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Étudier en Roumanie: un jeune chirurgien dentiste nous raconte son retour en France

Un chirurgien dentiste en RoumanieUn chirurgien dentiste en Roumanie
Pexels / Cedric Fauntleroy
Écrit par Sébastien Teissier
Publié le 4 septembre 2022, mis à jour le 17 novembre 2023

Pour sa chronique hebdomadaire, Sébastien Teissier, notre correspondant à Iasi, se rendra tous les mois à la rencontre des étudiants francophones de Roumanie. Il consacrera les prochains numéros de la chronique aux retours. En effet, bon nombre d’entre vous se pose la question du départ, mais également du retour en France, une fois le précieux diplôme obtenu. Aujourd'hui il donne la parole à Rafik Deridj, un jeune chirurgien dentiste de 33 ans, spécialiste en orthodontie, qui nous partage ici son expérience du retour.

 

Sébastien Teissier: Rafik, expliquez-nous votre parcours

Rafik: Comme la très grande majorité des étudiants français en Roumanie, j’ai effectué une première année de médecine en France et, après mon échec, je n’ai pas abandonné mon rêve et je suis allé à Cluj-Napoca pour effectuer mes études de chirurgie dentaire. Je suis membre du conseil des Alumni de l’UMF Cluj-Napoca depuis 2019. Je suis arrivé à l’UMF Cluj en 2010, j’ai effectué mon doctorat de “Chirurgien dentiste”. Une fois le précieux sésame je suis rentré en France pour exercer. Durant  deux années j’ai travaillé en tant que chirurgien dentiste dans une cabinet en Ile-de-France. Ces deux années m’ont permis non seulement d’acquérir de l’expérience professionnelle mais également de réfléchir à l’idée de faire une spécialité. Grâce aux retours de confrères et amis restés en Roumanie pour faire leur spécialité j’ai pu agrémenter ma réflexion et confirmer mon choix. De plus la qualité de la formation clinique étant très bonne, je n'ai pas hésité et je suis parti faire ma spécialité d'orthodontie à Timișoara. Ce fut 3 années très intéressantes, et elles m’ont permis au-delà d'acquérir un diplôme de spécialité, de visiter certains endroits de Roumanie qui m’étaient inconnus. La région de Timișoara est très très belle, à proximité de la Serbie, j’ai découvert une autre partie des Balkans, et d’autres traditions culinaires. J’ai terminé ma spécialité il y a quelques mois, en janvier 2022, marquant ainsi mon retour en France après 9 années passées en Roumanie.

Rafik Deridj dentiste étudiant médecine Roumanie
Rafik Deridj

 

Parlez-nous de votre expérience en Roumanie

La Roumanie est une terre de contraste, de bienveillance collective. J’ai pu trouver dans cette terre d’adoption, beaucoup de sincérité dans les rapports humains, et de bienveillance pour le Français fraîchement expatrié que j'étais. C’est sans doute cela qui m’a motivé à apprendre la langue roumaine au plus vite et accéléré mon intégration. J’ai été plus intégré dans la vie culturelle et associative roumaine que dans les soirées étudiantes des expatriés. J’ai donc pu m’intégrer plus facilement, grâce à ma maîtrise de la langue roumaine, et mon activité de bénévole auprès de l’Institut français de Cluj. Ce mode vie m’a permis de passer 6 années magnifiques à Cluj, et m'y sentir comme chez moi.

 

Comment se passe ensuite l'exercice de la médecine en France ?

L’exercice en France pour nous expatriés de retour, est simple. Il suffit de suivre une procédure sensiblement identique à celle des Français diplômés de France. En effet, il faut obtenir des traductions légalisées et s’inscrire au conseil de l’ordre des chirurgiens dentistes dans le département où vous souhaitez exercer.

Je peux résumer cette procédure en plusieurs étapes (de façon non exhaustive) :

  • Diplôme du baccalauréat
  • Obtenir un certificat de conformité du diplôme obtenue dans une des UMF de Roumanie auprès de la DSP “direction de santé publique en Roumanie” (équivalent de notre ARS en France)
  • Traduction et légalisation du diplôme obtenu en Roumanie
  • Traduction et légalisation de l’ensemble des notes obtenues au cours des 6 années
  • Souscrire à une RCP : responsabilité civile professionnelle
  • Inscription au conseil de l’ordre du département où vous souhaitez exercer ainsi que la cotisation annuelle, avec ou sans une interview selon le département.

Pour plus de détails voici deux documents explicatifs (page n°5 pour les chirurgiens dentistes) :

https://dspb.ro/dspb-uploads/2020/05/Documente-Certificate-de-Conformitate.pdf

Privind documentele care se depun la direcţiile de sănătate publică, precum şi a documentelor emise de Ministerul Sănăt

 

Est-ce qu’il y a une défiance voire une méfiance à l’égard des Français diplômés de Roumanie ?

C’est une bonne question, la seule défiance ou méfiance que j’ai pu ressentir, était à l’égard de certains confrères, et je qualifierais plus ce sentiment par de la jalousie, et non une méfiance, car la qualité d’un chirurgien dentiste ne réside pas dans l’université où il a obtenu son diplôme mais dans sa pratique, sa rigueur, et son humanisme. L'humanisme ne s’apprend pas, il fait partie de nous…

Les patients ne m’ont jamais critiqué du fait de mon origine, ou de l’origine de mon diplôme, en revanche ils ont la même exigence qu’avec mes confrères, et cela est, à mon avis, le fil conducteur de mon professionnalisme, à savoir bien soigner, et être toujours au maximum pour mes patients.

 

Rafik Deridj dentiste étudiant médecine Roumanie

 

Avez-vous quelque chose à ajouter?

Je parlerais plutôt du regret d'avoir hésité, pourquoi je n’ai pas tout fait…certes tout ne peut suivre nos désirs, nos rêves, mais au moins tout faire pour essayer de les atteindre et ne pas avoir de regrets. J’ai traversé ce questionnement durant mes deux années d’exercice après mon diplôme obtenu…et j’ai sauté le pas, j’ai pris le risque d’être heureux et épanoui en faisant ma spécialité, bien que cela m’ait éloigné de ma famille quelques années de plus. Cependant j’ai bénéficié du soutien indéfectible de mes parents et cela est bien plus important qu’on ne l’imagine. Nos rêves ont besoin du soutien des gens qu’on aime. Donc foncez, non pas tête baissée, mais tête pleine, et le coeur grand car c’est une expérience qui m’a transformé et rempli d’amour, de bienveillance, et de joie qui, je le pense, sont nécessaires pour être un homme meilleur, et un professionnel compétent.

 

 

Cet article est dédié à Ioana Costaş, directrice de l’Institut Français de Cluj-Napoca, qui nous a quitté malheureusement trop tôt, toutes nos pensées vont vers sa famille et sa jeune fille.)

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