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Mathilde Ollivier : « En France ou à l’étranger, la jeunesse doit s’engager »

Mathilde Ollivier est « en phase d’installation », comme elle nous le fait remarquer lors de notre rencontre au Sénat. La benjamine du Sénat a pourtant déjà une vision claire de son mandat, nourrie certainement de son expérience de conseillère des Français de l’étranger. La sénatrice EELV met l’écologie au centre d’une réflexion riche sur ses thématiques de prédilection : les enjeux climatiques, bien entendu, mais aussi l’engagement européen, la diversité culturelle ou encore les affaires sociales.

mathilde ollivier, sénatrice des Français établis hors de Francemathilde ollivier, sénatrice des Français établis hors de France
Écrit par Damien Bouhours
Publié le 1 novembre 2023, mis à jour le 4 novembre 2023

L’électorat écologiste est fort chez les Français de l’étranger

 

Vous êtes la deuxième élue EELV au Sénat pour les Français établis hors de France. Est-ce un signe de la prise de conscience écologique mais aussi politique des Français de l’étranger ?

Comme nous avons pu le constater lors des dernières élections, que ce soient aux sénatoriales ou aux législatives, l’électorat écologiste est fort chez les Français de l’étranger. Globalement, je pense qu'il y a vraiment une prise de conscience chez les Français de l'étranger par rapport au dérèglement climatique. Les Français de l’étranger y sont confrontés au quotidien et subissent l’impact d’évènements climatiques de plus en plus intenses. Ils ont également une vision plus globale des enjeux climatiques. Avec leur ouverture sur une diversité de représentations politiques, les Français de l’étranger sont aussi davantage prêts à voter pour des partis plus minoritaires. Avec deux sénatrices et un député représentant les Français de l’étranger, la voix écologiste peut être entendue au sein du Parlement.

 

Je pense que mon élection est un signal fort pour montrer la diversité des Français de l’étranger

 

A 29 ans, vous êtes la plus jeune sénatrice de France alors que la moyenne d’âge tourne plutôt autour de 59 ans. Est-ce que cela vous pousse aussi à vouloir porter davantage la voix de votre génération au sein du Parlement ?

Il s’agit vraiment d’une des bases de mon engagement. J’étais d’ailleurs déjà la benjamine lorsque j’étais conseillère des Français de l’étranger en Autriche. Je pense que mon élection est un signal fort pour montrer la diversité des Français de l’étranger, qui englobe la jeunesse, tout comme les expatriés de longue date ou encore les binationaux. La communauté française à l’étranger est réellement en train d’évoluer et de se transformer.

Il est aussi important de montrer au niveau national qu’il est possible de s’engager dans la démocratie locale. En France ou à l’étranger, la jeunesse doit s’engager, que ce soit dans le débat politique mais aussi au niveau social ou associatif. L’écologie et la lutte contre le changement climatique ont été pour moi le déclencheur de cet engagement en politique, qui m’apporte encore beaucoup aujourd’hui.

 

L’AFE a besoin de prérogatives qui ne soient pas uniquement consultatives mais aussi vraiment délibératives

 

La 39ème session de l’Assemblée des Français de l’étranger vient de se terminer. Quel est votre avis sur le rôle et la place de l’AFE aujourd’hui ?

Je pense que tous les conseillers sont unanimes pour dire que, peu importe son groupe politique, l’Assemblée des Français de l’étranger n’est pas assez entendue. L’AFE a besoin de prérogatives qui ne soient pas uniquement consultatives mais aussi vraiment délibératives. Les conseillers AFE viennent deux semaines par an à Paris et travaillent sur des sujets de fond. Nous aimerions que ce travail soit repris par les politiques mais aussi par le ministère des Affaires étrangères. Il faudrait élargir les compétences des élus sur le terrain, sur des sujets comme celui des aides sociales, qui me tient particulièrement à coeur. Le rôle des conseillers des Français de l’étranger reste très opaque pour nos concitoyens alors qu’ils s’investissement énormément dans leur rôle en temps mais aussi financièrement. Il est donc essentiel de renforcer la représentation locale mais aussi faciliter leur mandat en les aidant davantage, pour permettre notamment aux jeunes de vouloir s’investir dans la démocratie locale.

