Assurer l’éducation de centaines de jeunes dans un pays en guerre, c’est le défi relevé par le lycée français de Kiev. Récompensé par la Palme d’honneur en mars 2025, lors des Palmes du réseau d’enseignement français à l’étranger, son directeur, Virgile Moureaux, raconte le quotidien de l’établissement dans ce contexte si particulier.


Inauguré en septembre 1994, le lycée français Anne de Kiev est la seule école française homologuée par les ministères de l’Éducation nationale de France et d’Ukraine et conventionnée avec l’AEFE (Agence pour l'enseignement français à l'étranger). Malgré la guerre, l’établissement compte aujourd’hui 215 élèves : « Nous avions d'autres sites que nous avons abandonnés, car ils ne répondaient pas aux exigences de sécurité », nous explique Virgile Moureaux, directeur de l’établissement.

Un établissement réaménagé pour perdurer en temps de guerre
Le lycée français de Kiev est le seul établissement scolaire international qui est resté ouvert malgré la guerre. Un grand nombre d’établissements ukrainiens alternent entre présentiel et distanciel. Cette prouesse logistique est due à la participation de l’État français : « l’AEFE nous a subventionné pour pouvoir aménager les abris et les mettre aux normes », relate Virgile Moureaux. Dorénavant, en cas d’alerte, les élèves et leurs enseignants se mettent dans le sous-sol de l’école. Ces abris ne répondent pas uniquement à des besoins de sécurité : « On a aménagé des salles de classe. Ce n'est pas aussi confortable qu'une salle de classe, mais elles nous permettent de poursuivre les activités lorsqu'il y a des alertes aériennes », explique Virgile Moureaux. Les abris sont équipés de tableaux blancs, de vidéoprojecteurs et même d’eau et de nourriture. Grâce à son dispositif de sécurité, le lycée français de Kiev est devenu très attractif en Ukraine.

En classe, les élèves ne pensent pas à la guerre, ils pensent à étudier
L’école comme symbole de liberté
Le choix de maintenir l’établissement ouvert porte un message fort : « Il y a un symbole : montrer que la liberté se fait par l'éducation », assure Virgile Moureaux. L’ensemble de l’équipe pédagogique du lycée se démène chaque jour pour assurer la scolarité des élèves : « C'est une très grande responsabilité de recevoir des enfants dans ce contexte-là », confie Virgile Moureaux. L’une des grandes victoires de Virgile et son équipe est d’avoir réussi à faire du lycée français de Kiev un « bol d’air frais » au-delà du conflit : « En classe, les élèves ne pensent pas à la guerre, ils pensent à étudier », ajoute le directeur. Dans son essence, le lycée français de Kiev ne diffère en rien d’une école classique : « On poursuit toutes les activités externes, les spectacles de fin d'année, on fait une kermesse, une fête de fin d'année, des spectacles ». Certains élèves en viennent même à regretter lorsqu’ils sont absents : « Quand ils sont malades, ils ne veulent pas louper une journée de classe. Ils nous demandent : “Est-ce que je peux me connecter en ligne pour suivre la classe ?” Ça n'arrive nulle part ailleurs !” », souligne Virgile Moureaux avec un sentiment de fierté.

Un établissement reconnu pour son savoir-faire
Le 13 mars 2025, le lycée Anne de Kiev a reçu la Palme d’honneur lors de la cérémonie des Palmes de l’enseignement Français à l’étranger. Interrogé sur cette distinction, le directeur de l’établissement rend hommage à son équipe pédagogique : « C’est surtout une reconnaissance pour le travail des enseignants, cela prouve que l’établissement fonctionne bien malgré la situation. »
Les Palmes de l'enseignement français à l'étranger : un hommage aux professeurs

Cette cérémonie vise à récompenser les initiatives innovantes et exemplaires des établissements homologués à l’étranger, tout en mettant en lumière le travail des enseignants, du personnel administratif et des responsables pédagogiques. Elle est née à l’initiative de Samantha Cazebonne, sénatrice des Français établis hors de France.
Pour renforcer l’aspect symbolique de cette reconnaissance, ce sont les élèves qui ont récupéré le prix : « Je trouve que cela avait beaucoup plus de sens. Ce sont eux qui font l'histoire de l'établissement. » explique Virgile Moureaux. En ce début d’année scolaire, le lycée continue d’entreprendre des actions humanitaires à Kiev : « Nous faisons des collectes pour les enfants qui étaient en zone occupée, on organise aussi une course solidaire, sur le modèle de la course contre la faim. » Le lycée français de Kiev est un modèle de réussite des établissements français à l’étranger. Il rappelle à quel point l’éducation est primordiale et dans quelle mesure celle-ci peut apporter de l’espoir dans un contexte négatif.
Notre entretien avec Virgile Moureaux a malheureusement dû être interrompu par une alerte aérienne, comme un signe que la réalité finit toujours par nous rattraper.
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