La France est-elle toujours le pays le plus attractif d’Europe ? Pas si sûr en novembre 2024 selon le dernier baromètre de l'Attractivité de la France publié par EY. 50% des dirigeants estiment que l’attrait de l’Hexagone s’est dégradé… mais enfin, pourquoi ?
Le baromètre de l'Attractivité de la France a parlé : l’attrait français se dégrade depuis quelques mois aux dires de 50% des 200 dirigeants internationaux interrogés par EY en octobre 2024*. Pour y voir plus clair, lepetitjournal.com a interrogé Marc Lhermitte, associé chez EY et responsable au plan mondial des activités liées à la compétitivité et à l'attractivité :”sur le territoire français, les entreprises sont en attente, certaines sont inquiètes mais aucune n’est désespérée.”
Son attractivité en jeu, la France dévoile ses cartes en 2024
La situation politique en France incertaine inquiète
Les préoccupations sont fortement liées à la dissolution de l’Assemblée nationale et la situation politique: 59% des dirigeants se disent inquiets par les incertitudes législatives et réglementaires. Comment bâtir des business plans solides lorsque l’on ne sait ce que le lendemain politique sera fait ? 21% sont très inquiets de l’absence d’interlocuteurs clés…
Conséquence directe d’une remise à zéro des élus et du gouvernement lors des législatives anticipées de juillet 2024, le ralentissement des réformes : De grandes décisions autour de la simplification administrative, des retraites, de l’industrie, du monde agricole sont en suspens, sans oublier, bien sûr, le contexte budgétaire sensible et tendu. Entre 20 et 30% des dirigeants s’inquiètent du coût du travail en France notamment dans les mois à venir.
Les investisseurs étrangers n’aiment pas, par dessus tout, l’incertitude fiscale.
En France, selon l’INSEE, 17.500 entreprises sont sous contrôle étranger (0,04% des entreprises) et emploient 2,2 millions de personnes, soit 13% de l’emploi salarié. En 2023, elles ont été responsables de 400 investissements industriels, dont environ 40% dans des villes moyennes
Des réserves sur l’implantation et des reports de décisions
Sur la base des interrogations, 84% des dirigeants internationaux ont déclaré avoir reporté des décisions à 2025, au moins. “Le cadre change en France et de nouvelles règles du jeu, notamment fiscales, sont attendues. Les investisseurs n’étaient pas forcément habitués à ça jusque-là et ils n’aiment pas, par dessus tout, l’incertitude fiscale. Celle-ci doit se résoudre d’ici fin novembre 2024” explique Marc Lhermitte.
Bonnes nouvelles, le baromètre EY indique qu’à ce jour, “aucune entreprise étrangère n’a annulé ses investissements dans l’Hexagone” et qu’il est “trop tôt pour évaluer l’impact réel sur les montants investis en 2024”. D’ici 2027, plus de 60% prévoient de développer des activités de R&D ou de services en France et 49% envisagent toujours des implantations ou extension d’usines sur le territoire français.
Le Royaume-Uni est un formidable compétiteur de la France
Mais que faire pour que la France reste attractive ?
Face aux ambitions chinoises et au protectionnisme américain, le vieux continent semble encore avoir les faveurs des investisseurs étrangers ; c’est l’avis de 64% des dirigeants internationaux interrogés. En Europe, le Royaume-Uni semble d’ailleurs tirer son épingle du jeu de l’attractivité, 42% des répondants considèrent que le pays est plus attirant économiquement qu’il y a 6 mois. “Le Royaume-Uni est le concurrent frontal de la France en termes d’accueil d’investisseurs étrangers. C’est un formidable compétiteur ! Le pays vit un boost d’investissements internationaux mais je ne dirai pas qu’il prend la place de leader encore, il est trop tôt pour le dire. A la différence de la France, le Royaume-Uni est sorti de l’incertitude du cadre de jeu business.” souligne Marc Lhermitte. En revanche, selon le baromètre, “l’Allemagne est évaluée plus négativement que la France.”
Mais que doit faire la France pour rester dans la course à l’attractivité et rester le pays le plus attractif d’Europe ? Selon les dirigeants, cinq conditions sont nécessaires : prolonger l’effort de compétitivité, réduire la dépense publique, continuer la réindustrialisation, monter en puissance sur la transition écologique et miser sur l’innovation. En mai 2025, le cabinet EY proposera à nouveau de grands bilans d’investissements dans une quarantaine de pays, s’appuyant à nouveau sur un sondage de dirigeants internationaux.
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*La perception et les attentes des décideurs internationaux ont été recueillies en ligne auprès de 200 décideurs internationaux du 3 au 21 octobre 2024 dans 25 pays.