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Tim, ambassadeur du Téléthon 2024 : “Chaque nouvelle marche est une nouvelle épreuve”

Tim a 26 ans et fait partie des familles ambassadrices du Téléthon 2024. À 21 ans, lui est diagnostiquée une maladie génétique rare et mystérieuse qui lui fait rapidement perdre une grande partie de la vision. Grâce au Téléthon, il a bénéficié d’un traitement de thérapie génique innovant qui lui a permis de retrouver une vue stable. Son parcours est celui d’un homme résilient, parcourant le monde malgré les défis que lui impose son handicap.

Tim, ambassadeur du Téléthon 2024, photographié dans un jardinTim, ambassadeur du Téléthon 2024, photographié dans un jardin
Écrit par Liz Fredon
Publié le 28 novembre 2024, mis à jour le 29 novembre 2024

 

 

À l’âge des choix et de l’autonomie, celui où l’on expérimente le monde adulte, la maladie a brusquement remis en question la stabilité de la vie de Tim. À seulement 21 ans, ce jeune strasbourgeois voit apparaître une tâche dans sa vision, logée dans un seul œil, à l’endroit exact où il vise. D’abord petite, cette tâche s’étend, grignotant ses repères visuels et son quotidien. Les rendez-vous avec des spécialistes s’enchaînent entre février et mai 2019.

 

“Arrivé à Strasbourg, j'ai commencé à comprendre que c'était plutôt sérieux quand j'avais quatre ophtalmos et trois neurologues rien que pour moi”


Transitant entre Haguenau et Strasbourg, c’est dans cette dernière ville qu’il prend connaissance de son diagnostic. La maladie a un nom : la neuropathie optique héréditaire de Leber ; une maladie très rare, considérée par les spécialistes comme mystérieuse. Dans sa famille, il n'y avait aucune trace d'une telle maladie. Pourtant, Tim ne s’effondre pas. À ce moment-là, il est encore capable d’aller seul à ses rendez-vous, de conduire, et achève son année sans difficultés.

 

La neuropathie optique héréditaire de Leber, ou LHON, est une maladie génétique rare qui provoque une perte rapide et importante de la vision, souvent chez des hommes jeunes âgés de 20 à 30 ans. Elle touche le nerf optique, essentiel pour transmettre les informations visuelles de l’œil au cerveau. Cette affection est liée à une mutation de l’ADN des mitochondries, les « centrales énergétiques » de nos cellules, et se transmet exclusivement par la mère. Cependant, tout le monde ne développe pas la maladie, même en portant cette mutation. Les symptômes commencent souvent de façon brutale, avec une perte de la vision centrale, alors que la vision périphérique reste en partie fonctionnelle, ce qui permet de se déplacer. La maladie se stabilise ensuite, et des cas de récupération spontanée, bien que rares, ont été observés. À ce jour, il n’existe pas de traitement curatif officiel. 


 

 

La chute dans l'inconnu

 

“Je continuais de faire comme si tout allait hyper bien”

Après un été parsemé de voyages, de concours pour sa poursuite d’études, et d’examens médicaux, l’étudiant rentre en école de commerce — à l'EM Strasbourg — en septembre 2019. Tout semble encore possible. “Surbooké, j’étais aussi dans une frustration assez étrange, puisque je ne savais pas vraiment à quoi m'attendre. Mais je n’ai pas mis mon avenir de côté pour autant.”, confie-t-il à propos de cette période chargée. Tim ne part pas défaitiste. Avec du recul, il subit peut-être une forme de déni.

Tim démarre son année normalement, mais perd rapidement la vue : “J'ai à peine eu le temps de connaître les lieux, d'appréhender correctement l'école. Un petit mois plus tard, mon deuxième œil a été atteint.” Plonger aussi brusquement dans le monde du handicap visuel demande une adaptation remarquable, mais c’est la force de l’accompagnement qui peut tout changer. Cette transition se fait dans l’urgence et la douleur, mais Tim peut compter sur le soutien de son école, qui aménage ses partiels sous forme d’entretiens individuels avec les professeurs. L'entourage de Tim l'accompagne et le soutient dans l'acceptation de sa maladie, un geste pour lequel il restera à jamais reconnaissant.

 

« Je n'avais aucun aménagement à ce moment-là. Ce n'est pas : “on perd la vue et puis tac, on connaît le braille, on nous donne un nouvel ordinateur, on connaît la synthèse vocale, etc” ».


