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Le cantonais a-t-il failli remplacer le mandarin en Chine ?

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@Unsplash/qi xna
Écrit par Ayman Ragab
Publié le 28 mars 2023, mis à jour le 1 avril 2023

Lorsque l’on parle de langue chinoise dans un contexte général ou en dehors de Hong Kong, on pense principalement au mandarin. Et pour cause, le mandarin est la langue officielle du gouvernement chinois et enseignée à l’école, en Chine continentale, à Taïwan mais aussi à Singapour. Le fruit d’un événement historique qui aurait pu tourner à l’avantage du cantonais, aujourd’hui principalement parlé à Hong Kong et dans la région du Guangdong.

Le besoin d’une langue nationale pour la nouvelle Chine

La Chine du XIXème siècle était un empire culturellement divers, peuplée par différents groupes ethniques et gouverné de manière décentralisée par une élite mandchoue. Aussi, plusieurs langues coexistaient au sein de cet empire, y compris un grand nombre de dialectes chinois. Parmi les dialectes les plus répandus, le mandarin, langue de Chine du Nord et donc de la capitale Pékin, le wu, aussi connu sous le nom de shanghaïen, le min nan, langue du sud-est et le cantonais.

Interface principale du commerce entre la Chine et le reste du monde, le cantonnais était la langue principale du commerce et du négoce. Du fait de cette prédominance, la plupart des marchands étrangers souhaitant commercer avec la Chine conversaient en cantonnais avec les officiels locaux et marchands. Par ricochet, le Guangdong fut la région qui fut le plus en contact avec les idéaux occidentaux. Parmi les personnes influencées par ces idées, une grande partie des futurs révolutionnaires chinois.

En 1911 éclate la révolution chinoise, dont la figure la plus emblématique reste Sun Yat-Sen, originaire du Guangdong et considéré comme le père de la nation moderne chinoise.

S’accélère alors un processus de formation d’une identité chinoise, qui se base en partie sur l’adoption d’une langue nationale commune.

Pourquoi le mandarin a été préféré au cantonais

Selon certains, les intellectuels républicains se seraient rassemblés pour avoir un débat national portant sur l’adoption d’une langue nationale. Deux choix se seraient alors posés. D’un côté le mandarin, langue de l’élite du nord et parlé par une grande partie de la population. De l’autre, le cantonais, langue desdits intellectuels, mais aussi langue de la diaspora chinoise à l’étranger, éduquée et financièrement capable de soutenir le développement économique de la nouvelle Chine républicaine. Et de manière similaire au choix exaucé par les députés de la Convention nationale quant à l’exécution de Louis XVI, le cantonais aurait manqué d’une voix près de devenir la langue nationale.

Bien que la véracité historique de ce récit soit mise en doute par les historiens, il reste tout de même représentatif des débats concernant la formation de l’identité chinoise moderne. D’un côté, le cantonais a certes eu le privilège d’être le dialecte chinois le plus parlé à l’international, ainsi que celui de la nouvelle élite intellectuelle chinoise, il n’empêche que le mandarin fut adopté pour des raisons pratiques.

Le mandarin était la langue la plus répandue

En effet, ayant été la langue de l’administration et du centre du pouvoir depuis le XVIème siècle, mais aussi ayant été le dialecte chinois le plus répandu en Chine même, il a été jugé logique pour les cadres de la République de Chine d’imposer le mandarin en tant que langue nationale.

Sous la période du Kuomintang, le mandarin fut officiellement adopté et gagna le surnom de guoyu, ou langue nationale, dans leur quête d’unification des différentes identités chinoises. Héritage perpétué par les autorités communistes qui appliquèrent la même politique, et adoptèrent la simplification du script.

Parmi les communautés chinoises à l’étranger, le cantonais occupait toujours la place de lingua franca jusqu’au boom économique chinois. Du fait de la pop culture hongkongaise, le cantonais restait la langue de la diaspora chinoise, place qui diminue de plus en plus aujourd’hui. Aujourd’hui par exemple, les communautés chinoises d’Asie du Sud-Est (Malaisie, Indonésie, Singapour), se tournent de plus en plus vers le mandarin du fait des opportunités économiques qu’offre la montée de la puissance chinoise dans la région.

Néanmoins, le cantonais reste la langue officielle des deux régions administratives spéciales de Hong Kong et Macao, et fait preuve d’une incroyable résilience, tant dans le milieu culturel que dans son usage quotidien par 80 millions de locuteurs à l’international.

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