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Clara Luciani : un "coeur sur patte", à l'assaut du public international

Clara Luciani en concert à LondresClara Luciani en concert à Londres
Écrit par Anne-Claire Voss
Publié le 18 octobre 2022, mis à jour le 22 octobre 2022

« J’ai mis du temps, non pas à me dire que je voulais devenir chanteuse, mais à me dire que j’avais le droit d’en rêver » se rappelle Clara Luciani. Après avoir remporté deux Victoires de la Musique en 2021 pour la chanson et l’artiste féminine francophone, elle est attendue pour la première fois sur la scène londonienne à l'O2 Forum Kentish Town ce 26 octobre. Rencontre avec une artiste hypersensible qui a déjà séduit le public francophone.

 

Coeur, c’est le titre du dernier album de Clara Luciani. Coeur parce que cette chanteuse française se définit comme une hypersensible, ou parce son père lui répète sans arrêt qu’elle est un « coeur sur pattes ». Pour promouvoir son dernier album, elle est attendue sur la scène londonienne le 26 octobre à l'O2 Forum Kentish Town. Une question reste : Clara Luciani saura t-elle conquérir le Coeur d’un public… à l’international ?

 

Comment avez-vous commencé la musique ?

J’ai toujours joué de la musique. Mon père jouait de la basse, de la guitare et chantait. Je me souviens que très jeune, on s’asseyait avec mon père, ma soeur et nous chantions en famille. Souvent on me demande comment est-ce que j’ai commencé, et je n’ai pas de souvenirs précis parce que la musique a toujours été là. En revanche, je me rappelle du moment où j’ai acheté ma première guitare. J’avais 11 ans et j’avais vendu tous mes jouets dans un vide grenier pour l’avoir. C’est à ce moment-là que j’ai écrit mes premières chansons, ou plutôt mes premiers essais.

 

Un jour, ce rêve de devenir artiste est devenu un peu trop irrésistible

 

A quel moment vous êtes-vous rendue compte que vous désiriez faire de la musique votre métier ?

J’ai mis du temps, non pas à me dire que je voulais en faire mon métier, mais à me dire que j’avais le droit d’en rêver. Je viens d’un milieu extrêmement simple, et j’avais cette impression que c’était un rêve un peu bourgeois auquel je n’avais pas droit. Il fallait au contraire que j’aille à l’école et que très rapidement j’ai un bon métier pour gagner ma vie. Je rêvais secrètement à la vie d’artiste, mais je me disais que ce n’était pas pour moi.

 

Un jour, ce rêve est devenu un peu trop irrésistible. J’avais 19 ans et j’étais à la faculté en histoire de l’art. J’apprenais plein de choses mais je sentais que j’étais du mauvais côté de l’art. Cela me fatiguait d’être dans l’analytique alors que j’avais l’envie d’être de ceux qui font. Sur un coup de tête et avec ma guitare sur le dos, j’ai déménagé d’Aix-en-Provence jusqu’à Paris. C’est comme ça que l’aventure a commencé pour moi.

 

Je pense être une hypersensible

 

Pourquoi avoir choisi d’intituler votre dernier album « coeur » ?

Il y a plusieurs raisons. Je pense être une hypersensible. Et le coeur a toujours eu une importance particulière pour moi. Mon père me répète souvent « ma fille, tu es un coeur sur pattes. » Et c’est vrai que je ne suis qu’émotions et sentiments.

 

Au-delà de cela, je me suis rendue compte que dans chacune de mes chansons, on pouvait retrouver le mot coeur. Cet album est à prendre comme un jeu de piste, dans lequel il faut retrouver le coeur caché dans mes morceaux.

 

J’aime écrire des textes introspectifs et assez profonds, sur des musiques qui invitent à la danse

 

Pandémie, réchauffement climatique, guerres… Nous traversons une période compliquée, pensez-vous qu’il faille remettre du coeur à travers la musique ?

Évidemment ! Il faut mettre du coeur, un minimum de légèreté et d’insouciance. J’aime écrire des textes introspectifs et assez profonds, sur des musiques qui invitent à la danse. Je pense que la danse est réellement un exutoire. Je trouve cela super qu’avec ce disque, nous puissions pendant une quarantaine de minutes, penser à autre chose.

 

 

« Respire encore » fait partie des titres des plus écoutés sur votre dernier album. Comment l’avez-vous composé ?

