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Vous pensiez connaître « Bojo » ? Tristan de Bourbon-Parme raconte

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Tristan de Bourbon-Parme
Écrit par Maud Finance
Publié le 20 mars 2021, mis à jour le 31 mars 2021

L’échevelé, « Bojo » pour les intimes, Boris l’opportuniste… Le Premier ministre britannique possède nombre de surnoms caricaturaux et souvent peu élogieux. Mais finalement, que savons-nous réellement de lui ?

Tristan de Bourbon-Parme est un journaliste indépendant résidant aujourd’hui à Londres. Auteur de la première biographie rédigée en français sur Boris Johnson, il a souhaité aller au-delà des idées reçues sur le Premier ministre en menant sa propre enquête. Il nous explique ici pourquoi il a tenu à dresser son portrait dans son livre « Boris Johnson, un européen contrarié ».

 

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs en quelques mots ? De quelle région êtes-vous originaire et où vivez-vous actuellement. Quel est, en bref, votre parcours professionnel ?

J’ai 46 ans, je suis né à Cannes, et j’ai grandi dans les Alpes-Maritimes jusqu’à l’âge de 11 ans, à la suite de quoi mes parents ont déménagé à Paris. J’ai vraiment découvert la vie à l’étranger grâce à une année d’Erasmus à Southampton dans le cadre de ma maîtrise d’histoire à la Sorbonne. Je suis ensuite parti pendant dix ans en tant que journaliste indépendant à Sydney, puis à Séoul et enfin Pékin. J’y ai toujours fait la même activité : correspondant pour plusieurs quotidiens, français, suisse et belge, couvrant la société, la politique, l’économie, la culture et le sport. Je fais de même à Londres. J’y suis arrivé à pied, enfin non en train, par la Chine fin 2009. Je vis à Islington depuis onze ans, après une année à Camden.

 

Pourquoi avoir voulu écrire sur Boris Johnson ?

J’ai toujours entendu parler de Boris Johnson en des termes extrêmement caricaturaux : « il est totalement opportuniste », « c’est un menteur congénital » et « c’est un bouffon ». Au-delà du fait qu’être opportuniste et bouffon me semble contradictoire, il me paraissait peu crédible que le parti conservateur ait choisi un bouffon comme son candidat à la mairie de Londres en 2008. Ensuite, instinctivement, lorsque tout le monde raconte la même chose sur quelqu’un ou sur quelque chose, cela me met la puce à l’oreille et je vais creuser pour savoir ce qu’il en est vraiment. Parfois, l’unanimité est justifiée ; là je me suis aperçu qu’elle était très éloignée de la réalité.

 

Avez-vous un élément ou une anecdote le concernant à souligner en particulier pour appuyer vos propos auprès de nos lecteurs ?

 

« J’ai découvert que son aspect clownesque n’est en fait qu’une façade »

Par exemple, j’ai découvert que son aspect clownesque n’est qu’une façade qu’il s’est créé à l’âge de 12-13 ans. Il était alors un élève extrêmement consciencieux, dur au travail. Il a d’ailleurs raconté que son plus grand plaisir le week-end était de prendre le métro pour aller au British Museum… Il entre d’ailleurs à Eton non pas grâce à l’entregent ou la fortune de ses parents, mais grâce à ses aptitudes scolaires, qui lui permettent de recevoir une bourse, attribuée chaque année à seulement 14 élèves. S’il endosse ce masque de clown, c’est pour rompre cette image d’intello mal dans sa peau et se faire accepter par les gens cool de l’école. Cela fonctionne tellement bien qu’il a gardé ce masque, aussi bien pendant ses études, qu’ensuite pendant sa carrière de journaliste et de politicien. Etre un clown, cela vous rend sympathique auprès du public, qui n’apprécie pas les technocrates hautains, et vos concurrents ou adversaires baissent leur garde car ils ne vous considèrent pas comme dangereux. C’est tout bénéfice.

