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#Blockout2024 : influenceurs, les limites de l'engagement

Tout droit venu des États-Unis, le mouvement #Blackout2024 bouleverse la toile française. Les influenceurs et célébrités sont vivement critiqués pour leur silence face au conflit de la Bande de Gaza. Accusées de privilégier leur image au détriment des causes humanitaires, les stars se retrouvent dans un dilemme politique, social… et commercial.

BLOCKOUT2024BLOCKOUT2024
Écrit par Elena Rouet-Sanchez
Publié le 20 mai 2024, mis à jour le 22 mai 2024

« Le silence est complicité ». À la mi-mai 2024, un phénomène politique et social s’empare des réseaux sociaux et s’attaque aux influenceurs et personnalités du monde entier : le #Blockout2024. Les utilisateurs reprochent à leurs stars préférées de ne pas profiter de leur notoriété pour s’exprimer sur le conflit actuel de la Bande de Gaza. Squeezie, Léna Situations, Inoxtag, mais aussi les stars du grand écran Géraldine Nakache, Pierre Niney ou Camille Lellouche. La liste est longue
Les influenceurs ont-ils aussi le rôle d’influencer sur leur opinion ? 

 

@kimberleyonline

‼️Part 2 of this Week's Block List of Celebrities for the Blockout 2024 - do it and do it UNPOLOGETICALLY.

♬ original sound - ♡ Kim ♡ | Commentary & Content

 

Met Gala 2024 : le mépris des stars internationales 

Alors que pas moins de 700 stars mondiales foulaient le prestigieux tapis rouge du Metropolitan Museum of Art à New York, le lundi 6 mai 2024, Israël prenait le contrôle du seul point d’entrée pour l’aide humanitaire à Gaza. Après le boycott de grandes firmes accusées de soutenir Israël (Mcdonald's, Starbucks, Coca Cola), le phénomène, venu des États-Unis, s’étend sur les personnalités publiques. Toutes vêtues de leur plus luxueuses tenues, les stars sont accusées de se délecter dans leurs privilèges plutôt que de prendre part à des causes importantes. 

 

Hayley Baylee au Met Gala, en Marie-Antoinette
Hayley Baylee au Met Gala, en Marie-Antoinette 

 

À l’origine de ce « bad buzz », l’influenceuse américaine Haley Baylee. La jeune femme, qui cumule près de 10 millions d’abonnés sur TikTok, est parue devant les caméras dans une tenue inspirée de Marie-Antoinette. Dans un TikTok, elle reprend la célèbre phrase, inspirée du film de Sofia Coppola Marie Antoinette, « Let them eat cake ». Une expression qui ferait référence à la phrase énoncée par l’ancienne Reine de France juste avant la Révolution française, « S'ils n'ont pas de pain, qu'ils mangent de la brioche » - qui est historiquement fausse. Furieux, ses abonnés ont considéré sa vidéo comme un véritable mépris en vue de la situation actuelle en Palestine.

« On comprend derrière ce mouvement un agacement général vis-à-vis de cette vision méprisante des influenceurs, explique Stéphane Vojetta, député de la cinquième circonscription des Français de l’Étranger, à l’origine de la Loi Influenceur. Les internautes décident alors de les bloquer, lassés que ces influenceurs imposent un mode de vie focalisé sur la possession. ».

 

« Loi influenceurs » : neuf mois après son adoption, où en est-on ?

 

L’Appel au boycott en France

Kim Kardashian, Taylor Swift, Beyoncé : le phénomène dépasse l'événement du Met Gala, et s’attaque aux personnalités du monde entier. « Une véritable guillotine numérique », peut-on lire dans les médias. Et la France n’y échappe pas : Squeezie, Léna Situations, Inoxtag, mais aussi les stars du cinéma français, des personnalités politiques ou des journalistes, à l’image de Léa Salamé ou Hugo Clément. Accusés d’avoir des propos « pro-israël », de rester dans le silence vis-à-vis de la Palestine, mais aussi de faire la publicité de marques « pro-israëliennes », à l’image de la Youtubeuse Océane, avec sa dernière vidéo en partenariat avec Coca Cola. « Vous vous sentez démunis face à cette situation, vous n’êtes pas seuls, moi aussi. » a-t-elle défendu sur TikTok. 
 

