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Au Cambodge, le calvaire des victimes d’attaques à l’acide

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Une victime d'attaque à l'acide au Cambodge en 2007. Crédits : Iulian Circo / Flickr Creative Commons
Écrit par Marion Joubert
Publié le 7 février 2019, mis à jour le 8 février 2019

D'après un rapport de Human Rights Watch, la plupart des Cambodgiens qui ont survécu à une attaque à l’acide ne reçoivent pas le soutien légal auquel ils ont pourtant droit. Le gouvernement cambodgien considère que cette étude n'a que pour objectif de discréditer les responsables cambodgiens.

La plupart des Cambodgiens qui ont survécu à une attaque à l’acide ne reçoivent pas le soutien légal auquel ils ont pourtant droit, selon un rapport de Human Rights Watch publié le 4 février intitulé « Voilà à quoi ressemble l’enfer : Attaques violentes à l’acide au Cambodge ».

En 2012, le gouvernement a adopté une loi criminalisant ce type attaque, punie entre 10 et 20 ans de prison, et permettant aux victimes de recevoir des soins médicaux gratuits. Toutefois, le rapport de Human Rights Watch décrit une réalité bien différente. Le contenu de ce communiqué est basé sur des entretiens avec 81 personnes, dont 17 ayant survécu à des attaques à l’acide. La plupart affirment que tous les hôpitaux leur font payer leurs traitements. Une survivante déclare : « A chaque fois qu’ils prenaient mon sang, qu’ils donnaient des médicaments, ils me soutiraient de l’argent ». Selon l’ONG, les juges encouragent les familles à régler leurs différends hors des tribunaux.

Depuis l’adoption de la loi, 25 attaques à l’acide ont été signalées, particulièrement dans les provinces de Kampong Cham et de Tboung Khmum, où l'acide concentré est utilisé pour l'industrie du caoutchouc. 

La majorité des victimes interrogées sont de sexe féminin. D’après le rapport, il est en effet courant dans l’imaginaire collectif cambodgien de penser que celles qui ont reçu une attaque à l’acide sont des maîtresses et des femmes ayant commis un adultère. Les cicatrices sont alors perçues comme une preuve de leur culpabilité. 

Les victimes, privées d’aide psychologique, se sentent rejetées par la société. Leur torture est psychologique mais aussi physique puisque les brûlures peuvent prendre des années à guérir. Même si l’acide est retiré, il continue de ravager en profondeur les tissus pendant des jours. « Pendant six mois, j'ai senti l'acide sur mon visage quand j'inspirais et expirais », indique un des survivants interrogés par l’ONG.

En plus de subir des souffrances physiques, mentales et sociales sur le long terme, les victimes font face à des difficultés économiques. Aucune des personnes interrogées par Human Rights Watch n'a reçu d'indemnisation ordonnée par un tribunal. Une survivante qui est allée au bout processus judiciaire annonce n’avoir rien reçu de la part de l’accusé : « Je n'ai jamais obtenu un seul centime d'indemnisation pour ma cause ».

A travers ce rapport, Human Rights Watch délivre plusieurs recommandations, à commencer par la révision de l’article 11 de la loi sur l'acide qui stipule que « l'État doit fournir un soutien juridique aux victimes de l'acide concentré ». Le contenu de cette loi ne précise pas la forme que doit prendre ce soutien juridique. Par conséquent, Human Rights Watch considère que le gouvernement devrait en clarifier le sens. Pour l’ONG, le code criminel devrait lui aussi être modifié afin d’interdire les règlements financiers informels dans les affaires pénales.

Le porte-parole du ministre cambodgien de la Justice a accusé les auteurs du rapport d'être motivés politiquement et d'avoir pour intention de discréditer les responsables cambodgiens qui ont fait des efforts pour remédier aux problèmes rencontrés par les victimes d'attaques à l'acide. « Le rapport n'était pas basé sur des recherches scientifiques. Si on examine la façon dont les questions ont été organisées et les groupes cibles, il apparaît que le rapport a été fait avec l'intention d'insulter ou de montrer du mépris face aux responsables de l'application des lois. Il s'agit d'une vengeance contre le gouvernement cambodgien. »

photo cv annecy
Publié le 7 février 2019, mis à jour le 8 février 2019

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