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Nicolas Mezzalira : « De nouvelles opportunités »

Nicolas Mezzalira alliance française lima pérouNicolas Mezzalira alliance française lima pérou
© GFLOR
Écrit par Guillaume FLOR
Publié le 20 octobre 2020, mis à jour le 20 octobre 2020

Le Congrès des Alliances françaises d’Amérique du Sud est l’occasion de faire un point sur la situation de l’Alliance française de Lima et du réseau péruvien.

Nicolas Mezzalira, directeur général de l'Alliance française de Lima et coordinateur national des Alliances françaises du Pérou nous explique comment s’est passée l’adaptation au nouveau contexte imposé par la crise sanitaire de ces huit derniers mois.

« Du jour au lendemain, il a fallu très vite proposer une continuité de nos dispositifs linguistiques et culturels. Je suis assez fier de notre action et de nos équipes, en particulier à Lima mais également en région, parce qu’en quelques jours presque tous les professeurs se sont adaptés et on a pu très rapidement répondre et pouvoir proposer nos cours en ligne. Un travail colossal parce que c'est pratiquement 400 cours qu'il a fallu repositionner en ligne. Fort heureusement, nous avions eu la géniale intuition d'acquérir une plate-forme d'enseignement à distance qui permet d'accompagner la simple visioconférence ».

« Ce qui différencie une Alliance française d'un centre de langues lambda, c'est bien que nous sommes les meilleurs et les plus légitimes, c'est-à-dire que nous sommes les opérateurs linguistiques et culturels de l'Ambassade de France et que nous sommes aussi les seuls à pouvoir délivrer les certifications internationales. Quand on apprend le français à l'Alliance française, on s'ouvre un monde culturel sur la Francophonie qu’aucune autre institution ne peut offrir. C’est beaucoup de contenus additionnels, culturels et linguistiques, avec d’abord la bibliothèque physique et désormais un accès à la bibliothèque virtuelle Culturethèque, mais aussi des cours de conversation gratuits animés par les directeurs des Alliances françaises… Quand on est étudiant de l'Alliance, on a des plus ».

Nous devons réfléchir à transposer notre modèle physique et présentiel dans le monde de la toile

« [Au début de la crise], nous avons accusé le coup comme tout le monde, il y a eu une sidération. En avril, en particulier, il y a eu un trou d'air et puis, grâce à l'excellent travail de tout le monde, on a récupéré petit à petit jusqu'à revenir à l'équilibre ces derniers mois. Par rapport à l'année dernière, on a à peu près les mêmes chiffres pour les mois de septembre et octobre, donc c'est plutôt bien. Nationalement, c'est pratiquement la même chose pour toutes les Alliances au Pérou. On continue à travailler, les cours ne sont pas arrêtés ».

Les cours de langue sont une des activités qui souffriront le moins de la crise

« Les gens ont profité de cette période, dans leur stratégie individuelle, pour améliorer leur C.V., avec l'anglais évidemment, mais aussi avec le français. Nous sommes sur le marché de la deuxième langue ».

« Les crises sont un révélateur de vulnérabilité. L'accident, c'est l'épidémie et la crise, c’est la réaction sociale que nous avons par rapport à cet accident. Et bien nous, nous n'avons finalement pas été si vulnérable que ça ».

« Il y a une plus grande volatilité des étudiants, on en perd, on en retrouve, d’un mois sur l’autre, on a un gros travail de communication. On ne sera pas forcément au vert à la fin de l'année mais on prévoit entre - 5 et - 10% sur toute l'année. On est plutôt content, si on nous avait dit ça au mois de mars et quand on compare avec l'Amérique latine, c'est plutôt du - 30% ».

Si la crise révèle des vulnérabilités, il y a aussi de nouvelles opportunités

« On ne reverra jamais l'Alliance comme elle était au 14 mars, il faut en faire le deuil, il y a des nouveaux chemins qu'il faut identifier et dans lesquels il faut aller à fond. Il faut comprendre que maintenant, il y a des gens qui ne voudront jamais retourner dans une salle de classe. Cette demande-là va rester, donc il faut mettre en place une nouvelle offre ».

« Quelle est la vraie problématique de notre action maintenant ? C’est la déterritorialisation et la dématérialisation de nos contenus. Avant, un spectacle se faisait dans le théâtre, entre quatre murs, avec une billetterie physique, si tu n'es pas de lima, voire de Miraflores, c'était compliqué de venir. Maintenant, il n'y a potentiellement plus aucune limite (la seule qui reste serait peut-être le décalage horaire). Désormais, on s’adresse à tous les péruviens. Où que tu sois dans le Pérou, tu peux prendre un cours de français avec une Alliance française. On a élargi l'assiette de nos clients potentiels ».

« Dans le même ordre d'idée, une opportunité qui a été révélée par la crise, il y a le superbe projet des COAR qu'on a réussi à concrétiser. Ce sont les collèges d’excellence du système public péruvien, il y en a un par province, donc 25 dans tout le pays. Ces collèges ont pour vocation d’accueillir des jeunes gens dont les parents n'ont pas de hauts revenus mais qui ont d'excellents résultats scolaires. On était déjà un peu en contact dans plusieurs régions (Cusco, Arequipa et Lima) mais là, ça a été signé [au niveau national] grâce à l'Ambassade de France qui a pu libérer un budget pour ce projet. C’est un accord tripartite qui a été signé au plus haut niveau, l'Ambassadeur de France avec le Ministre de l'éducation péruvien et le président de l’Alliance française de Lima qui représente les Alliances du Pérou, pour que l'on puisse donner des cours de français à environ 900 élèves dans tout le Pérou, tous ceux qui arrivent en première année de COAR. C'est le retour de la langue française dans le système publique péruvien ».

