De plus en plus impopulaire au sein de la population britannique, le Brexit reste un sujet explosif au Royaume-Uni, où le Premier ministre Rishi Sunak a dû démentir lundi des informations de presse prêtant au gouvernement la volonté d'assouplir les conditions de la sortie de l'UE.
"Laissez-moi être sans équivoque à ce sujet. Sous mon autorité, le Royaume-Uni ne cherchera aucune relation avec l'Europe qui repose sur l'alignement sur les lois de l'UE", a déclaré Rishi Sunak, pro-Brexit de la première heure, lors d'une conférence de la CBI, la principale organisation patronale du pays, ajoutant que le Brexit "apporte déjà d'importants bénéfices et opportunités pour le pays".
Le Royaume-Uni a quitté l'Union européenne en janvier 2021 après des années d'une bataille politique intense pour fixer les nouvelles relations entre les deux entités.
Dimanche, le Sunday Times avait affirmé que "des membres du gouvernement prévoient de mettre la Grande-Bretagne sur la voie d'une relation similaire à celle de la Suisse avec l'Union européenne". Une initiative qui serait "destinée à renforcer les liens économiques" avec l'UE.
Ces informations ont suscité un tollé parmi les partisans du Brexit. "Le gouvernement doit se concentrer sur ce qu'il doit faire, plutôt que d'essayer de rouvrir un débat déjà tranché sur l'Europe", a taclé le député conservateur Iain Duncan Smith dans les colonnes du Sun.
- trahison -
"Ne nous trahissez pas sur le Brexit", titrait lundi le quotidien populaire Daily Mail, grand défenseur de la sortie de l'UE.
Tentant de calmer la fronde, un porte-parole du gouvernement conservateur avait déjà démenti dimanche un tel projet, qualifiant l'article de "catégoriquement faux".
Et lundi matin, le secrétaire d'Etat à l'immigration Robert Jenrick a assuré que le Royaume-Uni avait désormais "une position bien définie" sur ses relations avec Bruxelles, avec l'accord conclu en 2019.
Le Royaume-Uni est ainsi sorti du marché unique, même si les échanges continuent d'être largement exempt de droits de douane, a mis fin à la liberté de mouvement et ne contribue plus financièrement à l'UE.
Mais la semaine dernière, les propos du ministre des Finances Jeremy Hunt, qui a indiqué souhaiter voir "la grande majorité" des barrières douanières abolies entre son pays et l'UE, avaient déjà suscité des interrogations sur les intentions du gouvernement.
D'autant qu'il négocie actuellement âprement avec Bruxelles une modification du protocole sur l'Irlande du Nord pour régler la question du statut de la province, en plein blocage politique.
Cette séquence "est intéressante car elle semble montrer que Rishi Sunak et Jeremy Hunt (...) admettent que le TCA (l'accord de commerce et de coopération signé entre l'UE et le Royaume-Uni) est mauvais pour l'économie. Mais le tollé et le démenti montrent à quel point il sera difficile pour un gouvernement conservateur d'admettre" cela, estime à l'AFP John Springford, chercheur au Centre for European reform, et opposé au Brexit.
Les Britanniques eux sont de plus en plus nombreux à regretter la sortie de l'UE. Selon un sondage publié par l'institut YouGov la semaine dernière, le soutien pour le Brexit est à son plus bas niveau, 56% des Britanniques estimant que c'était une erreur.
- immigration -
Cette polémique intervient alors que le pays traverse une crise économique et financière majeure. La plupart des économistes et des chefs d'entreprises voient dans le Brexit un facteur aggravant à la crise également due à la guerre en Ukraine.
L'organisme chargé des prévisions économiques (OBR) a notamment estimé la semaine dernière que le Brexit avait eu "un impact négatif important" sur les échanges commerciaux du pays.
Depuis sa sortie de l'Union européenne, le Royaume-Uni a dû resigner des accords commerciaux et en a notamment conclu avec l'UE et plusieurs pays européens, mais aussi avec la Nouvelle Zélande et l'Australie. Des discussions sont en cours avec l'Inde, le Canada ou les Etats-Unis.
Tranchant avec ses prédécesseurs pressés d'aboutir, Rishi Sunak a affirmé jeudi dernier que le Royaume-Uni devait "prendre le temps" de négocier de bons accords.
Le patronat britannique critique lui la rigidité des nouvelles règles migratoires, qui l'empêchent de trouver la main d'oeuvre dont les entreprises ont besoin. L'exécutif, qui a fait du contrôle des flux migratoires une priorité du Brexit, entend privilégier les profils les plus qualifiés.