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« Loi influenceurs » : neuf mois après son adoption, où en est-on ?

Les députés Stéphane Vojetta, Louise Morel et Arthur Delaporte, ont présenté le rapport d’application de la « Loi influenceurs », adoptée en juin 2023, devant l’Assemblée nationale. Malgré des avancées notables, notamment une augmentation des contrôles, la question des moyens humains notamment, du côté de la DGCCRF, reste un sujet préoccupant : “J’ai de la compassion pour les pauvres agents qui font ce qu’ils peuvent et qui essaient d’écumer la mer.”

Rapport de la loi influenceursRapport de la loi influenceurs
Écrit par Elena Rouet-Sanchez
Publié le 14 mars 2024, mis à jour le 17 mai 2024

Les députés Arthur Delaporte (PS),  Louise Morel (MoDem) et le député des Français de l’étranger de la péninsule ibérique, Stéphane Vojetta (Renaissance) ont présenté mercredi 13 mars le rapport d’application de la Loi influenceurs à l’Assemblée nationale. Depuis son entrée en vigueur en juin 2023, la Loi Influenceurs a marqué un tournant dans la régulation de l’influence commerciale et des réseaux sociaux en France, par les créateurs de contenu. Saluée comme une avancée majeure sur beaucoup de points, certains défis persistent et les moyens manquent. 
 

La Loi influenceurs en quelques chiffres : 
- 75 % des créateurs de contenu déclarent avoir connaissance de la loi 
- 56 % des créateurs de contenu estiment que la loi va dans le bon sens
- 55 % pour les annonceurs
- 75 % pour les consommateurs

 

212 contrôles en 2023, contre seulement 94 en 2022

Neuf mois se sont écoulés depuis que la loi sur les influenceurs a été adoptée en France. L’objectif premier des députés Arthur Delaporte, Louise Morel, Stéphane Vojetta et Virginie Duby-Muller, était d’instaurer un cadre juridique clair, définissant l’activité d’influence commerciale ainsi que le statut d’influenceur en lui-même. Elle encadre également un ensemble de pratiques visant à garantir la transparence et la protection des parties prenantes : « Je souhaitais également saluer les influenceurs eux-mêmes qui ont fait évoluer leurs pratiques », a déclaré Arthur Laporte. 

Des résultats plutôt satisfaisants, puisqu’en 2023, 212 contrôles ont été effectués par la Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF), contre seulement 94 en 2022, avant l’application de la loi. De plus, une hausse significative du hashtag « #collaborationcommerciale » a été analysé sur les réseaux, particulièrement sur Instagram.

 

Loi Influenceur

 

Loi influenceurs : un bilan plutôt mitigé 

Des contrôles qui augmentent, mais qui restent insuffisants. Si cette loi note de nombreuses avancées ainsi que des innovations juridiques, telles que l’interdiction de faire la promotion de la chirurgie esthétique, d’importants défis demeurent. La DGCCRF relève plus de 2.000 signalements pour une équipe d’une trentaine de personnes seulement : « Ces équipes ne sont même pas à plein temps et sont missionnées sur d’autres sujets durant leurs journées, déplore Arthur Delaporte. J’ai de la compassion pour les pauvres agents qui font ce qu’ils peuvent et qui essaient d’écumer la mer. ».

 

Autre fait préoccupant pour les députés : celui des « matchs TikTok ». Si la loi tente de s’adapter au maximum au monde de l’influence d’aujourd’hui, les réseaux sociaux et tendances numériques semblent évoluer à un rythme bien plus effréné. Durant ces lives TikTok, deux influenceurs au minimum, parfois plusieurs, s’affrontent dans l’objectif de recevoir le plus de likes, mais aussi le plus de cadeaux virtuels. Mais ces cadeaux sont payants, et leurs prix peuvent varier d’un centime à plusieurs centaines d’euros, qui sont ensuite convertis et gagnés par les influenceurs. Si les mineurs n’ont pas l’autorisation de créer ou de participer à ces « matchs TikTok », ils peuvent cependant y assister : « J’ai récemment rendu visite à une classe de troisième, et plus de 50 % d’entre eux m’ont affirmé avoir déjà assisté à un live TikTok, raconte avec stupeur Arthur Delaporte. La moitié d’entre eux y avait déjà dépensé de l’argent. ».


 

Loi Influenceurs Français expatriés

 

Loi influenceurs : qu’en est-il pour les Français de l’étranger ?

L’un des aspects spécifique de cette loi réside aussi dans son caractère « extraterritorial », comme l’a souligné le député de la 5e circonscription Stéphane Vojetta : « À partir du moment où les influenceurs s’adressent au marché français, où qu’ils soient, ils doivent respecter un certain nombre de règles, et notamment la Loi influenceurs. ». 

Seulement aujourd’hui, les Français établis hors de France, influenceurs comme consommateurs, ne peuvent bénéficier des bienfaits de cette loi, étant soumis à la législation de leur pays. Certains de ces aspects doivent en conséquent être révisés pour se conformer au cadre européen, ce qui retarde de plus la publication de décrets nécessaires à son application complète. Néanmoins, des discussions sont actuellement en cours au niveau de l’Union européenne, pour harmoniser les réglementations sur l’influence commerciale à l’échelle du continent.

« Je me réjouis de constater que la Loi influenceurs, à l’initiative française, a une répercussion à l’échelle mondiale, et en particulier à l’échelle européenne, ajoute cependant Stéphane Vojetta. C’est une problématique que j’ai largement débattue avec mes collègues parlementaires espagnols notamment, qui me rejoignent sur le sujet. L’Espagne, mais aussi l’Italie, comptent reprendre une partie de notre texte et l’adapter à leur cadre législatif national, qui sera étudié par leur Parlement lors de ce premier trimestre. ».

 

Aujourd’hui, beaucoup d’influenceurs choisissent de quitter la France pour échapper à ces restrictions, ainsi qu’à la fiscalité française. L’une des destinations les plus prisées reste la ville de Dubaï, devenue terre de refuge pour les créateurs de contenu comme Nabilla, Jazz ou plus récemment, Poupette Kenza, qui s’en était publiquement ravie dans sa story Snapchat : « Des gros voleurs, j'ai les nerfs, c'est du vol ! Je suis bien contente de partir et vous donner 0 impôt. Vous m'avez bien pouillée avant de partir », avait-elle exprimé, en réponse à la sanction de 50.000 euros de la part de la DGCCRF à son encontre.

 

Malgré ces difficultés, Stéphane Vojetta a assuré que « la Loi influenceurs n'est pas en danger » et que le texte « doit être modifié à la marge » mais ne perdra « en aucun cas » son effectivité. 

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