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Papouasie : l’homme peut il refaire ce qu’il défait?

Raja-ampat/papouasie/indonesie/preservation/faunemarineRaja-ampat/papouasie/indonesie/preservation/faunemarine
@BarryHyman
Écrit par Anne Suchanecki
Publié le 28 avril 2019, mis à jour le 2 mai 2019

Entre océans et hautes terres, la Papouasie déroule ses paysages à couper le souffle… Même dans cette diversité extraordinaire qu’est l’Indonésie, la Papouasie se distingue à bien des égards.  Et si plonger avec les requins dans les eaux claires de Raja Ampat et marcher dans la vallée du Baliem entouré d’enfants de la tribu des Dani semblent relever de deux mondes opposés, ces mondes ont en commun un attachement unique au territoire, une relation exceptionnelle avec la nature.

 

raja_ampat/papouasie/indonesie

 

Connue sous le nom de Irian Jaya jusqu'en 2001, la Papouasie occupe environ la moitié de l’île de Nouvelle Guinée, île immense recouverte à 75% de jungle impénétrable. La densité de la population, la plus faible d’Indonésie, en fait naturellement un territoire plus préservé que partout ailleurs dans le pays. 

 

Raja Ampat, Graal des plongeurs, avec plus de 600 îles, 750 kilomètres de littoral au bout du monde et une concentration d’espèces marines inégalable, est l’un de ces endroits qui redonne un peu confiance en l’être humain

 

Formé de 14 zones marines protégées depuis 2002 dont 45% de massifs coralliens et de mangroves, Raja Ampat constitue sans doute aujourd’hui l’écosystème marin le plus riche de la planète. Pourtant dans les années 80/90, la situation était bien menacée… La surpêche et l’emploi de moyens destructeurs comme la dynamite et le cyanure, couplés à l’acidification des océans avaient endommagé les massifs de corail et fait fuir de nombreuses espèces marines. Le braconnage des tortues géantes, des raies Manta et des requins était alors monnaie courante… 

C’est grâce à un effort collectif exceptionnel des communautés locales et régionales, des ONG telles que World Wildlife Fund et Conservation International, des scientifiques, universitaires et des Fondations créées par les centres hôteliers de plongée que la tendance a pu être progressivement inversée. Au début des années 2000, conscients des enjeux écologiques et économiques menaçant le développement durable des zones côtières, la Régence de Raja Ampat crée les premières zones marines protégées. En 2004/2005 l’un des premiers projets de conservation et de construction d’un centre hôtelier de plongée voit le jour à Misool, l’une des 4 îles principales. Mené par deux passionnés de plongée et de conservation, Andrew et Marit Miners, Misool Eco-Resort est aujourd’hui considéré comme un modèle mondial en terme de préservation de l’environnement. 

 

raja_ampat/papouasie/indonesie

 

Les initiatives de conservation sont complexes à mettre en place et leur gestion suppose une vigilance et des patrouilles constantes des parcs protégés, mais les résultats sont là ! 

 

Les habitants de la région vivent en symbiose avec leur milieu naturel et beaucoup savent d’instinct qu’ils doivent protéger la nature qui les fait vivre. Les fondations leur apportent les compétences qu’ils n’ont pas forcément. 

 Les habitants sont en général réceptifs aux initiatives proposées et leur engagement est la clé de voûte du système

C’est le constat que fait SEA (Science Education Awareness) CENTRE créé par le centre de plongée de Papua Explorers Dive Resort. Cette fondation fait un magnifique travail de conservation : outre les programmes de recensement des mammifères marins, la protection des raies Manta par l’étude des migrations et des comportements, de nombreux projets sont centrés sur la restauration des récifs de corail par la transplantation de minuscules particules de corail sur des structures artificielles. 

Au-delà de la sauvegarde du corail, ce type de projet est devenu une plateforme éducative et sociale majeure : les enfants des communautés voisines y participent et de nouveaux métiers sont créés. Tout est fait pour que ces projets s’inscrivent durablement dans la culture et l’économie du littoral.

 

Aujourd’hui les requins sont revenus, un plongeur a en moyenne 76% de chance de voir un requin à Raja Ampa et les raies sont plus nombreuses. Les massifs coralliens et les mangroves reprennent du terrain petit à petit. Même si les désastres des décennies précédentes ne sont pas effacés, ce sont de bonnes nouvelles.

 

Alors, tout va bien ? 

 

Pas tout-à-fait… La région a un challenge important devant elle: l’appauvrissement des stocks de poissons dans les provinces et pays voisins intensifie la pression sur la pêche. Le tourisme augmente : le SEACENTRE fait état de +75% de plongeurs entre octobre 2015 et octobre 2017, aucun mouillage dit « corps-mort », bouées de mouillage évitant les ancrages destructeurs, n'est encore installé pour accompagner la croissance importante des bateaux de plaisance. Certaines parties de Raja Ampat sont envahies par les déchets plastiques, ce qui nécessite un effort constant d’éducation et une vraie politique de recyclage. 

 

Le tourisme a été jusqu’à présent une belle opportunité pour Raja Ampat. Outre ces programmes majeurs de conservation, il a permis le développement des logements "homestays" chez l’habitant pour un meilleur partage de ses bénéfices. Mais pour éviter qu’il ne devienne une menace pour l’environnement, il doit s’accompagner d’une coopération d’envergure entre les instances gouvernementales et non-gouvernementales. En préservant l’écosystème corallien le plus varié de la planète, l’Indonésie a l’opportunité de prendre la tête en matière de conservation marine. Colossal, mais très beau défi !

 

 

https://www.stayrajaampat.com/ : Association des Homestay sur Raja Ampat

 

crédits photos: Barry Hyman

 

Publié le 28 avril 2019, mis à jour le 2 mai 2019