Charles III a effectué la semaine dernière son premier voyage diplomatique en tant que roi britannique en France. Dans le sillon de sa défunte mère, le souverain a su se mettre en scène en tant que roi francophile et proche de ce peuple voisin. Retour sur 71 ans de diplomatie royale franco-britannique.


Du 20 au 22 septembre 2023, le monarque Charles III a sillonné la France et sa capitale à la conquête d’un resserrement des liens avec son voisin français. Au programme : commémorations de faits de guerre franco-britanniques, allocution devant le Congrès français, banquet royal et découverte de la région bordelaise. En souhaitant conforter l’avenir de la relation bilatérale entre France et Royaume-Uni, ce déplacement fait écho à un long passé diplomatique entre les deux pays.
Elizabeth II et ses 70 visites
Charles III effectue son début de règne dans les pas de sa mère. Cette dernière s’est rendue 70 fois en Hexagone à la rencontre de ses homologues français, ou dans un cadre privé. En tant que représentants de la famille royale et du peuple britannique, les monarques du Royaume-Uni incarnent les liens symboliques et historiques qui les unissent avec leurs partenaires internationaux. S’ils ne doivent pas interférer dans la vie politique, chacun de leurs déplacements est un outil de soft-power destiné à indiquer la position du Royaume-Uni vis-à-vis de l’État en question.

Elizabeth II se rend pour la première fois en France en tant que reine en avril 1957 à Paris. Accueillie en grande pompe, elle y rencontre le président René Coty. Cette visite officielle marque la première de ses cinq visites d’État officielles en France. Tout le long de son règne, la monarque n’a cessé de se rendre en France, à tel point que le pays est aujourd’hui connu comme celui dans lequel Elizabeth II s’est le plus rendue.

La relation bilatérale entre France et Grande-Bretagne est ensuite ponctuée par les visites d’Etat royales de 1972, 1992, 2004, et la dernière, en 2014. À chaque fois, les déplacements de la Reine sont synonymes de mise en scène d’un couple franco-britannique prestigieux, solide et à jamais uni par l’Histoire. En 1972, le président Georges Pompidou fait ouvrir les portes du Grand Trianon à la Reine pour une réception hors normes qui marque les esprits. Les combats militaires communs aux deux pays sont aussi souvent mis à l’honneur lors de cérémonies de commémoration et d’hommages rendus sur le sol français, comme ce fut le cas le 20 septembre dernier, sous l’Arc de Triomphe à Paris.
Charles III, un nouveau monarque francophone et francophile
Le Roi des Britanniques semble porter la France dans son cœur. Si sa relation avec la France est directement liée à celle qu’a entretenu sa famille avant lui, il est aussi personnellement lié à notre beau pays. Il se dit par exemple que le prince de Galles a étudié le français avec grand intérêt lors de sa scolarité au collège de Gordonstoun, en Écosse.
Seul, il s’est souvent déplacé au nom de la Couronne afin d’assister à divers événements civils, militaires et culturels en Hexagone. De très nombreuses visites dans un cadre, cette fois, plus privé lui sont connues. On connaît au roi Charles III un intérêt prononcé pour la région normande et Deauville, où il aurait passé plus d’un séjour…

Charles III et la France, une relation pas toujours harmonieuse
Depuis le début du règne d’Elizabeth II, la famille royale mène une relation chaleureuse avec les Français, qui montrent un grand intérêt pour les représentants de cette dynastie ancestrale pourtant bien loin de la tradition républicaine. Cette harmonie est mise à mal à la fin des années 1990.
Le 31 août 1997, la princesse Diana, ex-épouse du prince de Galles, meurt dans un accident de voiture sous le tunnel du pont de l’Alma, à Paris. Le prince Charles se rend alors très vite dans la capitale française pour récupérer la dépouille de la mère de ses deux fils.

La froideur affichée par la Reine et sa famille en réaction à cet événement tragique vient définitivement mettre à mal l’image de la famille royale chez les Français, qui avait déjà été ternie par l’adultère du prince Charles avec Camilla et la déroute de son mariage avec la défunte princesse.
Une relation guidée par des liens diplomatiques et historiques chers à la monarchie britannique
Monarchie britannique et république française sont opposées par leur organisation politique. Mais si un élément semble bien unir les deux homologues, c’est la centralité de leur relation bilatérale historique. Bien loin des conflits militaires centenaires qui ont longtemps caractérisé les rapports de ces “Sweet enemies”, la famille royale et les représentants de la République se sont accordés pour faire front commun sur de nombreux sujets de la scène diplomatique internationale. Le roi Charles III a tenu à le rappeler lors de son discours au Sénat, le 20 septembre 2023 :
“Notre partenariat construit sur une expérience partagée demeure absolument vital alors qu’ensemble nous confrontons les défis de ce monde. Le Royaume-Uni sera toujours un des alliés les plus proches et un des meilleurs amis de la France.”
Bien que le Roi ne dispose d’aucun pouvoir politique, il est le trait d’union symbolique entre la France et le Royaume-Uni, ainsi qu’avec tous ses autres homologues internationaux. Rappelons d’ailleurs que chaque visite officielle du souverain doit être validée par le gouvernement britannique.
Le couple France-Royaume-Uni a battu de l’aile lorsque Boris Johnson, leader du mouvement pro-Brexit, a pris la tête du gouvernement britannique. Pourtant, le lien entretenu avec la France par le ou la monarque en place ne s’est jamais démenti. Et pour cause, ce dernier a pour mission de rappeler la longévité et la solidité de l’amitié de la Grande-Bretagne avec ses voisins européens. Ils sont aujourd’hui plus que jamais des partenaires stratégiques dans un contexte de déstabilisation de l’ordre mondial et de lutte contre le changement climatique.
L’entente franco-britannique sera une nouvelle fois mise à l’épreuve dès le 5 octobre prochain à l’occasion du 3ème sommet de la communauté politique européenne, une rencontre multilatérale proposée par le président Macron.
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