails sur la future loi qui devrait entrer en vigueur en mai prochain.

Contrôle des loyers

La première mesure sera l'intervention sur le marché et le contrôle réel des loyers, tels que prévus dans le premier texte. La réglementation prévoit désormais que les loyers dans les zones dites tendues seront réglementés et plafonnés, qu'ils appartiennent à de grands ou à de petits propriétaires, tant pour les contrats concernant des biens déjà sur le marché de la location que pour les nouveaux contrats.

 

Ces plafonds varieront en fonction du type de contrat et surtout du profil du propriétaire. Dans le cas des petits propriétaires possédant cinq logements dans une zone tendue, le plafond sera établi par indexation sur le loyer précédent en vigueur, c'est-à-dire que le plafond sera fixé par le contrat précédent, bien que l'accord prévoie également une série de bonifications pour ces propriétaires afin de les encourager à louer leurs logements.

L'IPC cesse d'être l'indice de référence

L'IPC est éliminé comme indice de référence pour l'actualisation annuelle du loyer des contrats. En 2023, la limite actuelle de 2% sera encore appliquée, tandis qu'en 2024 elle sera de 3% et par la suite un nouvel indice sera créé dans ces termes, plus stable et plus bas que l'évolution de l'IPC, qui plafonne les augmentations de loyer dues au renouvellement annuel.

Nouvelle dénition du "grand propriétaire"

Par ailleurs, la définition de grand propriétaire est abaissée de 10 à 5 propriétés. Ainsi, les propriétaires qui possèdent 5 biens ou plus dans une zone tendue seront considérés comme de grands bailleurs et les mesures et spécificités propres à ce type de propriétaires leur seront appliquées.

Extension des zones dites "tendues"

D'autre part, le nouveau texte étend la déclaration des zones tendues. Dans l'ancien texte, deux conditions devaient être remplies. Désormais il suffira que l'une des deux situations soit remplie pour que la zone soit déclarée tendue. Les conditions sont les suivantes : la charge moyenne du coût de l'hypothèque ou du loyer, plus les dépenses de base et les fournitures, doit dépasser 30% du revenu moyen du ménage, ou le prix d'achat ou de location du logement doit avoir augmenté d'au moins 3 points au-dessus de l'IPC au cours des cinq années précédant la déclaration d'une zone tendue.

Plus de 13 millions de ménages espagnols, soit 61% du total, se trouveront dans des zones considérées comme "tendues" en vertu de la nouvelle loi sur le logement, selon les données compilées par le cabinet de conseil en immobilier Atlas Real Estate Analytics. Les provinces espagnoles les plus peuplées concentrent le plus grand nombre de zones tendues, avec les îles Baléares en tête, suivies par d'autres comme Malaga, Alicante, Barcelone, Las Palmas et Madrid.

Les honoraires au frais du propriétaire

Les coûts et honoraires liés à la location d'un bien immobilier seront désormais entièrement supportés par le propriétaire. "Le service immobilier est fourni au propriétaire, et c'est donc lui qui devra assumer les dépenses que ce service génère", précise l'accord. Jusqu'à présent, cette obligation ne s'appliquait qu'aux grands propriétaires.

 

Pour éviter que les propriétaires ne cherchent des alternatives qui leur permettraient de compenser ces coûts, le texte interdit également d'augmenter les loyers par le biais de nouveaux frais, tels que payer des taxes communautaires, des taxes d'ordures ou tout autre coût non imputable au locataire.

 

"Cela permet d'éviter les augmentations de loyer frauduleuses sous ces prétextes", souligne le texte. Par ailleurs, les clauses qui permettaient de ne pas appliquer les mesures prévues par la loi, même en cas d'accord entre les parties, sont supprimées. "L'élimination de ces clauses ferme une autre voie possible de fraude et protège les locataires et ceux qui cherchent un nouveau contrat de location", indique l'accord.

Expulsions plus difficiles

En ce qui concerne les expulsions, elles sont interdites sans date et heure prédéterminées. L'accord prévoit également de nouvelles extensions des procédures d'expulsion, qui "retarderont les processus de plus de deux ans", et stipule l'accès obligatoire aux procédures de règlement extrajudiciaire pour les personnes vulnérables. En outre, de "nouveaux instruments" seront mis à la disposition des régions autonomes et des municipalités pour "prévenir les expulsions injustifiées".

Tollé général du secteur immobilier

Les réactions ne se sont pas faits attendre. Selon le portail immobilier fotocasa, ce nouveau pacte montre que "la loi ne se concentre que sur une partie du marché locatif : la protection des locataires et des groupes vulnérables. Pendant ce temps, l'autre axe fondamental qui compose le marché, les propriétaires, sont laissés sans sécurité juridique, une situation qui entrave la création d'un climat de confiance".

 

Comme le rappellent l'ensemble des experts du secteur immobilier, la principale raison pour laquelle les propriétaires louent des logements est la rentabilité du processus. Par conséquent, souligne fotocasa, "le plafonnement des prix de location pour les petits et les grands propriétaires les dissuade de maintenir et d'introduire de nouveaux logements sur le marché, à un moment où le parc de logements locatifs n'a jamais été aussi bas. C'est une mesure qui rendra l'accès au logement encore plus difficile et qui risque de rendre le parc locatif encore plus rare. En effet, grâce à l'expérience d'autres villes européennes voisines comme Berlin ou Paris, il a été démontré que ce type de mesure n'est pas efficace à long terme. Ou encore en Catalogne, où le plafonnement actuel des loyers a réduit l'offre de logements plus abordables".

 

De son côté, dans son analyse de la loi sur le logement, l'Organisation des Consommateurs et Usagers OCU affirme qu'avec "des mesures coercitives, le propriétaire est contraint de risquer son bien sans aucune garantie de recouvrement et sans l'assurance minimale de pouvoir le récupérer en bon état et dans un délai raisonnable en cas de problème. A des prix contrôlés qui les empêcheront de récupérer certains coûts en cas de retour de l'inflation. L'État doit aider les ménages en difficulté en leur fournissant des logements sociaux et des garanties de paiement, mais pas en imposant une charge injustifiée aux propriétaires individuels".