Un cliché bien répandu au Royaume-Uni est que les Français sont fainéants. Il est d’ailleurs souvent accompagné du terme “râleurs”. Mais cette vision est-elle correcte ? Explorons les clichés et démêlons le vrai du faux sur la réputation de paresse attribuée aux Français, par nos voisins britanniques.


Si vous demandez l'avis d'un Anglais, les Français sont inévitablement considérés comme paresseux au travail. Ils sont même qualifiés de "fainéants". Cette réputation dessert nos travailleurs français au Royaume-Uni. Selon la BBC, il est vrai que les travailleurs français bénéficient d'au moins 5 semaines de congés par an, contre 4 pour nos homologues britanniques. La moyenne d’heure de travail en France est d’ailleurs de 35h, pour 37,30 heures au Royaume-Uni.
Même dans les actualités récentes, les travailleurs français se mobilisent depuis des mois contre une réforme des retraites qui élèverait l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans. À ce sujet, la députée Sandrine Rousseau a récemment défendu le "droit à la paresse" des Français lors d'un débat à l'Assemblée nationale, titre qui correspond également à un essai philosophique écrit par le penseur socialiste Paul Lafargue au XIXe siècle. À titre comparatif, l’âge de la retraite est de 68 ans au Royaume-Uni.
Il est compréhensible que les Français soient perçus comme réfractaires au travail, surtout lorsque l'on sait que l'attribution de congés payés, par exemple, ne concerne qu'une minorité de pays. En France, cela représente 30 jours par an, l'une des moyennes les plus élevées en Europe...
Mais les Français sont-ils vraiment paresseux ?
L'historien américain Robert Zaretsky, spécialiste de l'histoire intellectuelle européenne, a rédigé une tribune sur le sujet. Il met en avant le travail des Français en le comparant à celui des Américains, expliquant d'abord qu’un nombre croissant de jeunes étasuniens ont commencé à pratiquer le "quiet quitting", c'est-à-dire à refuser de faire plus que ce qui leur est demandé au travail.
“Je pense que les Français ont des choses à nous apprendre en matière de travail” soutient-il. La paresse au travail remonte selon lui au 16e siècle, et se relie à des figures philosophiques et humanistes primordiales comme Michel de Montaigne, mais aussi Jean Jacques Rousseau, qui avait souligné l’importance de se concentrer sur ce qui importe vraiment : la vie en elle-même.
L’historien américain soutient que Paul Lafargue, neveu de Karl Marx, “ne défendait pas les activités de loisirs, mais les activités contemplatives ou activités collectives. C'est la définition de la vie : ne pas travailler.”
Un avenir annoncé de plus en plus feignant ?
Lafargue envisage cette vision de la vie : "quand les machines reprendront nos activités". Bien que le penseur n'aurait jamais pu imaginer l'avènement de l'intelligence artificielle, ses écrits résonnent à une époque où de plus en plus d'activités sont automatisées et délaissées.
Cependant, il convient de souligner que les Français sont actuellement parmi les travailleurs les plus assidus en Europe, aux côtés des Italiens et des Portugais, selon Eurostat, ce qui rend le cliché anglais quelque peu dépassé.
En outre, la France figure parmi les pays les moins bien classés de l'Union européenne en ce qui concerne les problèmes de santé mentale des travailleurs. Selon une étude réalisée en février 2023, la santé psychologique des travailleurs français reste très préoccupante, avec 44 % des personnes en détresse psychologique. “La France est l'un des pays qui se plaint le plus des problèmes d'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, car les gens consacrent de nombreuses heures à leur travail” , affirme Christophe Nguyen, psychologue et président de "Empreinte Humaine".
Les Français ne chercheraient ainsi non pas à travailler moins, mais à travailler mieux…