 

Vous décrivez l’actuel Premier ministre comme le visage du Brexit. Iriez-vous jusqu’à affirmer que cela est ce que l’on retiendra principalement de lui ? 

Il restera dans les livres d’histoire comme le Premier ministre au pouvoir lors du Brexit. Et ses relations actuelles avec l’UE sont exécrables. Mais cela n’est pas nouveau. Tout le monde prétend qu’il a choisi le camp du Brexit par opportunisme. Mais, en regardant sa carrière dans son intégralité comme je l’ai fait pour le livre, en lisant les chroniques rédigées au fil des ans, je me suis aperçu que c’est là encore un mythe, probablement destiné à le faire passer pour quelqu’un d’inconséquent : il a toujours été très critique de l’UE. Son choix de faire campagne pour sortir de l’UE était donc assez logique. Sa sœur m’a même dit que l’idée de faire campagne pour rester dans l’UE lui avait donné envie de vomir. Après, ne soyons pas naïfs : il savait que faire campagne pour le Brexit bénéficierait à sa carrière, quel que soit le résultat du référendum.

Malgré cela, je ne pense pas qu’il restera uniquement dans l’histoire à cause du Brexit. Il a aujourd’hui un boulevard devant lui. S’il se débrouille bien et qu’il parvient à devenir le Tony Blair du parti conservateur, c’est-à-dire à capter le vote du centre, il sera au pouvoir au moins jusqu’à la fin de la décennie. Il aura donc les moyens de donner une impulsion nouvelle au pays. Difficile de savoir dès à présent ce qu’elle sera.

 

Quel est réellement votre objectif en publiant cette biographie ? Pourquoi jugez-vous cela important de dresser son portrait au-delà des idées reçues du grand public ?

 

« … Ils l’auront comme Premier ministre pendant la décennie à venir. D’où l’intérêt de comprendre qui il est. »

Les Européens qui prévoient de vivre ici ont intérêt à se préparer au fait qu’ils l’auront comme Premier ministre pendant la décennie à venir. D’où l’intérêt de comprendre qui il est. C’est un personnage moins caricatural et plus intéressant qu’il ne paraît. Ce qui ne veut pas forcément dire plus attrayant et plus agréable… Mais si on ne le prend pas au sérieux, et si on ne comprend pas qu’il déteste profondément l’UE mais qu’il aime l’Europe, sa culture, on ne peut pas comprendre la politique qu’il va mener au cours des années à venir.

 

« … mon livre n’est pas qu’une biographie de Boris Johnson : c’est une enquête. »

Surtout, mon livre n’est pas qu’une biographie de Boris Johnson : c’est une enquête, racontée de manière vivante et rythmée - c’est en tout cas le retour que j’ai eu des premiers lecteurs - sur les relations entre le Royaume-Uni et l’Europe depuis 1940. Le Brexit est quelque chose de complexe, surtout lorsque l’on vit dans des grandes villes qui ont fortement voté pour le Remain ou lorsque l’on a des contacts limités avec les Britanniques. J’ai donc voulu expliquer les racines du Brexit en discutant de la relation des prédécesseurs de Boris Johnson avec l’Europe, en interrogeant des diplomates, des politiciens, des conseillers. Que ce soit Winston Churchill, Margaret Thatcher, John Major, Tony Blair ou Gordon Brown.

Je me suis ainsi rendu compte que les Etats membres de l’UE, et en particulier la France et ses différents présidents, François Mitterrand, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande, ont joué un rôle dans le Brexit. Un rôle malgré eux, mais un rôle réel et parfois très important. Je compare souvent le Brexit à une brouille familiale. Lorsqu’un membre de la famille décide de couper les ponts, il est évidemment le premier responsable puisqu’il réalise le geste ultime. Mais penser que les autres n’ont pas leur part de responsabilité, c’est soit être naïf, soit être aveugle.

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