Berty Cadilhac est réalisateur et producteur de Bouter les Anglais. Alors que le réchauffement climatique s'accélère et rend les canicules invivables en France, le gouvernement français décide d'envahir l'Angleterre pour profiter de son climat plus clément… Découvrez une web-série 100 % expatriés français pleine d’autodérision !
Vous êtes Français et vivez au Royaume-Uni depuis dix ans ; parlez-nous de votre parcours ?
Je suis effectivement originaire de France, mais j'ai pas mal voyagé avant de m'installer au Royaume-Uni, il y a dix ans. Depuis, je travaille sur divers projets de films et de théâtre en anglais. En 2016, j'ai monté une pièce de théâtre intitulée Cuisine Diplomatique. Cette expérience m'a permis de rencontrer de nombreux Français impliqués dans le théâtre et l'improvisation à Londres, et de là on a imaginé un court métrage sur le Royaume-Uni.
Comment en êtes-vous venu à créer la série web Bouter les Anglais ?
Après le succès de notre court métrage, qui faisait sept minutes, j'ai eu envie de développer davantage l'histoire et les personnages. Nous avons décidé de produire une série web, car c'était la manière la plus simple de continuer. En tant que Français au Royaume-Uni, ce n'était pas évident, surtout sans rémunération au sein des deux pays. Mais je suis habitué à produire du contenu sur toute la chaîne de réalisation, du montage au tournage, et beaucoup d'acteurs ont donné de leur temps bénévolement.
Parlez-nous de Bouter les Anglais, que peut-on y trouver ?
Très simplement, le réchauffement climatique s'accélère et rend les canicules invivables en France. Le gouvernement français décide alors d'envahir l'Angleterre pour profiter de son climat plus…clément. Ben, notre héros, se retrouve face à une communauté française qui doit éliminer les Anglais. Chaque tête anglaise supprimée est rémunérée. Bien sûr, ce sont des gens ordinaires, pas des tueurs professionnels. Ils justifient leurs actions par un patriotisme décalé, mais c'est l'appât du gain qui les motive vraiment. Ben est le seul à se poser des questions éthiques.
Qui sont les acteurs principaux de la série?
Morgan Sebode joue le rôle principal, celui de Ben, un expat qui débarque en Angleterre pour la première fois. Jeff Vitale, bien connu des expatriés pour son comedy-club, incarne un manager pénible et dangereux. Enfin, Alexiane Cazenave joue la collègue et “crush” de Ben. Alexiane, qui est franco-anglaise, est en danger d'être neutralisée par cette troupe de Français et Ben va la protéger sans révéler sa situation. Morgan Sebode coproduit également la web-série et s'occupe du casting.
Comment avez-vous réalisé ce projet sans moyen financier ?
Nous avons dû faire preuve de beaucoup de créativité (rires). Je suis habitué à gérer l'ensemble de la production, de la réalisation au montage, sans budget, donc je fais tout moi-même. Nous avons optimisé le temps des acteurs en préparant tout à l'avance. Nous avons filmé une scène en trois ou quatre heures dans les rues britanniques. La série a été tournée sur douze mois. L'acteur principal quittant le Royaume-Uni en juillet, nous avons dû accélérer la production pour tout finaliser à temps.
La série est-elle uniquement pour les expatriés français de Londres ?
Non, pas du tout. Bien que la série soit 100% réalisée par des expatriés Français de Londres, nous espérons toucher un public anglais également. Les épisodes sont sous-titrés et les Britanniques trouvent cela assez marrant. Le vrai point à souligner est que nous n'antigonisons pas les Anglais, au contraire, ils ont le beau rôle. Nous espérons aussi attirer l'intérêt des Français dans le reste du Royaume-Uni.
Quels sont vos projets pour l'avenir de la série ?
Nous attendons les retours du public pour voir si nous pouvons obtenir des subventions pour une seconde saison. L'idée est de démontrer nos capacités et de donner de la visibilité aux acteurs français expatriés à Londres. C'est un pari, mais si cela fonctionne, nous pourrions étendre l'histoire à Manchester et changer un peu de décor…
Les premiers retours sont d’ailleurs encourageants. La qualité est jugée bonne pour un format YouTube. Ce n'est pas évident de faire quelque chose de cinématique pour ce support, mais les gens sont curieux de savoir ce qui va se passer. Il y a une certaine tension, même si la série est écrite comme une comédie.
Vous vous inspirez beaucoup de l'humour anglais. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Nous essayons de nous inspirer de cet humour British, qui est souvent plus noir et troublant pour nous, Français. L'autodérision est également importante. Dans notre série, on envahit l'Angleterre, mais au bout du compte, "the joke is on us" (la blague est sur nous,ndlr). Nous rions de notre propre communauté française. Il s’agit d’un humour rassemblant plutôt que moqueur, avec des enjeux importants traités de manière décalée.
D’ailleurs, le titre “bouter” est une référence à un sketch des Inconnus, d'il y a plus de 20 ans. Nous utilisons cette expression "bouter" avec une fin de phrase décalée pour mettre en lumière l'hypocrisie et le déni des personnages qui préfèrent édulcorer leurs perceptions plutôt que de dire "tuer".