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Coupes budgétaires de l’AEFE: interrogations sur les effets en Espagne

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Écrit par Eva Sannino
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 29 novembre 2017

En juillet dernier, le nouveau gouvernement a annoncé la suppression de 33 millions d’euros de crédits sur le budget de l’Agence de l’Enseignement Français à l’Etranger (AEFE) 2017 en cours. Les établissements français du monde perdent 10% des crédits prévus en 2017. Lundi 27 une journée de mobilisation s'est tenue dans les établissements du monde entier, parallèlement à la réunion du Conseil d’Administration de l’agence. Point sur la situation.

 

En cause ? L’avertissement de la Cour des Comptes sur l'enveloppe votée au cours du quinquennat précédent pour la présente année. Des restrictions ont donc été prévues à tous les niveaux. L’enseignement à la française, véritable facteur de rayonnement culturel pour l’Hexagone, risque d’être bouleversé.

 

En Espagne, près de 21.600 élèves sont inscrits dans un établissement français pour l’année 2017/2018, dont plus de 30% d’origine française. Parmi les 22 centres d’enseignement dans le pays, l’AEFE gère directement les lycées de Madrid, Valence et Barcelone. Avant la réunion du Conseil d’Administration de l’agence du 27 novembre, les partenaires sociaux ont reçu l’information selon laquelle 80 postes d'expatriés et 100 postes de résidents seraient supprimés dès la rentrée 2018 sur l’ensemble du réseau dans le monde. François Ralle Andreoli, conseiller consulaire en Espagne, fait un bilan concret pour la situation espagnole : "Au Lycée français de Madrid, ce sont 3 millions d'euros, l'ensemble du fond de roulement, qui sont ponctionnés avec la suppression de la subvention pour la nouvelle maternelle, que devront assumer à elles seules les familles. A Valence, un poste et près de 300.000 euros en moins. A Malaga c'est un poste stratégique de directeur financier qu'il faudra recruter localement". Le Quai d’Orsay dans un point presse rappelle que "les suppressions de postes ne toucheront pas d'enseignants en cours de contrat et l'agence continuera ses efforts en direction des établissements dont le taux d'encadrement par des personnels titulaires demeure faible". Samantha Cazebonne, députée des Français d’Espagne, du Portugal, d’Andorre et de Monaco, a plutôt considéré dans une sa tribune du 28 novembre que la charge financière d’un certain nombre de postes reviendra aux établissements à gestion directe, tout en précisant qu’il ne manquera aucun enseignant devant les élèves à la rentrée prochaine. Cependant, la déclaration commune de Français du Monde-ADFE et de différents syndicats dispose : "Ces mesures, nous le savons notamment à travers les documents budgétaires et les remontées des Conseils d’établissement qui se sont tenus, affectent directement les budgets des établissements. Des projets sont d’ores et déjà abandonnés, des filières probablement mises en cause".

 

A nous de nous questionner sans tabou sur l’avenir de notre réseau et sur son fonctionnement


En début de semaine, la porte parole du ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères a justifié la décision du gouvernement par "l'effort de régulation budgétaire" nécessaire en 2017 et 2018. Cependant, elle a ajouté que "la participation financière des établissements à la vie du réseau reviendra à son niveau actuel en 2020". Ainsi, la loi de finances 2018 prévoit près de 2 millions d’euros supplémentaires, pour atteindre la somme totale de 498 millions, à destination de l’agence pour l’année suivante. Samantha Cazebonne résume sa position par "À nous de soutenir la nécessaire prise de conscience que l'enseignement français à l'étranger doit être défendu contre toute nouvelle tentation de coupes budgétaires mais aussi de nous questionner sans tabou sur l’avenir de notre réseau et sur son fonctionnement". La députée explique également son abstention au vote du budget de l’agence. Selon l’élue parlementaire, il s’agit du "budget de la continuité" qui risque de pérenniser les problématiques que rencontre actuellement l’AEFE. D’autres élus s’inquiètent vivement de la stratégie du Chef de l’Etat. Dans une lettre adressée aux acteurs gouvernementaux et de l’AEFE concernés, certains se sont groupés pour partager leurs préoccupations : des coûts croissants supportés par les familles, une baisse de la qualité pédagogique due à la suppression de postes de résidents. Parmi eux, Pierre-Olivier Bousquet, Conseiller Consulaire en Espagne. François Ralle Andreoli a rédigé une tribune avec deux autres confrères d’Amérique du Sud publiée sur le site de Mediapart. Ils affirment que la décision de l’Etat ne représente non pas "un simple plan d’économies mais une attaque en règle du réseau français à l’étranger". Le conseiller ajoute que la décision lui semble "aveugle dans sa forme car irrationnelle" et déclare "on a par exemple prélevé plus aux uns qu'aux autres et supprimé des postes au hasard des départs ou des non détachements d'agents". La déclaration de Français du Monde- ADFE et des syndicats affiche une position claire : "Nous demandons un retour des crédits annulés, et une révision radicale du plan d’économie imposé par l’Agence". 

 

Un service public que nous devons à nos compatriotes à l'étranger


Lundi, des professeurs de neuf des vingt-deux centres français en Espagne ont rejoint la protestation rapporte El Confidencial. A Madrid, où le Lycée français comptant quelque 4.000 élèves est l’un des plus importants du monde, la mobilisation du corps enseignant s’élevait à 80% d’après Le Parisien. L'association des parents d’élèves de cet établissement a d’ailleurs voté contre le budget 2018 au motif qu’il "reflète une augmentation des frais de scolarité de près de 4%" due aux coupes budgétaires. L’association propose, tout comme Samantha Cazebonne d’ailleurs, le déblocage des participations non acquittées à l'AEFE paralysées dans les pays d'origine pour des motifs réglementaires locaux, qui concernent une quinzaine d'établissements du réseau, et s'élève à 69 millions d'euros. Les représentants des parents du Lycée français de Barcelone ont eux appelé à rejoindre une pétition adressée au Président de la République en amont de l’assemblée générale de l’AEFE qui compte à ce jour près de 20.660 signatures, dont environ 6.000 en Espagne selon François Ralle Andreoli. La FAPEE, qui représente les parents d’élèves de quelques 170 établissements français du monde entier, rappelle que "l’AEFE (...) est déjà financée pour l’essentiel (80%) par les frais de scolarité à la charge des familles". "M. Jean-Yves Le Drian est attaché à la promotion de l'enseignement français à l'étranger. C'est un service public que nous devons à nos compatriotes à l'étranger. C'est aussi un instrument précieux du rayonnement de notre pays. Il a donc veillé à ce que les crédits de l'agence soient augmentés en 2018. Le président de la République a en outre annoncé qu'ils seraient maintenus en 2019", communique pour sa part le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères.
 

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