Édition internationale

Le Cambodge et 50 pays frappés par le retrait des aides US aux médias

Les coupes de 150 millions $ d’aides américaines ont entraîné une vague de fermetures de médias indépendants dans plus de 50 pays, dont le Cambodge.

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Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 28 juillet 2025

Les médias indépendants traversent une crise mondiale sans précédent, révèle un rapport publié vendredi. Ce document souligne que la suppression de 150 millions de dollars d’aides américaines en 2025 a entraîné des fermetures massives, des licenciements et une explosion de la désinformation dans des dizaines de pays, dont le Cambodge.

Intitulé Crisis in Journalism: The Impact of the US Government Funding Cuts on Global Media, ce rapport a été réalisé par Internews Europe, BBC Media Action et Free Press Unlimited, avec le soutien de la Commission européenne. Il documente la fermeture de nombreuses rédactions, la perte d’emplois et la dégradation accélérée de l’environnement médiatique, notamment dans les zones de conflit.

 

 

Des licenciements en cascade et des journalistes en danger

Les principales conclusions du rapport sont alarmantes : les coupes ont entraîné une réduction drastique des effectifs et de la couverture journalistique. Les journalistes sont de plus en plus exposés, en particulier dans les zones à risques, alors que les mesures de sécurité s’effondrent. L’accès à une information fiable, notamment locale, disparaît rapidement au profit de contenus manipulateurs exploitant la fragilité des écosystèmes médiatiques.

« Sans soutien immédiat et flexible, des journalistes et des communautés entières seront encore plus exposés à la censure, à la propagande et aux coupures d’information », a déclaré Meera Selva, directrice d’Internews Europe, dans un communiqué. « Même des investissements modestes peuvent préserver l’avenir de la presse indépendante. »

 

 

Une crise déclenchée par un décret présidentiel américain

La crise a été provoquée par un décret signé en janvier 2025, suspendant l’aide extérieure américaine. Cette décision a engendré une chute brutale du financement pour les médias indépendants – en particulier dans les contextes fragiles ou autoritaires où ce soutien était vital.

En 2024, le Congrès américain avait alloué 271,5 millions de dollars d’aide via le Département d’État et l’USAID pour « les médias indépendants et la libre circulation de l’information ». Sur ce montant, environ 150 millions de dollars étaient directement destinés au journalisme et au développement médiatique. Le reste concernait des domaines connexes comme la liberté d’expression, les droits numériques et les politiques technologiques.

 

 

L’Asie particulièrement touchée, le point au Cambodge 

En Asie, cette suspension des financements américains a supprimé près de la moitié des aides au développement médiatique. Des pays comme la Birmanie, l’Afghanistan, la Tunisie et le Cambodge ont vu leurs médias indépendants amputés de la quasi-totalité de leurs ressources de fonctionnement.

Au Cambodge, le rapport indique que « presque tous les médias critiques du gouvernement ont déjà été fermés par le biais d’attaques juridiques », et que ceux qui subsistent – ainsi que les organisations de soutien – font désormais face à une fermeture imminente faute de financement.

Les stations de radio indépendantes Voice of America (VOA) et Radio Free Asia (RFA) suscitent aujourd’hui l’inquiétude des défenseurs de la liberté de la presse et de la société civile.

 

 

Des voix cambodgiennes s’élèvent

Meas Da, ancienne journaliste pour VOA Khmer, a déclaré à CamboJA News qu’elle était au chômage depuis trois mois, après la suspension des activités de VOA liée à la coupure de financement américain. Elle déplore non seulement la perte de son emploi, mais aussi une atteinte majeure à l’accès du public à l’information, ainsi qu’aux opportunités de formation pour la jeunesse cambodgienne.

« Je n’ai plus de travail. C’est très difficile d’en trouver un maintenant », confie-t-elle. « Si les États-Unis coupent les fonds, les médias indépendants seront encore plus réduits, ce qui pénalisera les gens qui comptent sur les médias pour rendre compte des problèmes à venir. Cela freinera aussi la recherche de solutions. »

Ces constats font écho à un rapport publié cette semaine par le Cambodian Center for Independent Media (CCIM), qui alerte sur une dégradation continue de la liberté de la presse au Cambodge, en raison des menaces juridiques, du manque de ressources et du durcissement des restrictions. Un climat de peur s’installe dans la profession.

 

 

Un appel urgent à l’action internationale

Avec la perte annuelle de 150 millions de dollars de financement ciblé, le secteur médiatique fait face à des défis colossaux. Le rapport plaide pour une aide d’urgence, un soutien opérationnel et une stratégie à long terme. Il appelle notamment à :

  • une assistance rapide et des dispositifs de relocalisation pour les journalistes menacés ;
  • des financements pérennes pour les rédactions-clés et les organisations de soutien ;
  • des investissements dans le journalisme d’intérêt public ;
  • une meilleure coordination entre les bailleurs internationaux.

« Ce n’est pas seulement une crise financière, c’est une crise des droits humains », insiste Ruth Kronenburg, directrice exécutive de Free Press Unlimited. « Nous devons réaliser que ces journalistes courageux dans les pays répressifs sont nos yeux et nos oreilles. Le risque est grand que ces yeux se ferment un à un, nous plongeant dans l’ombre, tandis que les régimes autoritaires gagnent en légitimité. »

Seoung Nimol

Avec l’aimable autorisation de CamboJA News, qui nous permet d’offrir cet article à un lectorat francophone.

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