The Nature Conservancy entreprend des études pour restaurer les bancs d'huîtres de Hong Kong. Un projet environnemental d'envergure, positif à plusieurs niveaux.
Le projet n'en est qu'à ses débuts, mais il est déjà plein de promesses. En mars dernier, l'organisation de protection de l'environnement TNC (pour The Nature Conservancy) s'est lancée à la rescousse de l'huître locale, la crassostrea hongkongensis, et de son récif. En partenariat avec l'Institut Swire des Sciences marines de l'Université de Hong Kong, l'objectif est simple, en apparence : réimplanter à Hong Kong les mollusques comestibles pour améliorer l'environnement.
"Nous avons exploré de nombreux endroits, et avons été assez surpris d'y constater la présence d'huîtres, notamment sur la partie Est du littoral, raconte Marine Thomas, responsable de projet de conservation à TNC-Hong Kong. Tous ces lieux ayant le même point commun : un apport en eau fraîche."
De ce premier constat, les chercheurs ont sélectionné dix zones, dont Tai Ho Wan, Tung Chung bay, Shui Hau, Lau Fau Shan, Ting Kok ou encore Yung Shue O, sur lesquelles travailler. "Nous avons déployé des collecteurs à naissain (bébé huitre, Ndlr) et étudions leur progression, explique la chef de projet. Nous récoltons également toutes les informations sur l'environnement qui les entoure, de la qualité de l'eau à la présence de différentes espèces."
Espèce-clé
Vivant dans les eaux salées, les estuaires et les ruisseaux, les huîtres sont considérées comme une espèce-clé de l'éco-système aquatique. "Elles jouent un rôle majeur de régulation, de support et d'approvisionnement des fonds marins !", rappelle Boze Hancock, spécialiste de la restauration marine et coordinateur en charge du projet*.
Grâce à leur façon de se développer les unes sur les autres, les huîtres forment des grappes denses communément appelées bancs ou récifs. Or ces derniers sont un rempart naturel: ils protègent les plages contre les tempêtes et les vagues, réduisent l'érosion du littoral et stabilisent les terres submergées en piégeant les sédiments.
"Les huîtres ont également cette faculté de filtrer l'eau", souligne Boze. Alors qu'elles se nourrissent de phytoplancton, elles éliminent dans le même temps certains nutriments, éléments chimiques et autres polluants de l'eau. Et l'expert de préciser qu'« une seule huître peut filtrer jusqu'à 50 gallons (190 Litres, Ndlr) d'eau par jour."
Enfin, les bancs d'huîtres sont aussi un habitat pour de nombreuses espèces telles que les moules ou les anémones de mer, accroissant ainsi la biodiversité. "Mais aussi la population de poissons, ajoute Marine Thomas. Protégés et nourris, ils font des récifs, leur nurserie."
Histoire
La protection des bancs ostréicoles à Hong Kong n'a pas qu'un intérêt écologique. "Qu'elle soit perlière ou comestible, l'huître a toujours fait partie de l'histoire de Hong Kong", rappelle Marine.
Si des bribes du passé sont aujourd'hui dispersées ça-et-là sur le territoire (à l'image d'Oyster Bay sur l'île de Lantau), le commerce de la fameuse sauce huître et la vente de la Golden Oyster au village de pêcheurs de Lau Fau Shan - Deep Bay, reste l'histoire la plus récente du coquillage sur le territoire.
Véritable héritage culturel, l'industrie ostréicole de la baie se bat aujourd'hui pour maintenir son activité. L'une des étapes du projet consiste à étudier cette industrie pour voir comment elle pourrait être aidée.
Si la restauration des récifs d'huîtres a commencé il y a une quinzaine d'années aux Etats-Unis, elle est totalement nouvelle à Hong Kong. "Il serait d'ailleurs plus juste de parler d'amélioration, car, faute de données suffisantes, nous ne savons pas vraiment quel était l'état réel des récifs autrefois." Il faudra donc s'armer de patience avant de voir de nouveaux bancs d'huîtres en nombre sur le littoral hongkongais : la collecte des données, première phase du projet (financée par la fondation J.P Morgan), devrait durer jusqu'en juin 2018. Après quoi, il faudra compter environ cinq ans pour que les récifs prennent forme.
Malgré leurs nombreux avantages, les bancs d'huîtres ont été décimés dans le monde entier, ces dernières décennies. En grande partie du fait du dragage industriel intensif, de la pollution, et de la surpêche. Alors que 20% du corail et 50% des mangroves ont disparu de la planète, les récifs ostréicoles atteignent le triste record de 85%. Ce qui fait d'eux l'habitat marin le plus en danger de la planète.
* le projet de restauration des récifs ostréicoles est réalisé par TNC, en partenariat avec le programme américain de restauration communautaire de l'ANAA, l'Administration Nationale Océanique et Atmosphérique.
Pour en savoir plus :
Consulter les projets de The Nature Conservancy
Vidéo (zen) sur la filtration de l'eau par deux espèces d'huîtres
(gauche: Crassostrea giga/ bac vide/ droite: Ostrea edulis)