Une organisation fluide, des compétitions enflammées et des (super) héros qui redéfinissent la performance. Les Jeux Paralympiques s’achèvent et marquent les (et nos) esprits de différentes manières…
C’est sans compter sur la présence de 45.000 volontaires et leur t-shirt turquoise ...
La fluidité de l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques
Métros bondés ? Files d’attente interminables ? Tickets d’entrée qui ne fonctionnent pas ? Labyrinthe sur les sites ? Que nenni ! Si les Jeux Olympiques ont déjà séduit les visiteurs par la fluidité de l’organisation, il en est de même pour les Paralympiques. Les panneaux se comptent par centaines, les métros parisiens sont toujours colorés de rose, l’attente est moindre…
Quant aux tickets d’entrée, une application mobile marche à la perfection, il suffit de présenter son QR code et les portes de l’Olympiade s’ouvre. C’est sans compter sur la présence de 45.000 volontaires et leur t-shirt turquoise : l’organisation est fluide. Des points d’informations sont un peu partout, là où il est possible de consulter le programme, s’informer sur les transports autour mais aussi se procurer un petit bracelet pour les enfants. Bien sûr, l’accessibilité est optimisée pour tous pour accéder aux sites de compétitions et venir encourager les 4.400 athlètes, en lice dans 549 épreuves au total.
"Tu caches des bonbons dans ta poche ?” souffle une volontaire à la sécurité à un enfant qui éclate de rire dans la foulée
Mais quelle ambiance incroyable aux Paralympiques de Paris !
On dit souvent que la première impression est importante, les volontaires des Jeux Paralympiques remplissent parfaitement ce rôle. Que ce soit à l’Arena Sud (pour les épreuves de Tennis de table ou de Goalball notamment) ou à Roland-Garros (pour le Tennis fauteuil), le spectateur est (ac)cueilli dès sa sortie de métro avec l’option maquillage et photos estampillées Jeux de Paris, un sourire aux lèvres en prime. Sur le trajet vers le lieu de compétition, des volontaires brandissent de grandes mains roses, haut parleur à la main “qui ne saute pas n’est pas Français” ou encore “vive les JO, vive vous, merci de venir de loin !”. Une fois sur place, quelques animations sont possibles, à l’instar d’un mini terrain de tennis avec des fauteuils roulants appropriés, pour se mettre dans la peau des para-champions. Cette fois, la file d’attente est importante.
À la sécurité, le sourire est de mise également, et la blague facile : “tu caches des bonbons dans ta poche ?” souffle une volontaire à la sécurité en faisant mine de fouiller un enfant qui éclate de rire dans la foulée. Dans les gradins, l’équipe organisatrice répond aux questions, oriente patiemment les supporters étrangers, propose parfois de changer de place pour mieux voir… Partout la fête se ressent et la bienveillance des volontaires y est pour beaucoup, pour énormément même.
Au sein des fans zones, les supporters se sont passés le mot pour venir soutenir les para-athlètes. Disposées aux quatre coins de Paris, la principale place pour suivre les performances de la France se situe à La Villette. Mais il faut dire que l’ambiance est moins incandescente que lors des Jeux Olympiques. Le Club France - nom de la fan zone des Bleus - a d’ailleurs réduit son espace de moitié en occupant seulement les Grandes Halles de La Villette.Fini aussi les longues files d’attente pour rentrer dans le Club France. Pour autant, le soir venu, les sportifs sont célébrés comme il se doit dans une chaleur qui rappelle que l’été olympique n’est pas encore terminé.
Des JO aux Paralympiques : est-ce que le soufflet est retombé ?
Sur le papier, il y avait de nombreuses raisons de croire que les Jeux Paralympiques n’allaient pas avoir la même attention que les Jeux Olympiques. La cérémonie de clôture de l’Olympiade le 11 août suivie de quinze jours de pause de Paris 2024 et d’une rentrée scolaire de septembre - toujours préoccupante dans notre vie quotidienne - auraient pu être fatales pour les Jeux Paralympiques.
