Quelques mois après la parution de son premier roman, La clé du ciel, inspiré des récits de ses patients, Frédéric Pignon se confie à notre journal. Kinésithérapeute et écrivain, il raconte comment ses expériences, de Paris à Madrid, nourrissent sa plume. Plongée dans l’univers d’un expat à la créativité débordante.
J’avais envie de soigner les gens.
Lorsqu’il entame sa première année de médecine, Frédéric Pignon sait clairement ce qu’il veut. Tandis que ses camarades aspirent à devenir généralistes ou chirurgiens, lui n’a qu’un objectif en tête : soigner les gens. Passionné par le domaine de la santé depuis son adolescence, il choisit finalement la kinésithérapie. "Cela me permet de voir mes patients plus souvent et de créer une vraie relation humaine avec eux", confie-t-il.
Voilà dix-neuf ans que Frédéric Pignon est kinésithérapeuthe. Chaque matin, en se rendant à son cabinet de kinésithérapie dans l’élégant 9e arrondissement de Paris, Frédéric Pignon était heureux d’apporter “quelque chose de concret” - un soulagement physique et une écoute attentive. En septembre dernier, l’homme de 43 ans a troqué l’agitation parisienne pour la douceur madrilène.
Accompagné de son compagnon, il s’est installé sous le soleil de la capitale espagnole, prêt pour un nouveau chapitre de sa vie. Pour le moment, il n’exerce pas sa profession en Espagne, mais c’est pour bientôt : “J’ai enfin reçu la validation de mon diplôme !”, annonce-t-il avec enthousiasme. Frédéric reprendra donc ce qui l’anime : accueillir des patients, écouter leurs histoires et soulager leurs maux. “En travaillant, je rencontre un tas de personnes différentes, issues de tous les domaines de la société, de toutes les religions et cultures”, révèle t-il. Mais une autre passion le dévore aussi : celle de l’écriture.
L’écriture comme processus thérapeutique et créatif
“Je me souviens d’une dame grabataire, avec qui la communication était impossible”, confie Frédéric Pignon. "J’aimais me demander ce qui se passait dans sa tête. À quoi pense-t-elle ? De quoi rêve-t-elle ? Qu’a-t-elle vécu ?" Ces questions, beaucoup se les posent. Lui a décidé d’y répondre à sa manière : "J’ai eu envie de raconter des histoires que d’autres ne peuvent pas dire.”
Chaque jour, ce sont des dizaines de patients qui se confient au rééducateur corporel. Et ils déposent parfois plus que leurs souffrances physiques. “En tant que soignant, tout au long de la journée, beaucoup de peine s'accumule dans mon esprit. J'avais besoin d'exprimer la souffrance que je reçois, qui m'impacte personnellement”. C’est à partir de ce moment, que l’écriture devient une échappatoire pour le quadragénaire. Alors, entre consultations, vie personnelle et repos, il parvient à trouver du temps pour se consacrer à l’un de ses passe-temps favoris : écrire. Le 30 avril dernier, Frédéric Pignon publie son premier roman, La clé du ciel.
La clé du ciel : un roman où la fantaisie éclaire les souvenirs
Après avoir réuni de nombreux témoignages dans un carnet, Frédéric Pignon créé le personnage principal de son roman, Yvonne Verdier. Cette femme de 89 ans - dont l’histoire est inspirée par l’une de ses patientes - prend vie sous sa plume. Chaque détail - la description de son appartement, sa passion pour les oiseaux, sa relation avec son mari - s’imbrique avec soin. L’objectif : tisser un fil conducteur entre les différents récits.
Mais c’est dans l’imaginaire que l’histoire prend tout son envol, et sa poésie. À l’image du lapin blanc dans Alice au Pays des Merveille, un canard devient le guide d’Yvonne, pour l’amener dans un rêve. Un grand rêve qui retrace les contours de sa vie : de ses pensées d’enfance aux odeurs sucrées des pâtisseries, jusqu’au jour de la libération de Paris. Au fil des pages, Frédéric Pignon aborde des sujets graves : la Seconde Guerre mondiale, la vieillesse et son cortège de défis – la solitude, les corps fatigués, les déplacements laborieux, et l’ombre de la mort… Mais sans jamais se départir d’une pincée de fantaisie : “L’idée était de créer un contraste pour que l'histoire soit plus facile à lire”, indique l’écrivain.
Jamais à court d’idées
Passionné et éclectique, Frédéric Pignon ne se limite pas à ses deux professions - soigner et écrire. Porté par sa curiosité, il croque la vie avec une imagination débordante. Et il a récemment ajouté une corde à son arc : la création de jeux de piste.
Ce passe-temps, où les joueurs suivent un itinéraire balisé pour trouver des indices menant progressivement à un objet inconnu, a débuté "de manière amicale", confie-t-il, lors d’apéros avec ses proches. Mais ce qui n’était qu’un simple loisir prend vite de l’ampleur : "Une personne intéressée, qui dispose d’un local, m’a demandé de créer un escape game".
Depuis son arrivée récente à Madrid, son talent pour concevoir ces aventures originales s’est rapidement fait connaître, notamment au sein de Madrid Accueil, une association pour les expatriés français.
"Le bureau de l’association m’a demandé de créer un jeu, et cela a beaucoup plu", précise-t-il. Car le kinésithérapeuthe ne compte pas se tourner les pouces. Sa nouvelle vie est l’occasion pour lui de découvrir la ville, et surtout, le monde des expatriés français, un univers dont il n’avait pas encore conscience. Avant de terminer l’entretien, il partage : “Le monde des expatriés à Madrid, et en particulier celui des femmes expatriées que je côtoie, m’inspire pour une nouvelle histoire”. Le prochain roman pour bientôt ?