Le Cambodge quittera le statut de PMA en 2029, menaçant l’emploi féminin. Des réformes sont essentielles pour protéger les travailleuses et favoriser leur inclusion dans une économie plus compétitive et formelle.


Le 19 décembre 2029, le Cambodge quittera officiellement la catégorie des Pays les Moins Avancés (PMA), marquant ainsi une étape significative de son développement. Cette évolution témoigne de la hausse du revenu national brut par habitant, des progrès en matière de capital humain et d’une résilience économique et environnementale accrue. Toutefois, cette transition impliquera également la suppression progressive des mesures de soutien international, notamment les accords commerciaux préférentiels et les financements concessionnels, ce qui nécessitera d’importantes transformations économiques et sociales.
Un impact majeur sur les femmes travailleuses
Cette transition affectera l’ensemble de la société, avec des défis tels que la précarité de l’emploi, l’augmentation de la pauvreté et des inégalités. Parmi les plus vulnérables figurent les femmes, en particulier celles travaillant dans le secteur textile. Selon une étude conjointe du PNUD et du ministère du Plan, la perte des préférences commerciales risque de fragiliser l’industrie du vêtement, qui emploie environ un million de personnes, dont 75 % sont des femmes. La disparition progressive des avantages tarifaires et l’imposition de nouvelles normes d’origine et de transformation industrielle entraîneront une pression accrue sur la productivité et la compétitivité. On estime ainsi que 165 000 emplois, principalement féminins, pourraient disparaître.
Par ailleurs, l’économie informelle reste un enjeu de taille : 88,3 % des travailleurs cambodgiens y sont employés, dont 87,6 % sont des femmes. Cette forte informalité limite l’accès aux protections sociales, aux opportunités économiques et à l’évolution professionnelle, maintenant de nombreuses travailleuses dans des secteurs peu rémunérateurs et instables.
Des initiatives en faveur de l’inclusion économique des femmes
Pour pallier ces risques, le gouvernement cambodgien a adopté la politique-cadre Neary Rattanak VI (2024-2028), visant à intégrer l’égalité des sexes dans les politiques publiques et à renforcer l’accès des femmes au marché du travail et aux services financiers. Parallèlement, la Stratégie nationale pour le développement de l’économie informelle (2023-2028) ambitionne de faciliter la transition des travailleuses informelles vers l’économie formelle grâce à un régime de sécurité sociale volontaire et à la simplification des procédures d’enregistrement des entreprises.
Le PNUD soutient également plusieurs initiatives pour renforcer l’autonomie économique des femmes, notamment l’accès au crédit via le Women Guarantee Scheme, la formation à l’entrepreneuriat et à l’e-commerce, ainsi que la promotion de la protection sociale et des emplois décents.
Quelles stratégies pour assurer une transition juste et durable ?
Pour que le Cambodge réussisse sa sortie du statut de PMA sans compromettre les acquis en matière d’égalité des sexes, il est impératif d’adopter une Stratégie de Transition Douce intégrant les dimensions économiques, sociales et environnementales. Cette approche devrait notamment :
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Réduire l’écart entre les sexes dans l’éducation et la formation professionnelle, en encourageant les femmes à investir des secteurs d’avenir grâce à des bourses ciblées et un accompagnement pédagogique adapté.
- Développer des politiques familiales et de soutien aux soins, facilitant l’accès aux services de garde pour les enfants, les personnes âgées et les personnes en situation de handicap.
- Favoriser l’entrepreneuriat féminin, par la formation en gestion financière, l’accès facilité aux crédits et l’accompagnement des initiatives économiques portées par des femmes.
- Renforcer le rôle du secteur privé, en alignant les compétences des travailleuses sur les besoins du marché et en encourageant des pratiques commerciales responsables.
Avec un taux de participation des femmes au marché du travail atteignant 78,9 % en 2023, l’un des plus élevés de la région, le Cambodge dispose d’un atout considérable pour assurer une transition inclusive et durable. Toutefois, sans mesures adaptées, le pays risque de voir reculer ses avancées en matière d’émancipation économique des femmes.
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