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INTERCULTURALITE - L'impact de l'Histoire australienne

Arrivant en Australie de France que peut-il bien nous arriver ? Après tout l'Australie est un pays anglo saxon, d'apparence très similaire à la France. Ces différences ne viennent pas seulement de la langue où les Aussies semblent parler un autre anglais. Parlez-vous l'australien ? Les différences culturelles sont bien réelles dans chaque pays et pour commencer à les comprendre, attardons-nous sur l'histoire.

CCFlic r Capitaine James Cook 

Quelle histoire pourriez vous penser ? Car ce pays est très jeune et n'a presque pas d'histoire. Et pourtant la culture arrive bien de l'histoire, des valeurs, des croyances alors commençons par comprendre son impact sur les modes de comportements australiens.

Les premiers habitants
Les premiers Australiens, les Aborigènes sont une des plus anciennes civilisations. La population a été décimée avec l'arrivée des colons à partir de 1788. Aujourd'hui la population totale est 670.000 (2011) ce qui représente 3% de la population australienne.

Les aborigènes ont une connexion très profonde à la terre et l'environnement. Malheureusement, l'introduction du tabac, de l'alcool et des maladies a perturbé la vie et le développement de la culture aborigène.

En 1962, ils obtiennent le droit de vote et en 2008 le gouvernement s'excuse publiquement pour avoir enlevé les enfants à leur famille entre 1909 et 1969. On appelle ces enfants la génération volée ("The stolen generation") ; ces enfants étaient placés sous la tutelle de familles blanches pour les convertir à la vie occidentale.

Malgré de nombreux efforts de la part du gouvernement pendant les 40 dernières années, les Aborigènes ne sont pas encore très représentés dans la culture australienne. C'est un sujet toujours sensible et la situation reste compliquée même si il y a bien sur des exceptions.

Les premiers migrants
Les prisonniers venus d'Angleterre sont les premiers migrants arrivés par bateaux en 1788 à Sydney Cove ; soit 1.000 personnes au total marins, officiers, passagers et prisonniers inclus. La plupart n'étaient accusés que de petits délits, comme de vol à l'étalage. Mais les prisons anglaises étaient pleines et après la guerre d'indépendance des Etats-Unis en 1783, l'Amérique refusait d'accepter plus de prisonniers anglais. Alors l'Australie se présente comme une opportunité de désengorger les prisons du Royaume.

Pour vous rafraichir la mémoire sur les Monarques anglais, en voici la liste :

George III 1760-1820 ; George IV 1820-1830 ; William IV 1830-1837 ; Victoria 1837 - 1901

Une nouvelle approche de la hiérarchie
Avec les gradés de l'armée, les prisonniers avaient le désir d'abolir le système de classe sociale qui était si présent dans la société anglaise. Avec l'éloignement les structures sociales se perdent et le refus de la hiérarchie se fait sentir dès cette époque.

En même temps que l'arrivée des prisonniers, le mouvement syndicaliste venu lui aussi d'Angleterre nait et les syndicats deviennent forts et puissants. Les syndicats se battent pour le salaire minimum et la journée des 8 heures de travail mais aussi pour les retraites. L'Australie est un des pays au monde à mettre en place ces nouveautés sociales dans les années 1850 (1936 en France pour les 40 heures de travail). Le pouvoir des syndicats croit au fil des années ce qui permet à l'Australie d'avoir maintenant un des différentiels de salaire le plus faible au monde.

L'Australie devient indépendante en 1901 et opte pour une Fédération d'Etats avec à la tête du pays un Premier Ministre. Ceci montre une envie de se différencier de la Royauté Anglaise et de l'autorité monarchique. Le refus de l'autorité s'accroit surtout pendant la première guerre mondiale avec la bataille de Gallipoli en 1915. L'impression que les jeunes Australiens sont utilisés comme boulets de canon sous l'autorité anglaise ne fait qu'augmenter le sentiment de rupture avec la puissance coloniale. L'idée de défendre des valeurs juste ne peut pas se faire à n'importe quel prix. C'est ce que l'on appelle la légende de l'ANZAC (Australian New Zealand Army Corp). L'Australie et la Nouvelle Zélande ont perdu à eux deux 3% de leur population (décès militaires uniquement n'incluant pas les morts civils) par rapport à la France (3,5%) et le Royaume Uni (2%). De ce fait, l'autorité est questionnée en permanence, que ce soit au travail ou dans la vie privée, tout le monde a le droit de donner son opinion et de ne pas être d'accord. L'esprit de justice et de fierté se retrouve dans la vie de tous les jours.


