Un livre bilingue, premier en son genre au Cambodge, réunit les témoignages poignants de 12 aînés LGBT+. Une œuvre historique pour éduquer, inspirer et militer pour l’égalité.
Un projet audacieux pour raconter l'histoire des oubliés
Le 22 novembre dernier, RoCK Senior Members a été présenté à Phnom Penh dans une atmosphère chargée d’émotion. Ce livre, bilingue en khmer et anglais, donne la parole à 12 témoins LGBT+ d'hier dont les vies, marquées par les épreuves et l’amour, couvrent plusieurs décennies d’histoire cambodgienne.
Porté par l’ONG Rainbow Community Kampuchea (RoCK), ce projet ambitieux vise à préserver la mémoire d’une génération souvent ignorée.
« Il était crucial pour nous de capturer ces récits avant qu’ils ne soient perdus », explique Ly Pisey, cofondatrice de RoCK.
« Ces témoignages ne sont pas seulement personnels, ils reflètent aussi les luttes et la résilience d’une communauté. »
Des récits ancrés dans l'histoire du Cambodge
Parmi les histoires bouleversantes, celle de Sot Yun, un homme transgenre né en 1955 dans la province de Takeo, illustre à quel point vivre sa vérité pouvait être un acte de résistance. Sous le régime des Khmers rouges, il a refusé de porter des vêtements féminins ou de se marier avec un homme, malgré les pressions.
« Ils me voyaient comme une fraude », se rappelle-t-il. Aujourd’hui âgé de près de 70 ans, il milite pour que les jeunes générations bénéficient des droits qu’il n’a jamais eus.
Horn Chhoeun, une lesbienne de la province de Kampong Thom, raconte comment elle a défié les attentes de sa famille en construisant une vie avec sa compagne, qu’elle aime depuis près de 40 ans. Leur relation prouve que l’amour, même en défiant les normes, peut être une force durable.
Le processus de création : une aventure humaine et militante
La réalisation de ce livre a demandé plusieurs années de travail. Les équipes de RoCK ont parcouru les provinces cambodgiennes, à la recherche de voix prêtes à partager leurs expériences. Ces récits, certains issus d’époques aussi lointaines que les années 1950, sont des archives vivantes de la diversité et de la tolérance culturelle du Cambodge.
« Ce n’était pas facile », confie Ly Pisey. « Beaucoup ont hésité à se livrer, craignant les jugements ou ravivant des souvenirs douloureux. Mais leur courage montre à quel point il est important de raconter ces histoires. »
Un outil pour éduquer et inspirer
Au-delà des récits individuels, RoCK Senior Members se veut un outil de sensibilisation. L’ONG espère qu’il contribuera à briser les stéréotypes et à encourager une plus grande tolérance dans une société où les droits LGBT+ restent limités.
Si les relations entre personnes de même sexe sont légales au Cambodge, l’absence de protections juridiques spécifiques contre les discriminations et l’impossibilité de se marier restent des obstacles majeurs. Pourtant, comme le souligne Ly Pisey,
Ce livre montre que l’amour n’a pas de frontière, ni d’âge, ni de genre.
Une œuvre saluée par les leaders et les militants
Lors du lancement, Khieu Kanharith, ancien ministre de l’Information, a rappelé l’importance de protéger les droits de tous.
« Aucun individu ne devrait être puni ou discriminé pour ce qu’il est. Ce livre est une contribution précieuse à notre avenir commun », a-t-il déclaré.
Le British Ambassador Dominic Williams, également présent, a salué l’effort, comparant la situation au Cambodge avec celle du Royaume-Uni, où le mariage égalitaire a mis des décennies à devenir réalité.
« Ce livre est une étape cruciale pour changer les mentalités et promouvoir l’égalité », a-t-il ajouté.
Un espoir pour les générations futures
En mettant en lumière ces récits uniques, RoCK Senior Members offre une source d’inspiration pour les jeunes générations et un appel à l’action pour les décideurs. Le livre est disponible auprès de RoCK et de librairies partenaires, un achat qui soutient directement la communauté LGBT+ au Cambodge.
« Ce que nous voulons, c’est que ces récits montrent à tous qu’être soi-même est un acte de courage et que l’amour mérite toujours d’être célébré », conclut Ly Pisey.
À lire, à partager, à défendre : l’avenir de l’égalité passe aussi par la mémoire.
Source : Cambodianess
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