Les jours du statut de "non-dom", ce régime fiscal vieux de deux siècles, semblent comptés. L'annonce d'une possible suppression par le Parti travailliste pourrait entraîner une fuite massive des riches expatriés. Ce statut permettait à 74 000 résidents britanniques, dont la résidence principale est à l'étranger, de ne pas payer de taxes sur leurs revenus hors du Royaume-Uni pendant 15 ans. Cependant, cette échappatoire pourrait disparaître d’ici avril 2025, et la nouvelle ne passe pas inaperçue.
Adieu les "non-dom" ?
Pour comprendre l'ampleur de la situation, il est essentiel de revenir sur ce fameux statut de "non-dom". Créé en 1799, il exempte les résidents britanniques domiciliés à l’étranger de l'imposition sur les revenus générés hors du pays tant qu'ils ne sont pas rapatriés. Cela a représenté un atout considérable pour les ultra-riches étrangers installés à Londres. Cependant, les projets du Parti travailliste visent à réduire cette période à 4 ans et à instaurer de nouvelles règles sur l'impôt sur les successions après 10 ans de résidence. Une réforme qui pourrait rapporter 2,7 milliards de livres par an, selon les projections du Financial Times, et qui pourrait être réinvestie dans des secteurs en difficulté comme l'éducation et la santé.
"Il faut taxer suffisamment pour assurer les revenus tout en restant attractif."
Fuite des riches ou rééquilibrage social ?
Le Royaume-Uni a toujours attiré les grandes fortunes grâce à un cadre fiscal avantageux. Cependant, cette réforme pourrait inverser cette tendance. D'après les chiffres de Henley & Partners, près de 9 500 millionnaires quitteraient le pays cette année pour des destinations jugées plus attractives comme l'Italie, la Suisse ou le Portugal, qui offrent des fiscalités plus douces. Stuart Adam, économiste à l'Institut d'études fiscales de Londres, souligne le défi d'équilibrer la fiscalité pour éviter un exode tout en garantissant des revenus suffisants pour le pays : "Il faut taxer suffisamment pour assurer les revenus tout en restant attractif."
Des départs déjà entamés
Les annonces officielles n’ont pas encore eu lieu, mais certains expatriés n’ont pas attendu pour faire leurs valises. Selon une étude d’Oxford Economics, 98 % des non-doms interrogés envisageraient de quitter le Royaume-Uni si la réforme est mise en place. Parmi les raisons évoquées figurent les nouvelles taxes sur les revenus étrangers et l'impôt sur les successions, mais d'autres, comme la journaliste Sophia Money-Coutts, parlent d'une frustration plus générale face à un coût de la vie insupportable.
Le départ de ces riches expatriés pourrait également avoir des répercussions sur l’immobilier de luxe à Londres. Selon Knight Frank, le nombre de transactions pour des propriétés de plus de 10 millions de livres a chuté de 22 % sur un an. Les quartiers prisés comme Chelsea et Kensington pourraient voir leurs somptueuses résidences se vider au fil des mois. Cela dit, cette situation pourrait offrir des opportunités à d'autres investisseurs, notamment américains, qui pourraient profiter de ce "choc" pour réaliser de bonnes affaires.
Si les travaillistes maintiennent leur cap, le Royaume-Uni devra se préparer à un paysage financier et immobilier redessiné, où les riches expatriés ne seront plus aussi présents.
Vers un exode massif ?
Alors, assisterons-nous à une véritable hémorragie des millionnaires ? Rien n’est encore certain, mais les signaux sont préoccupants. Depuis le Brexit, le Royaume-Uni a déjà vu 16 500 millionnaires faire leurs adieux entre 2017 et 2023. Avec les nouvelles réformes en préparation, le phénomène pourrait s’amplifier, surtout si la fiscalité devient moins avantageuse pour cette élite. Les annonces attendues cet automne pourraient sceller le sort du régime "non-dom". Si les travaillistes maintiennent leur cap, le Royaume-Uni devra se préparer à un paysage financier et immobilier redessiné, où les riches expatriés ne seront plus aussi présents. Un vrai casse-tête pour le gouvernement à venir, et une page qui pourrait se tourner dans l’histoire des relations entre Londres et ses ultra-riches.