 

Le défi de l’expatriation avec un handicap

 

Au cœur des difficultés, le jeune homme choisit de s’accrocher à ses rêves. L’un d’eux est d’étudier une année à l’étranger, un des atouts que propose son école. Il s’envole pour Montréal en août 2022, après avoir surmonté un labyrinthe administratif avec l’aide de sa sœur. Une fois sur place, HEC Montréal l’accueille à bras ouverts, débloque un budget pour des aménagements, et met tout en œuvre pour l’accompagner. Tim n’oubliera jamais la bienveillance de son interlocutrice, la responsable des échanges internationaux : “Elle est venue jusqu’à chez moi pour faire les premiers trajets ensemble.”

 

« La responsable handicap me disait “Tu ne te rends pas compte que j'ai des étudiants qui sont dans des situations largement moins mauvaises que toi et qui n'osent même pas mettre un pied à l'école. Ils n'ont pas du tout cette vie-là.” »

 

Dans cette nouvelle vie, Tim se redéfinit. À Montréal, il découvre un environnement académique qui prône la collaboration et se lie à ses colocataires français. Malgré les obstacles, il refuse de se mettre de côté, que ce soit en classe ou dans les montagnes québécoises. Randonnées, road trips jusqu’à Vancouver, Miami ou Boston, soirées entre amis, il profite de cette année plus que n’importe quel étudiant.

 

 


 

Un traitement porteur d’espoir grâce au Téléthon

 

Fin 2019, Tim reçoit un traitement expérimental élaboré par Gensight et financé par le Téléthon qui améliore sa vision centrale. Cette rémission change la donne un an après son injection, vers octobre 2020. “Je peux lire des panneaux, voir des visages... Sans ça, je ne pense pas que j’aurais osé partir à l’étranger.” Mais l’incertitude persiste, l’amélioration pourrait ne pas être stable. La maladie reviendra-t-elle ? Cette question hante certains de ses choix de vie, lui causant une certaine peur de l’engagement.

Le jeune homme reste lucide sur ses limites. “Je ne me mets pas de barrières, mais chaque nouvelle marche est une épreuve. Tout reste fragile.” Cette mentalité pousse Tim à envisager l’avenir avec prudence. Sur le plan professionnel, il oscille entre tirer parti de son diplôme en commerce ou se lancer dans une réorientation vers la kinésithérapie, un métier qu’il considère mieux adapté à ses capacités en cas de rechute. Cependant, il fait le choix de ne plus bâtir son avenir sur la peur de ce qu’il pourrait perdre, et explique avoir renoncé à cette perspective pour vivre davantage dans le moment présent. Il garde alors la possibilité de reprendre des études plus tard, si son état de santé ou ses aspirations évoluent.

 

“J'adorais faire du shopping avant, maintenant, beaucoup moins. Désormais, je peux passer cinq minutes dans le rayon des femmes sans me rendre compte et ne réaliser qu'après.”


 

 

Les difficultés quotidiennes du handicap visuel

 

Les difficultés liées à ce handicap visuel s’étendent au-delà de la perte de vision. Chaque tâche quotidienne, même la plus anodine, devient un défi. “Faire les courses, c’est une épreuve en soi. Identifier les produits, se repérer dans un magasin que je ne connais pas, tout cela peut prendre des heures.” Ses déplacements nécessitent une concentration constante, car son cerveau ne peut plus se fier à l’intuition naturelle de la vue pour éviter un obstacle. Il évoque aussi la frustration de devoir dépendre des autres pour des activités qu’il accomplissait autrefois en autonomie. Ces difficultés techniques s’accompagnent d’un poids psychologique profond : le besoin de solliciter de l’aide, l’effort permanent pour anticiper les imprévus, et l’impression, parfois, de ralentir ceux qui l’entourent.

Derrière ses exploits, comme le marathon dont il rentre tout juste, se cache une réalité quotidienne exigeante. Chaque tâche, des courses au simple fait de traverser une rue, demande une énergie mentale colossale. Le handicap est autant un combat qu’un révélateur. Il avoue : “Ce n’est pas parce que j’ai réussi l’Islande que je vais réussir l’Italie. Chaque expérience me pousse à me dépasser, mais tout reste fragile.”


