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Bilan de 65 jours de confinement en Espagne

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Catherine Cordasco
Écrit par Perrine Laffon
Publié le 18 mai 2020, mis à jour le 19 mai 2020

Deux mois après le début de l'état d'alerte lié à la crise sanitaire du COVID-19, retour sur les moments forts d'une situation exceptionnelle en Espagne.

 

Le samedi 14 mars 2020, le gouvernement espagnol a décrété la situation "d'état d'alerte", afin de contrôler la pandémie de Coronavirus frappant le pays. 

Une mesure exceptionnelle prévue par la constitution en cas d'extrême nécessité. La population espagnole s'est serré les coudes, et a supporté tant bien que mal cette crise qui ne devait durer que quelques semaines. Personne n'imaginait à quel point la situation allait s'emballer


Plus de 27.600 morts et une gifle pour l'économie

Les premiers cas de Coronavirus en Espagne ont été détectés fin février, mettant l'ensemble des autorités médicales en alerte. Le confinement a été décrété pour toute la population le 14 mars, lorsque l'épidémie de Covid-19 comptabilisait près 5.000 personnes contaminées et 120 décès sur le territoire espagnol. 

Mais le virus s'était déjà propagé, invisible, à travers la population, et l'horrible processus était déjà en marche : dans les jours suivants, le nombre de malades a explosé, avec des milliers de nouveaux cas chaque jour. Les hôpitaux, les urgences et les services de réanimation débordés ont poussé le système de santé espagnol au bord du précipice

Le pic de l'épidémie a été atteint début avril, obligeant les autorités à prendre des mesures exceptionnelles de cessation de toute activité économique considérée comme non essentielle, et soumettant la population à un confinement très restrictif. Les sorties étaient autorisées uniquement pour le rapprovisionnement en produits alimentaires, pour les soins ou pour l'assistance aux malades ou aux personnes vulnérables. 

Des restrictions qui marqueront les habitants pour longtemps. Au mois de mai, constatant une baisse continue du nombre de cas, le pays se prépare à un retour à la normale lent et progressif, bien que la notion de "normalité" soit illusoire. En effet, l'ombre du Coronavirus devrait encore perdurer, au moins jusqu'au développement d'un vaccin, avec des règles d'hygiène et de distancement entre habitants. Deux mois après la déclaration de l'état d'alerte, l'Espagne comptabilise un total de 231.350 cas détectés et plus de 27.650 personnes décédées du virus.

Sur le plan économique, les conséquences vont être difficiles à plusieurs niveaux. Les foyers les plus vulnérables ont été les premiers touchés. Privés de revenus, sans chômage pour certains, ou dans l'attente d'une allocation qui n'arrive pas pour d'autres, les situations de précarité se sont multipliées. D'autre part, de nombreux entrepreneurs ont été pris à la gorge par les mesures de restrictions. L'avenir du tourisme, un secteur essentiel pour l'Espagne, est encore très incertain. La gifle du Coronavirus sur l'économie espagnole pèsera durant plusieurs mois. Le pays prévoit un minimum de deux années pour se remettre de cette crise.  


De beaux moments et quelques polémiques

De cette terrible pandémie, nous retiendrons surtout les moments de solidarité qui ont uni la population, même si des agissements moins agréables ont aussi été observés. 

Dès le début du confinement, une énorme vague de solidarité a déferlé sur le pays. Afin de protéger leurs ainés, les personnes les plus sensibles au virus, les habitants ont organisé des plateformes pour leur venir en aide, en allant faire leurs courses à leur place pour ne pas les exposer, et en s'assurant que les personnes âgées vivant à proximité ne manquaient de rien et étaient protégées. Si un aspect positif devait être attribué à cette crise, ce serait bien celui-ci. Certains ont découvert et ont appris à connaître leurs voisins lors du confinement, et sont venus en aide à des personnes inconnues, vivant pourtant à quelques mètres de chez eux. 

Car c'est aussi dans l'esprit de voisinage que les Espagnols se sont démarqués : fidèles à la réputation festive et joviale qui leur colle à la peau, ils ont rapidement su comment se redonner du baume au cœur. Depuis leurs balcons, nombreux sont ceux qui ont partagé leurs talents, à coup de concerts improvisés, de jeux et de scènes improbables, proposant tour à tour des moments de sensibilité et des moments d'humour. 

Les Espagnols ont aussi montré une très grande reconnaissance envers le personnel médical du pays. Comme en Italie, ils leur ont rendu hommage tous les soirs pendant deux mois en applaudissant aux fenêtres, considérant ces travailleurs comme les véritables héros de la crise, à l'opposé des politiques du pays. La plus grande polémique du confinement concerne d'ailleurs le manque de matériel et d'équipements pour les employés médicaux, qui ont livré une bataille sans merci avec peu de moyens. 

La solidarité des Espagnols est intervenue à tous les niveaux pour les aider : de petites mains ont cousu des masques et des blouses de protection, pendant que des entrepreneurs ont fabriqué des visières, des respirateurs, ou ont apporté des repas aux infirmiers. 

De toute situation, aussi critique soit elle, il faut savoir tirer des enseignements. Nombreux sont ceux qui espèrent que cette crise servira de leçon pour reconsidérer le statut des employés du secteur médical tout comme le budget alloué aux services de santé. Le gouvernement espagnol a été l'un des plus exigeants, et en parallèle l'un des plus fortement critiqué pour sa gestion de la crise sanitaire. Le manque de moyens médicaux, le confinement très restrictif, la répression policière et les querelles politiques en temps de crise sont autant d'éléments qui vont laisser une forte amertume dans le pays. 

… Et vous, que retiendrez-vous du confinement ?

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