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La microfinance peut-elle aider dans la crise de la Covid-19 ?

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Écrit par Julia Guinamard
Publié le 16 juillet 2020, mis à jour le 17 juillet 2020

Une loi sur la microfinance est encore en débat au parlement birman. Et début juillet, l’organisation Proximity Finance a reçu des fonds français, finlandais et norvégiens pour continuer à prêter.

« Le secteur de la microfinance ne peut pas se permettre de nouvelles restrictions. La poursuite de nos activités est essentielle pour soutenir l'économie et permettre à nos clients de traverser la crise », s’inquiétait en mai le responsable commercial de l’institution de microfinance (IMF) Proximity Finance, branche de l’entreprise sociale Proximity Design. Une IMF est une structure qui délivre des services financiers, souvent des prêts, aux personnes exclues du système bancaire classique. Depuis début juillet, Proximity Finance peut être rassuré grâce à une levée de quelque 12 millions d’euros. Proparco - filiale de l’Agence Française pour le Développement -, l’agence de développement financier Finnfund et la Nordic Microfinance Initiative ont participé à l’apport. L’ambassade de Finlande a annoncé que ces fonds seront alloués sous forme de prêts à des fermes de petites tailles et à des femmes voulant monter une activité. « En mettant l'accent sur les petites exploitations agricoles, Proximity Finance s'attaque au manque de financement dans les régions rurales et transforme le paysage financier de 30 millions de personnes qui sont exclues du système traditionnel », explique la directrice de la région Asie du Sud-Est de Proparco. Avec ces 12 millions d'euros, Proximity Finance allouera 1 500 000 prêts sur les quatre prochaines années et prévoit ainsi de tripler chaque année ses bénéficiaires qui sont aujourd’hui 130 000.

Les entreprises de microfinance face à un manque de liquidités

Le gouvernement a demandé aux banques et IMFs de reporter les échéances d’avril au 15 mai. Il a aussi imposé une baisse des taux d’intérêt de 16 % à 14,5%. « Plus le taux d'intérêt est bas, plus nos coûts sont élevés, ce qui signifie que nous pouvons prêter moins d'argent », note le responsable du programme pour l’inclusion financière et les projets privés du Fonds multi-bailleurs pour l’amélioration de la sécurité alimentaire et des modes de vie (LIFT). À cela s’ajoute l’incapacité de certains emprunteurs de rembourser leurs prêts. Pour les IMFs, cela est synonyme de liquidités dans le rouge. Le LIFT a constaté en avril un manque de 115 millions de dollars (environ 102 millions d’euros) dans les trésoreries des IMFs avec lesquelles il travaille. Pourtant, c’est en ce moment même, avec l’impossibilité d’exporter, la réduction des salaires et la hausse des licenciements que des personnes ont le plus besoin de cette aide financière.

La microfinance un cercle vertueux ou vicieux ?

Mais malgré la création d’un cadre législatif pour les IMFs en 2011, la solvabilité et la viabilité des projets des emprunteurs ne sont pas toujours assez vérifiées. Dans ces circonstances, l’aide peut devenir un poids. Dans le village de Lay Eain, dans la circonscription de Magway, une villageoise a obtenu quatre prêts de différentes IMFs. Chaque mois, elle doit rembourser 184 000 kyats (de l’ordre de 120 €). Sans travail, elle a pourtant obtenu ces prêts car dans son cas, les IMFs ont privilégié l’inclusion sans bien vérifier l’insertion professionnelle et donc la solvabilité de l’emprunteuse. Son mari gagne environ 15 000 kyats (quelque 10 €) par jour et son fils aîné est ramasseur de jade. Ils assurent les ressources financières de la famille mais elles sont insuffisantes pour à la fois garantir les remboursements des prêts et subvenir aux besoins du foyer, qui compte sept personnes. Ne pouvant plus assumer ses échéances, elle s’est tournée vers un prêteur informel à qui elle a emprunté 300 000 kyats (environ 200 €) au taux de 7%. « Lorsque je rembourse le prêt d'une IMF, je peux demander un nouveau prêt, mais je dois alors emprunter auprès de prêteurs pour assurer le remboursement de mes dettes. Donc, l'argent vient d'une entreprise et va aux prêteurs », explique-t-elle. Accorder trop de prêts pour faire face aux répercussions de la crise de la Covid-19 pourrait donc être le commencement d’un cercle vicieux.

Depuis 2011, 200 IMFs ont été créés en Birmanie et 5,5 millions de personnes ont recouru à des prêts de microfinance.

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