 

Pour d’autres, il n’est jamais trop tard pour parler : la chanteuse américaine Lizzo a partagé sur son compte Instagram une vidéo où elle invite ses abonnés à collecter des fonds pour aider un médecin à Gaza, mais aussi pour venir en aide à d’autres pays comme le Congo ou le Soudan. « Voilà à quoi devrait servir les plateformes, merci Lizzo ! », peut-on lire dans les commentaires. La créatrice de contenu française Léna Mahfouf a elle-aussi partagé les liens de plusieurs cagnottes dans sa story, mais certains utilisateurs ne sont cependant pas de cet avis : « Léna Situations, silence radio depuis 8 mois, qui poste 2 cagnottes pour les victimes palestiniennes ce matin parce qu’elle a peur de se faire bloquer depuis les annonces au blocage. ». 

 

 

« J’ai vu le mouvement de « blockout » aux États-Unis, et je me suis dis que la France devait aussi prendre le pas, explique « Emokhage », de son vrai nom Alena, influenceuse beauté, aux contenus aussi ouvertement engagés. ». Sur Twitter, la jeune femme âgée de 21 ans a crée le « buzz », en partageant notamment une liste de créateurs de contenu français, à qui elle demandait de partager des cagnottes pour des familles palestiniennes. « Je me suis dis que je devais faire jouer mes réseaux, ce qui a suscité une certaine pression pour certains d’entre eux. Certains m’ont répondu, d’autres ont ignoré mes messages. L’objectif n’est pas nécessairement de pousser les personnes à les bloquer ; mais quand on est influenceur, je pense qu’il faut aussi avoir une forme de connaissance politique, mais surtout, une part d’humanité. ».

 


Le rôle des influenceurs sur les réseaux sociaux : entre loi et pression sociale

Les influenceurs sont-ils légitimes d’user de leurs influences ? Que dit la loi à ce sujet ? « Ils peuvent, s’ils le souhaitent, explique Stéphane Vojetta. Mais ils doivent le dire ouvertement, comme le demande la Loi Influenceur. Mais les bloquer en fonction de leurs opinions personnelles ou de leur volonté de ne pas s’exprimer, ça ne fera pas grandir les réseaux sociaux. ».

Méconnaissance ou désintérêt de la situation actuelle, mais aussi la peur de perdre des partenariats, et donc, de l’argent. « Depuis mon engagement, je n’ai reçu qu’une demande de collaboration depuis novembre, témoigne Alena, qui cumule plus de 250.000 abonnés sur TikTok. Certaines de mes amies ont même vu leur contrat se rompre avec certaines grandes marques, à l’image de Nyx, appartenant au groupe L’Oréal, pour leur engagement sur les réseaux. Pour de petits influenceurs qui dépendent de cette activité, cela peut s'avérer contraignant. Mais pour ceux qui enchaînent les contrats à plus de cinq chiffres, je pense qu’ils peuvent se passer de ces collaborations. Faire de la publicité pour des marques comme Coca Cola, c’est aussi, d’une certaine manière, faire passer un message politique. »

Le lendemain des attaques meurtrières du 7 octobre 2023, la célèbre créatrice de contenu française Léna Mahfouf partage des publications dans sa story, en soutien aux victimes israéliennes et palestiniennes. Un engagement aux conséquences graves, puisque la jeune femme reçoit par la suite des menaces de morts, et certaines personnes se rendent même à son domicile. 
« Ce sont toujours les mêmes qui prennent en premier : Léna, Squeezie, sa copine Chloé Gervais, poursuit Aléna. Il y a aussi un peu de l’acharnement mêlé à de la misogynie ; MisterV, qui a très récemment collaboré avec KFC, ne s’est pas pris cette même soufflante. »


Au total, plus d’une centaine de personnalités françaises sont concernées par ce boycott général. « Continuez : ça marche vraiment bien ce boycott ! », se réjouissent de nombreuses personnes sur Twitter ou TikTok. Selon le site SocialBlade, Kim Kardashian a déjà perdu, à elle seule, 814.000 abonnés sur Instagram en un mois. 
 

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