 

Quels sont les grands projets culturels en cours et à venir ?

« Au niveau culturel, c’est la même chose, c’était la sidération au début de la crise avec l’annulation de tous les événements. [Le confinement est tombé] à trois jours de la célébration de la Francophonie. Donc on a annulé beaucoup de choses mais on a vite transposé le présentiel en visuel et ensuite, on s’est adapté ».

« On a décidé d'envoyer une alternative culturelle quotidienne, quelque chose de léger pendant le confinement, et puis la réaction de Paris est arrivée avec « Culture chez nous » de l’Institut français et du Ministère de la Culture qui ont libéré des millions de contenus que nous avons pu utiliser pour de la programmation [en ligne], avec l'idée que les gens continuent de découvrir la France, l'excellence de la création française… Nos grandes lignes d'action sont toujours les mêmes ».

« Maintenant, on réouvre un peu. L’Alliance doit toujours avoir une petite longueur d'avance sur tout le monde. On a été le centre culturel le plus réactif au début de la crise, je veux être celui qui pousse le plus à la réouverture, au retour au présentiel, sans prendre de risques [sanitaires]. La galerie d'art est réouverte. « Passeport pour un artiste » est la première activité que l'on fait en présentiel depuis sept mois. Les artistes sont venus, ils ont créé leurs œuvres et on reçoit sur rendez-vous avec tous les protocoles mais c'est reparti ! »

Du retour au présentiel mais avec discernement

« Maintenant le risque psychologique est presque plus grave que le risque sanitaire et là aussi, nous avons un rôle. Les gens sont ravis, ils viennent boire un verre à l’Alliance, ils visitent la galerie, ils prennent un bouquin… la première chose que j'ai réactivée, c'est la médiathèque avec un protocole ».

« On va également mettre à disposition dix salles de classe qui sont désespérément vides et qui risquent de le rester jusqu'en mars, à des artistes dans le cadre du projet « La Fabrique ». Ce sont des résidences artistiques de trois mois pour lesquelles nous recevons actuellement les dossiers de candidature ».

L’hybridation sera le futur !

« Le pas de plus qu'on a fait dans le distanciel restera. L'avenir, c'est les deux en même temps, le présentiel et le virtuel, ce que l’on appelle le bimodale, un nouveau modèle économique à la culture ».

« Dans la prochaine phase, pour la réouverture du théâtre, nous n’aurons peut-être plus qu’un tiers de places disponibles, mais en même temps, [grâce] à un système audiovisuel en streaming et une billetterie en ligne, il sera possible de voir le spectacle depuis son salon, c’est l’hybridation ! C'est le changement de notre institution, il faut qu'on le considère pour le culturel comme pour les cours ».

 

20 et 21 octobre, le congrès des Alliances françaises d’Amérique du Sud

« Étant une des plus grosses Alliances du monde, si ce n'est la plus grande, l’Alliance française de Lima essaie d’agir pour être utile en aidant les Alliances du Pérou, ce qui est notre rôle, mais aussi en mettant en place des conseils, des partages de bonnes pratiques, des échanges avec les autres Alliances d'Amérique latine ».

« La Fondation Alliance française avait prévu d'organiser un congrès mondial à Paris, en octobre, mais comme il ne peut pas se faire, des congrès en ligne pour chaque zone ont été mis en place et c'est donc Lima qui a l'honneur et la responsabilité de coorganiser le premier congrès virtuel de la zone du cône Sud de l’Amérique latine (Amérique du Sud moins la Colombie et le Venezuela), avec 115 alliances qui vont se parler pour la première fois entre elles, les 20 et 21 octobre ».

« C’est là aussi une nouvelle opportunité parce qu'on va avoir beaucoup plus de monde que s’il avait fallu acheter son billet d'avion pour aller à Paris et il y a derrière tout ça, une démarche très louable, celle de l'expression de la base parce qu’on a ouvert pendant les derniers mois des cahiers de doléances où tout le monde a pu dire ce qui n'allait pas pour eux et ce qu'il proposait, sur cinq thèmes : culture, pédagogie, gouvernance, communication et marketing, et administration et finance. On voit ce congrès comme un moment de réunions d’où sortira une synthèse qui remontera à Paris pour les convaincre qu'il y a urgence d'avoir des solutions mutualisées sur les cours de langue, sur la communication, les finances... notamment pour aider les plus petites Alliances. Sinon on n'est pas un réseau ».

Pendant le congrès, un dessinateur de presse caricaturera en direct les participants et pour la clôture de l’événement, mercredi soir, un spectacle intitulé « C’est le Pérou » sera donné depuis le théâtre de l'Alliance française de Lima pour les inscrits au congrès mais qui sera aussi retransmis en ligne sur Facebook.

 

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