 

Tim souriant devant un geizer en Islande

 


 

Malgré sa maladie, voyager pour s'évader

 

Pour Tim, voyager représente un espace de liberté où il s’autorise à penser à autre chose. Depuis son séjour linguistique aux États-Unis lorsqu’il avait 17 ans, son amour pour le voyage a pris une nouvelle ampleur. Il évoque avec enthousiasme les road trips dans le vaste Québec, les randonnées au milieu de ses forêts enneigées, et les pérégrinations jusqu’à Vancouver, le Monténégro, New York, l’Islande ou encore le Mexique. Chaque escapade est une manière pour lui de se prouver que tout est encore possible. “J'ai fait, avec mon meilleur ami, le cliché de me pointer à l'aéroport avec une valise sans savoir où nous allions. C’était un peu bête, nous l'avons fait pendant la période Covid. Nous avons fini en Serbie, 10 jours à Belgrade. C'était parfait.” confie-t-il en souriant.

 

Il raconte également avec humour les heures passées à organiser ses affaires ou à explorer des rayons de magasins qui lui échappent parfois. Son conseil principal à ceux qui, comme lui, voudraient voyager : commencer doucement et bien s’entourer. “Il faut partir avec des personnes de confiance, qui comprennent vos besoins, et surtout bien préparer chaque étape du voyage.”

 


 

Une douleur psychologique plus que physique

 

“La maladie et mon amélioration m'ont laissé juste assez de vision pour que ça ne se remarque pas. Juste assez aussi pour que je sois indépendant dans les tâches de tous les jours. Mais pas pour partir à l'étranger. Aussi, juste assez pour ne pas réellement voir la beauté de la vie sans faire d'efforts. Tout est effort, il n'y a pas un moment où on se lève et on se dit qu'on est bien.”

“C'est clair, je n'ai rien ressenti avec la perte de ma vision, mais c'est une maladie qui est très dure psychologiquement et en termes de perte de confiance en soi.” Son parcours est marqué par des incertitudes, mais le nouveau visage du Téléthon 2024 n’hésite pas à se projeter dans de nouveaux voyages, des projets professionnels, et conserve ses centres d’intérêts. Tout est possible, aussi bien dans le négatif que dans le positif.

On ne se rend compte de ce que l’on perd que lorsqu’on l’a vraiment perdu. Mais on peut aussi choisir de voir tout ce qu’on peut encore faire. Son témoignage est celui d’un jeune homme qui refuse de se laisser définir par sa maladie, préférant écrire une histoire où chaque pas est autant une bataille qu’une victoire.

Tim parle souvent de sa "chance dans la malchance", résumant bien la dualité de son expérience. Bien que confronté à une maladie rare, il a eu la possibilité de bénéficier d’un essai clinique qui a transformé son quotidien. Il l’attribue en partie cette opportunité au Téléthon, qu’il considère comme un "héros de l’ombre", ayant financé son traitement sans qu’il en soit conscient au départ. Ce sentiment de gratitude coexiste avec une certaine lucidité : tout n’est pas redevenu identique à sa vie d’avant, mais cette amélioration est une avancée précieuse et une source d’espoir pour lui et pour tant d’autres. Elle lui a permise de commencer une troisième vie.


 

Tim et son ami courent ensemble un marathon

 

 

 

Tim pour le Téléthon 2024

 

Tim fait partie des 5 ambassadeurs du Téléthon 2024. Il partage son histoire et insiste sur l'impact essentiel de la recherche médicale et de la générosité des donateurs. Il porte un message d'espoir en montrant que ces avancées profitent non seulement aux patients atteints de maladies rares, mais également à la recherche sur des pathologies plus répandues. Depuis qu’il est ambassadeur, il raconte avoir brisé une sorte de carapace d'insensibilité touchant de nombreux sujets. Cette expérience humaine l’a forgé, le rendant plus empathique et résolument tourné vers l’avenir.

Le rôle d’ambassadeur fait de lui un lien vivant entre les chercheurs, les donateurs et les malades, tout en sensibilisant le public à l'urgence des besoins financiers et humains pour continuer de faire progresser la recherche. Grâce aux dons, des personnes comme Tim se voient offrir une chance de reprendre pleine possession de leurs vies grâce aux traitements mis en place par les experts et expertes du Généthon. Les particuliers et les entreprises peuvent faire un don à l’association AFM-Téléthon qui finance le laboratoire Généthon. Pour faire un don unique ou régulier, cliquez ici


 

“J’aime beaucoup l’expression héros de l’ombre, car c’est ce que représente le Téléthon pour moi : une association bienveillante qui a financé mon traitement sans que je m’en rende compte.”

 

Tim se tient à côté de son affiche Téléthon, un verre à la main

 

 

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