Suite et fin de la première partie publiée hier...
A Safranbolu, superbe petite ville anatolienne inscrite depuis 1994 au Patrimoine Mondial de l’Unesco, pas un touriste dans les rues qui d’habitude voient défiler, notamment les week-ends, un monde fou. La population locale respecte globalement bien les consignes.
Cahit, 44 ans, est instituteur à l’école primaire Aydınlık Evleri de Karabük à 10 km de là. Cet établissement a accueilli début février un groupe de 20 personnes francophones venant de 4 pays différents (Macédoine, Espagne, Roumanie et Belgique) dans le cadre de son programme Erasmus Plus pour lequel Cahit est l'interlocuteur principal.
Ses 26 élèves de 8 ans en 2ème classe ont démarré lundi 23 mars à 10 h leur premier cours de turc en lignedepuis la maison. D’abord 15 minutes de cours télévisé sur une des 3 chaînes nationales EBA TV mises en place pour l’enseignement à distance, puis reprise et répétition du cours sur Skype avec leur professeur, aussi pendant 15 minutes. S'en est suivi le cours de mathématiques de la même façon.
Les petits ont également passé ce matin-là une heure supplémentaire avec Cahit pour 30 minutes de turc et autant de maths étudiées à partir des documents préparés par l’instituteur.
Lui et ses collègues de l’école de Karabük ont suivi il y a déjà plusieurs années une formation sur EBA, la plate-forme d’éducation en ligne instaurée par le Ministère de l’Education Nationale, destinée tant aux enseignants qu’aux étudiants. Il l’utilise régulièrement et maîtrise parfaitement les autres outils préconisés, tels que WhatsApp, Skype et Wirecast, pour cette nouvelle façon d'enseigner que chacun doit s’approprier, qu’il s’agisse des professeurs, des élèves ou des parents.
La tournée du pays se poursuit à présent dans la région égéenne.
Necati, 59 ans, guide touristique licencié depuis 1984, est correspondant local d’une agence de voyages française. Il navigue entre Izmir et à 35 km de là au bord de la mer Egée la jolie petite station d’Iskele/Urla, où il s’est autoconfiné depuis plusieurs jours, faute de travail. Autant le week-end des 14-15 mars, les smyrniotes étaient venus en masse, autant les injonctions officielles limitant les déplacements aux seules obligations professionnelles et alimentaires semblent avoir porté leurs fruits, quasiment personne à l’horizon sur le bord de mer habituellement fort apprécié.
Vendredi 20 mars, le Président de la République turc a notamment demandé à la population “d'augmenter la distance sociale autant que possible et, surtout, de ne jamais sortir de la maison à moins que vous ne le deviez".
Pour éviter que les nerfs ne lâchent, Necati a cessé d’écouter les informations le matin, le soir étant largement suffisant. Il a pris le parti d’occuper ses journées à lire, regarder des films et effectuer des recherches sur les grandes pandémies tout au long de l’histoire. Et, ce qu’il voulait faire depuis longtemps, il cuisine... Par ailleurs, avec sa compagne, il joue au bésigue, un vieux jeu de cartes français qui se joue à deux, ça tombe bien !
Concernant l’avenir du tourisme tant en Turquie - qui commençait à voir le bout du tunnel depuis l’an 2019 après 3 années de galère - qu’au niveau mondial, selon Necati : “C’est foutu jusqu’en avril 2021 ! Deux hypothèses : si l’épidémie se termine d’ici juin 2020, ce sera difficile de faire partir les gens durant les mois suivants ou bien à contrario, à force d’avoir été confinés durant des semaines, ils n’auront qu’une envie, voyager ! Mais la situation économique le permettra-t-elle ?”
Une suspension des vols à destination de 9 pays européens - l’Allemagne, l'Espagne, la France, l'Autriche, la Norvège, le Danemark, la Suède, la Belgique et les Pays-Bas a été introduite ainsi que les entrées de passagers par tous les postes frontaliers à partir de samedi 14 mars 8 heures (minuit pour l'Azerbaïdjan et la Géorgie) jusqu’au 17 avril 2020.
A partir du 21 mars 17 heures, les vols vers 46 autres pays ont été interrompus dans le cadre des nouvelles mesures prises.
A 250 km au sud d’Urla, nous voici à Muğla où habite et travaille Damla, âgée de 22 ans. Un sourire permanent aux lèvres, ce petit bout de femme pétillant de vie est originaire d’un petit village situé dans le nord-est de la Turquie près de la frontière géorgienne.
Titulaire d’un diplôme de spécialiste de la sécurité au travail et de la protection de la santé, elle est employée par le département construction d’une holding. Damla évolue avec aisance dans un environnement masculin sur les chantiers d’immeubles, son casque sur la tête et ses chaussures de sécurité aux pieds.
Dans ce secteur d’activité, hors de question, pour le moment, que les chantiers s’arrêtent ! La sécurité faisant partie intégrante de son quotidienne, elle oeuvre comme elle peut pour réduire tous les jours un peu plus les risques liés tant au travail des personnes qu’elle suit que pour ceux concernant le coronavirus, un danger invisible qui n’a pas fini de faire parler de lui…
Comment cela se passe-t-il dans les plus grandes villes de Turquie, en particulier à Istanbul ? Ce sera l’objet d’un prochain article et d’une visite virtuelle auprès de certains habitants de la mégapole, mais aussi d’Ankara et d’Izmir… Rendez-vous la semaine prochaine !
Pour les ressortissants français demeurant en Turquie, de nombreux renseignements mis à jour régulièrement sont disponibles sur le site du Consulat d’Istanbul