Finalement, la fête sportive est repartie de plus belle après une cérémonie d’ouverture inclusive et spectaculaire disposée place de la Concorde. “Vous vous battez pour une cause qui vous dépasse. Vos armes à vous, ce sont les performances. Vos armes à vous, ce sont les records.” a acclamé le chef d’orchestre de Paris 2024 Tony Estanguet le mercredi 28 août au soir. Le rendez-vous des Paralympiques parfaitement lancé, les succès ne se sont pas fait attendre… notamment du côté de l’équipe de France. Après une semaine de compétition, les Bleus battent déjà leur record de médailles d’or (11) obtenues lors d’une Paralympiade - participant de fait à la magie de l’édition 2024.
La joie des spectateurs fait corps avec les performances des para-athlètes.
En nous rendant aux épreuves, il est également impossible de démontrer une défaillance d’intérêt avec les Jeux Olympiques. Sessions matinales comme celles nocturnes, en week-end comme en semaine, les spectateurs sont présents. L’Arena Bercy est pleine à craquer pour le basket fauteuil, avec plus de 12.700 curieux venus assister à l’entrée en compétition de l’équipe de France le 31 août - soit plus de fans que lors des JO de basket-ball. Quant au Stade de France, la capacité des 80.000 places est loin d’être acquise avec une tribune du haut totalement vide… De quoi dire que c’est un loupé ? Pas une seule seconde car la joie des spectateurs fait corps avec les performances des para-athlètes.
A compétitions paralympiques particulières, conditions particulières…
Les paralympiques ne sont pas des compétitions comme les autres. Pour certaines, le silence est de mise : au goalball par exemple à l’Arena Sud - sport collectif réservé aux joueurs déficients visuels - le public doit absolument faire preuve d’une rigueur absolue sur le bruit. Pour lui rappeler, l’arbitre signale en français et en anglais de se taire “quiet please, silence s’il vous plaît” avant chaque manche ou tir. Les volontaires, postés à chaque entrée ont des panneaux roses rappelant poliment le silence. Ce qui n'empêche pas les supporters de crier et exprimer leur joie dès que la partie, le set ou la manche se termine car les joueurs malvoyants ont, bien sûr, aussi besoin de leurs fans !
Autre alternative pour les supporters qui a particulièrement marqué les Paralympiques 2024, le soutien en silence. Lors d’une épreuve de cécifoot au pied de la Tour Eiffel le 2 septembre 2024 - Sport collectif d’opposition pour déficients visuels où l’objectif est de mettre un ballon sonore dans le but adverse à l’aide des pieds - l’équipe organisatrice a lancé une immense Ola silencieuse et au ralenti. L’image est magnifique et le moment très fort.
À la découverte de nouvelles disciplines sportives
Dans la catégorie des belles histoires de Paris 2024, nous demandons la victoire d’Aurélie Aubert en Boccia. Non, ce n’est ni de la boxe, ni un met italien… Mais une discipline s'apparentant à de la pétanque, jouée en intérieur sur une surface lisse avec des balles en cuir. Et dans ce domaine, la Normande Aurélie Aubert a brillé et s’est emparée à la surprise générale de la médaille d’or : la première remportée de l’histoire de la boccia française. Plus que l’or paralympique apporté à l’équipe de France, la para-athlète de 27 ans a procuré une émotion sans pareille. La meilleure manière de mettre en lumière un handisport qui n’a pas d’équivalent en sport valide.
