Moins de 48h après un échange de tirs mortel près de Preah Vihear, officiers cambodgiens et thaïlandais se sont rencontrés pour désamorcer la crise et relancer la coopération.


Une rencontre pour désamorcer les tensions
Jeudi en fin de journée, moins de 48 heures après un affrontement meurtrier à la frontière, des hauts responsables militaires cambodgiens et thaïlandais se sont réunis dans un bureau de liaison frontalier à Oddar Meanchey afin d’apaiser les tensions. Les discussions ont été menées par le général Mao Sophan côté cambodgien et par le général Pana Klaewplodthuk côté thaïlandais.
Selon un communiqué de l’armée cambodgienne, les deux pays ont convenu d’activer les mécanismes bilatéraux existants pour traiter le différend : le Comité frontalier mixte (JBC), en charge des négociations techniques de démarcation, le Comité général des frontières (GBC) pour la coordination militaire, et le mémorandum d’accord de l’an 2000 qui fixe les règles de gestion des zones disputées. Ces mécanismes avaient déjà été mobilisés lors de précédents différends frontaliers.
Les deux parties se sont engagées à maintenir la paix dans les zones sensibles et à résoudre les désaccords par la voie diplomatique, notamment via des réunions du JBC prévues dans les deux à trois prochaines semaines. Le Cambodge a réitéré un appel à un « respect mutuel de la souveraineté et de l’intégrité territoriale », une formule également reprise par la partie thaïlandaise.
Le Cambodge refuse de désarmer
L’armée cambodgienne a précisé qu’elle ne retirerait pas ses troupes du point de friction où a eu lieu l’échange de tirs, ni n’accepterait qu’elles soient désarmées. Elle souligne que ces forces sont présentes sur cette position depuis avant la signature du mémorandum de 2000.
La rencontre visait à apaiser une montée de tension survenue à la frontière près du temple de Preah Vihear, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. L’incident du 28 mai a coûté la vie à un soldat cambodgien et chaque camp accuse l’autre d’avoir ouvert le feu.
Réactions des autorités cambodgiennes et thaïlandaises
Le président du Sénat cambodgien et ancien Premier ministre Hun Sen a attribué la responsabilité de l’incident non pas à la politique officielle de la Thaïlande, mais à des officiers subalternes thaïlandais. Il s’est exprimé dès le lendemain matin lors d’une session du Sénat, après avoir publié un message sur Facebook dans la soirée.
Adoptant un ton conciliant tout en affirmant fermement la souveraineté du Cambodge, il a confirmé que des renforts et du matériel militaire avaient été déployés à la frontière, précisant qu’ils ne seraient utilisés qu’en cas de provocation. Il a par ailleurs mis en doute les revendications territoriales thaïlandaises dans la zone concernée et demandé un retour à la normale, soulignant que des habitants avaient été évacués par mesure de précaution.
Le Premier ministre cambodgien Hun Manet, actuellement en visite officielle au Japon, a lui aussi appelé au calme et exprimé l’espoir que les relations militaires entre les deux pays reviennent rapidement à la normale. La cheffe du gouvernement thaïlandais, Paetongtarn Shinawatra, a indiqué à Radio Free Asia avoir échangé avec Hun Manet, qualifiant l’incident de « mineur » et assurant que les deux parties étaient d’accord pour éviter toute escalade.
Deux versions contradictoires des faits
Selon le ministère cambodgien de la Défense, l’incident s’est produit tôt le 28 mai lorsque des soldats thaïlandais auraient ouvert le feu sur un poste cambodgien situé dans le village de Morodok Techo, dans la province de Preah Vihear, à la frontière avec celle d’Ubon Ratchathani en Thaïlande. L’armée thaïlandaise avance une version contraire, accusant les troupes cambodgiennes d’avoir tiré les premières. L’échange aurait duré une dizaine de minutes avant l’instauration d’un cessez-le-feu.
Un contentieux frontalier ancien
La zone autour du temple de Preah Vihear est le théâtre de tensions récurrentes. Si la souveraineté du site a été reconnue au Cambodge par l’ONU, cette reconnaissance a provoqué plusieurs affrontements entre les deux pays, notamment entre 2008 et 2011. Depuis, seuls des incidents mineurs avaient été signalés, à l’exception de cette fusillade mortelle. En février dernier, un autre face-à-face avait opposé brièvement des soldats cambodgiens et thaïlandais à proximité d’un autre temple contesté.
Le porte-parole de l’armée royale cambodgienne, Mao Phalla, a refusé de commenter les mouvements de troupes, estimant que les affaires militaires ne relèvent pas du domaine public. Néanmoins, le commandant adjoint de la division militaire en poste à Preah Vihear a assuré que « la situation est désormais normale ».
Avec l'aimable autorisation de CamboJA News, qui a permis la traduction de cet article et ainsi de le rendre accessible au lectorat francophone.
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