                                                                                          ©Hob2013  

Des conditions difficiles

Les Aborigènes ont appris à survivre dans cet environnement hostile et très difficile. Alors quand les prisonniers sont libérés, ils se trouvent confrontés aux mêmes situations comme les fléaux animaliers ou les conditions extrêmes des températures et un sol très aride qui ne permet pas de cultiver la terre pour se nourrir. Les colons ne prennent pas en compte les connaissances aborigènes pour survivre. Les prisonniers ont même peur des Aborigènes car la communication est difficile.

Face aux difficultés les prisonniers se regroupent et adoptent le principe de survie en nombre. La camaraderie ou l'alliance fraternelle se forme entre groupe d'hommes. C'est ce qu'on appelle le "mateship". Cette camaraderie se ressent même maintenant avec un esprit de groupe très fort. Il faut faire partie du groupe même si l'on garde son individualité.

Les syndicats, de leur coté, négocient en groupe, les hommes se regroupent pour cultiver la terre ou élever du bétail. Il se forme une unité entre hommes. Pour les femmes qui sont en  forte minorité, la vie n'était pas facile et de ce fait se développe un mouvement très fort de solidarité entre elles. Paradoxalement, les femmes, malgré un environnement difficile, bénéficient parfois de meilleures conditions qu'en Europe et sont en général plus libres pour l'époque. C'est en 1895 que l'Australie Méridionale donne le droit de vote aux femmes (en 1944 pour la France). 

Cette camaraderie devient une référence ou chacun partage ses expériences et ses opinions et conseils ; tout le monde peut se plaindre et blaguer ensemble mais aussi se soutenir dans les moments les plus difficiles.

Aventures et opportunités
En même temps l'esprit d'aventure est dominant car le pays est encore inconnu et donc la prise de risque devient normale. Les pionniers, les entrepreneurs deviennent de plus en plus  nombreux. Tout perdre et tout recommencer est une situation très commune et on les appelle les "battlers". Ce mot d'origine Française "un battant" désigne quelqu'un qui se bat et ne baisse pas les bras. C'est pourquoi l'échec en Australie n'est pas vécu comme une finalité ou une fatalité mais plutôt comme un tremplin pour saisir une autre opportunité et pour réussir la prochaine fois.

L'achat de terre pour devenir fermier et la conquête de l'or dans les années 1850 attirent de plus en plus de migrants. C'est à cette époque que l'individualisme nait et de ce fait tempère la forte tradition de groupe. A ce jour, l'Australie est considérée comme une société individualiste avec une forte tendance collective. C'est-à-dire qu'il faut savoir faire partie du groupe et savoir gérer le groupe mais en tenant compte des personnalités et des préférences de chacun. On garde son identité dans l'esprit de groupe. Les Australiens sont très communautaires et cela se retrouve avec les clubs de sport, de lecture ou le volontariat.

Que ce soit l'histoire, les valeurs, les croyances, elles nous aident à comprendre un peu mieux les modes de comportements des Australiens. L'environnement difficile a forgé les comportements de battants, de communauté et de solidarité "mateship". Considérée comme un laboratoire social avec le droit de vote, la protection du minimum salarial et le droit à la retraite, l'Australie a construit une nation et des valeurs qui aident à comprendre les comportements.

Sabrina Teller (www.lepetitjournal.com/melbourne) mercredi 27 novembre 2013

La semaine prochaine : les valeurs australiennes

Sabrina Teller, basée à Melbourne est formatrice inter culturelle spécialisée dans l'acclimatation des expatriés en Australie. Elle propose des ateliers pour apprendre à décoder les comportements, savoir s'intégrer et geerer de nouvelles équipes. Pour davantage d'information contacter sabrina@internationalaustralia.com.au

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