Cousin du handball et du bowling, le goalball est une découverte lors des Paralympiques. Cette discipline, sur le site de l’Arena Sud, est un sport collectif réservé aux joueurs déficients visuels. Les équipes sont composées de 3 joueurs et 3 remplaçants. Le but est de lancer la balle - qui émet seulement le son du roulement sur le terrain - vers le camp adverse et marquer. Deux mi-temps composent le match, chacune de 12 minutes. En cas d’égalité, une séance de pénalty a lieu comme cela a été le cas pour l’équipe féminine française face à la Corée du Sud le 4 septembre 2024. Malheureusement, les bleues se sont inclinées, et s’affichent en 8ème position. Une très belle découverte qui mériterait, - comme d’autres disciplines- encore plus de visibilité, tant les capacités de concentration, d’agilité et de perception de l’espace sont demandées aux joueurs…du vrai art sportif.
Un visage : Markus Rehm, le sauteur en longueur qui surpasse les valides
Le “Blade Jumper” allemand a encore frappé ! Markus Rehm a remporté à Paris 2024 sa quatrième médaille d’or paralympique consécutive en saut en longueur - et sixième médaille paralympique de sa carrière.
À 36 ans, Markus Rehm a survolé la compétition en alignant trois sauts à plus de 8 mètres (8.04 mètres par deux fois, 8.13 mètres au 5e essai). Un exploit puisqu’aucun autre de ses concurrents n'a pu atteindre cette distance. Mercredi 4 septembre, 22h passée, Markus Rehm a ainsi fait sonner la cloche du Stade de France - qui sera installée sur le clocher de la cathédrale Notre Dame - officialisant son sacre dans la capitale française.
Plus que le résultat étincelant de l’Allemand, c’est la beauté du geste, de sa course d’élan à son impulsion aussi féroce que gracieuse qui nous ont émerveillé. Et nous n’étions pas les seuls à être tombé sous le charme de Markus Rehm. Assises devant nous en tribunes, un groupe de jeunes allemandes s’étaient déplacées en nombre pour soutenir la star de la discipline : celui qui a gagné son premier championnat du monde en 2011, qui a réalisé un saut à 8.73 mètres en 2023… et qui pourrait dépasser le record des valides détenu par Mike Powell (8.95 mètres, datant de 1991).
Après les Jeux de Londres en 2012, 81% des Britanniques estimaient que l’accueil des Jeux paralympiques avait changé positivement la manière dont les citoyens en situation de handicap étaient considérés. Un chiffre que Paris a bien l’intention d’égaler
Un regard sur le handicap qui change et qui évolue
Après les Jeux de Londres en 2012, 81% des Britanniques estimaient que l’accueil des Jeux paralympiques avait changé positivement la manière dont les citoyens en situation de handicap étaient considérés. Un chiffre que Paris a bien l’intention d’égaler, et même de surpasser. Accueillant environ 350.000 visiteurs en situation de handicap et plus de 4.000 sportifs paralympiques, l’accessibilité et la société inclusive sont au cœur de l’organisation.
Mais qu’en est-il de la perception pendant les Jeux ? Des milliers de jeunes ont assisté aux épreuves dans le cadre d’une sortie scolaire ou en compagnie de leurs parents. Nul doute qu’ils aient été impressionnés par les champions paralympiques :“Maman, comment il fait pour tenir sa raquette en même temps d’avancer son fauteuil ?” “Elle a un bandeau sur les yeux…comment elle fait pour voir la balle ?” “Tu as vu la vidéo du Brésilien qui nage comme un dauphin ?” “Moi aussi je veux faire du tir à l’arc un jour” entend-on dans les gradins des sites de compétition.
Des héros autrement super et autrement capables ont véhiculé pendant deux semaines des preuves de tolérance et de détermination, comme le rappelle Tony Estanguet dans son discours d’ouverture :
“Comme tous les athlètes, vous vous êtes entraînés, vous avez sué, vous avez échoué, vous vous êtes relevés…(...) Ce qui fait de vous des révolutionnaires, c’est que quand on vous a dit “non”, vous avez continué. Quand on vous a dit « handicap», vous avez répondu : «performance”. Quand on vous a dit que c’était impossible, vous l’avez fait.”