À l’origine il s'agit d’une chanson écrite pour une amie qui était en train de se séparer de son copain. Il y avait chez elle une forme de renaissance. Elle était de retour dans les soirées et avait repris le contrôle de sa vie.

J’avais commencé à écrire les couplets pour elle, mais je me suis finalement rendue compte que ce retour à la vie, à la fête, était quelque chose que nous vivions tous avec la réouverture des boîtes de nuit, la fin de la pandémie…etc C’est devenu une chanson beaucoup plus générale parlant de l’après Covid-19.

 

J’aime écrire sur la vie, dans toute sa banalité

 

Quelles sont vos inspirations de manière plus générale ?

Je vis par et pour les comédies musicales, j’adore ça. Je suis aussi une immense fan des Beatles, de Paul McCartney. J’aime aussi les musiques traditionnelles françaises de Léo Ferré, Barbara… Je suis un mix de toutes ces choses-là.

 

J’écris sur des thèmes assez quotidiens et des événements qu’on pourrait qualifier de « normaux ». J’aime écrire sur la vie, dans toute sa banalité. La décrire telle qu’elle est sans la maquiller, avec ce qu’elle a de plus beau et de plus cruel. J’invente rarement des situations ou des personnages, je n’ai jamais eu trop de talent pour le fictif.

 

J’arrive dans un pays avec le défi de toucher des personnes par ma musique

 

Comment appréhendez-vous votre concert à Londres ?

C’est la première fois que nous jouons à Londres et c’est aussi la première fois que je vais jouer dans un pays qui n’est pas francophone. J’arrive dans un pays avec le défi de toucher des personnes par ma musique, mais sans la compréhension des paroles. C’est complètement nouveau pour moi et je trouve cet exercice excitant. Cela faisait longtemps qu’on avait envie de jouer en Angleterre.

 

Clara Luciani en concert à Londres

 

Quelle est votre expérience en tant que femme, et artiste ?

En tant que femme je fais face à des moments parfois un peu compliqués. Je préfère me concentrer sur les signes positifs que nous voyons en ce moment, et j’ai l’impression, notamment par les réseaux sociaux, que la parole se libère, qu’on est plus entendues, plus écoutées, et que nous pouvons parler de tout. Nous nous rendons compte que nous sommes plein de femmes à vivre la même chose, et à avoir l’envie que les choses bougent. Oui, c’est long et pénible, mais j’ai l’impression de voir des signaux positifs. On nous invite à nous accepter telle qu’on est. Cela fait du bien. Nous subissions des choses complètement insensées, comme la dictature de la minceur ou l’impression de ne pas avoir le droit de vieillir… comme s’il y avait une date de péremption. Je trouve génial que nous mettions la lumière sur ces problèmes-là.

 

Je me suis sentie très souvent sous-estimée

 

Et dans la musique, peut-être plus personnellement, à quels obstacles avez-vous du faire face en tant que femme ?

Je n’ai pas subi d’harcèlement et je n’ai pas à me plaindre à titre personnel. En revanche, je me suis sentie très souvent sous-estimée. Lorsque j’ai commencé les chansons en solo, on me disait : « Je ne sais pas si tu as les épaules pour écrire des chansons toute seule». Je ne pense pas qu'un homme aurait eu exactement les mêmes réflexions…

 

Il y a eu aussi toute cette première tournée que j’ai faite seule avec mon ingénieure du son, qui était une femme. Dès que nous arrivions, les personnes couraient vers nous pour nous expliquer comment est-ce qu’on branche une guitare…etc. Ce sont des petites réflexions, qui sont plus énervantes qu’autre chose.

 

 

Comment souhaiteriez-vous présenter votre musique à quelqu’un qui ne connaît pas ce que vous faites ?

Je dirai que je suis un mélange de toutes les familles musicales que j’admire, qui vont du rock au disco ou à la chanson française. Ce sont des chansons très introspectives, que j’essaye d’écrire de manière poétique et parmi lesquelles on retrouve une vraie thématique : celle d’être une femme. Comment expérimentons-nous cette féminité, comment dealer avec…etc. J’aimerais transmettre de la légèreté, et aussi faire réfléchir sur des sujets qui me touchent. Ne pas choisir entre le grave et le léger, être les deux à la fois, apporter aux gens à la fois une légèreté et une base de réflexion.

 

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