''Le plastique, c'est fantastique !'' Plus vraiment. Des initiatives citoyennes aux nouvelles entreprises zéro déchet, Hong Kong se prépare à livrer une bataille qui s'annonce longue et ardue.
Hannah Chung l'a fait ! Pendant un an, cette trentenaire hongkongaise a banni de sa vie tout plastique inutile et non réutilisable pour atteindre le zéro déchet. « Il m'a fallu quelques semaines d'ajustement, mais après avoir réglé des points essentiels - tels que la boîte à lunch ou le gobelet réutilisable, et savoir où faire mes courses, ce fut beaucoup plus facile. »
Une démarche inspirante pour montrer aux Hongkongais qu'une autre vie, plus saine et pas forcément plus coûteuse, est possible. « Ce n'est pas une question de sacrifices, insiste la jeune femme. C'est avant tout regarder le système dans son ensemble, et voir ce que nous pouvons faire pour le modifier. Chaque action, même minime, compte. »
Future taxe
Commencer par réduire sa consommation serait déjà un immense pas en avant : À l'horizon 2020, toutes les décharges municipales, qui reçoivent quelques 2183 tonnes de plastiques par jour*, atteindront leur pleine capacité.
Une idée que partagent les politiques, le gouvernement prenant conscience de l'urgence de la situation. Plus tôt dans l'année, le bureau de l'Environnement a ainsi officiellement proposé une taxe de 11 cents par litre sur les poubelles collectées. La mesure, en discussion depuis longtemps, serait appliquée courant 2019. « Ces trente dernières années, les déchets solides municipaux ont augmenté de 80%, dépassant largement la croissance démographique, rappelle Wong Kam-sing, secrétaire pour l'Environnement. Nous croyons que cette mesure peut grandement lancer un mouvement de réduction des déchets. »
Les organisations environnementales sont, pour la plupart, d'accord avec cette idée, à condition toutefois que les infrastructures accompagnent le mouvement. « Vous ne pouvez pas verbaliser les gens sur le poids de leurs poubelles sans leur proposer une solution pour le réduire, souligne Tracey Read, à la tête de l'organisation non gouvernementale Plastic free seas. Il faut multiplier les points de collecte, le tri sélectif, sous peine de voir une augmentation accrue des décharges sauvages. » À commencer par la mer. Selon les derniers rapports en la matière**, plus de 15000 tonnes de déchets, dont deux-tiers de plastiques, sont retirées chaque année des eaux hongkongaises; des milliers d'autres tonnes restant dans l'océan, se déplaçant au gré des courants et des dépressions météorologiques.
Responsabilité des producteurs
Cette nouvelle taxe pourrait toutefois éveiller la colère des consommateurs. « On peut imaginer que les gens vont finir par se retourner vers ceux qui leur vendent des produits sur-emballés », espère Tracey, pour qui la responsabilité des producteurs et distributeurs n'est pas assez mise en cause. « Plus la pression sur les industries est forte, plus elles nous écoutent et finissent par agir. » À l'instar de City'Super : À la suite d'une pétition lancée notamment par Lisa Odell, de Plastic-Free HK***, la chaîne de distribution s'est dite ouverte aux suggestions pour réduire l'utilisation d'emballages plastique sur ses produits.
En marge de ces industries, certaines entreprises invitent, depuis plusieurs années, leur clientèle au développement durable. La chaîne de cafés Starbucks propose, par exemple, une réduction sur la boisson choisie si le client vient avec son propre contenant.
D'autres misent tout sur l'éco-responsabilité pro-active, offrant toute une gamme de produits sans plastiques, recyclables et réutilisables. Telles que Plastic-Free HK, mais aussi Delightfully Green, ou encore la petite dernière (française!) No!w – No Waste.
Autant de solutions qui sensibilisent les Hongkongais à cette lutte, notamment contre les produits à usage unique : Rien que sur le territoire, 5,2 millions de bouteilles plastique partent tous les jours à la poubelle.
Quelques chiffres :
- La production de plastique consomme, à elle seule, 12% des énergies fossiles.
- En 2050, il y aura plus de plastique que de poissons dans l'océan.
- 92% des plastiques retrouvés en mer restent sur les côtes, les 8% restants voguant au milieu des océans.
- Plus de 500 organisations non gouvernementales travaillent à l'éradication de la pollution plastique, sous le groupe international Break free from plastic.
*Soit 21% de la totalité des déchets solides de Hong Kong, et une hausse de 8,3% par rapport à l'année précédente (rapport gouvernemental sur les déchets solides municipaux de 2015).
**Rapport Mott MacDonald, Avril 2015, « Recherches sur les sources et destins des déchets marins de Hong Kong »; rapport Coastal Watch, Octobre 2016, « Retourner la marée contre les déchets marins ».
***Pétition lancée en début d'année, à destination des directeurs de Dairy Farm International Holdings Ltd. (Wellcome), de ParknShop CK Hutchison Holdings Ltd., et de CitySuper The Warf Holdings Ltd., et qui a récolté, à ce jour, un peu plus de 11000 signatures (lien ici)
Et pour en savoir plus : http://www.plasticfreeseas.org, l'initiative de Gary Stokes de Sea Shepard et celle lancée par la communauté française de Hong Kong "Sous les déchets, la plage" à lire dans nos recommandations ci-dessous.