 

Les décisions prises au niveau européen ont une portée internationale

 

Vous êtes vice-présidente de la commission des Affaires européennes, à l’approche des élections européennes, quels sont les moyens de mobiliser les Français et en particulier ceux de l’étranger envers cette élection où l’abstention fait rage ?

Il était important pour moi de siéger à la commission des Affaires européennes pour garder une vision politique plus globale. Les élections européennes présentent deux enjeux pour moi : mobiliser les Français de l’étranger qu’ils vivent en Europe ou non, mais aussi savoir si les Français vivant en Europe voteront pour des listes françaises ou locales.

Les décisions prises au niveau européen ont une portée internationale. Il est donc important de mobiliser les Français hors Europe pour qu’ils fassent entendre leur voix. L’Europe est moteur sur des sujets comme les standards d’utilisation des données ou encore sur les politiques de rayonnement et de diversité culturels. La diplomatie française est également ancrée dans la diplomatie européenne. Nous réfléchissions aujourd’hui aux crises, comme celle en Ukraine ou sur la bande de Gaza, au niveau européen. Il y a plein d'enjeux aussi sur la manière dont on réfléchit les crises ensemble au niveau européen. Je pense que les Français de l'étranger y sont aussi sensibles mais doivent voter pour se faire entendre. En tant que Français de l’étranger, nous sommes au coeur des conflits et des crises. Lors de la guerre en Ukraine, les Français se sont mobilisés au quotidien pour aider ceux qui fuyaient. Ils sont particulièrement conscients que derrière tous les grands événements et les grandes crises, il y a des vies humaines.

 

Je veux réfléchir aux leviers qui nous permettront de soutenir plus globalement la culture dans sa diversité

 

Vous êtes également membre de la Commission de la culture, de l'éducation et de la communication. A quel point ces sujets sont-ils essentiels pour les Français de l’étranger ?

Je vais suivre et soutenir pendant mon mandat les écoles françaises à l’étranger. Je souhaite rencontrer les personnels, les syndicats et les parents d’élèves, comme je le ferai aussi pour le tissu associatif français ou encore les acteurs économiques. L’enseignement supérieur me tient également à coeur. Je travaille sur une proposition de loi sur le bien-être de la jeunesse et la précarité étudiante. Je souhaite, avec ma collègue écologiste Monique de Marco, proposer une allocation universelle d’étude pour les étudiants et les apprentis.

Je m’intéresse aussi à toutes les questions liées à la recherche. Nous devons réfléchir à une politique de recherche et d’innovation qui soit en adéquation avec les enjeux environnementaux d’aujourd’hui et de demain. Nous devons agir dans la bonne direction pour pouvoir répondre aux défis climatiques et de biodiversité.

Je veux également réfléchir aux leviers qui nous permettront de soutenir plus globalement la culture dans sa diversité. Je pense qu'en tant que Français de l'étranger, nous avons cette perspective d'une culture francophone diverse, mais cela signifie aussi permettre aux artistes francophones de pouvoir venir en France. Nous devons aussi pouvoir financer les cultures urbaines et alternatives pour développer encore davantage les échanges interculturels dans toute leur diversité.  Le soutien aux Instituts français est un sujet primordial pour les Français de l’étranger. La question du financement privé m’interpelle également. Il ne faut pas accepter que des conférences sur la biodiversité soient organisées dans nos Instituts par des entreprises françaises qui ne se placent que dans une démarche de greenwashing. Cela implique également que nous devons financer davantage nos centres culturels pour qu’ils ne soient pas dépendants du secteur privé.

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